Thèse en cours

Les concessions hydroélectriques : enjeux juridiques

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Auteur / Autrice : Salomé Brion
Direction : Jean-Christophe Videlin
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Droit Public
Date : Inscription en doctorat le 01/11/2021
Etablissement(s) : Université Grenoble Alpes
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale sciences juridiques (Grenoble, Isère, France ; 2003-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de recherches juridiques (Grenoble ; 1995-....)

Résumé

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Les concessions hydroélectriques présentent des intérêts local, national et européen et recouvrent des enjeux juridiques, économiques et environnementaux d'une actualité acérée. Intérêt local, car les barrages hydroélectriques sont très nombreux dans l'arc Alpin. La houille blanche, autre dénomination de l'énergie hydraulique, a constitué un des vecteurs majeurs du développement économique et industriel de l'Isère. Première région française en termes de production hydraulique, la région Auvergne-Rhône-Alpes dispose du plus important potentiel hydroélectrique - près de 46 % de la puissance installée en France - et réalise près de 44 % de la production d'énergie hydraulique française, soit 27 381 GWH en 2019 (1). Intérêt national, car l'énergie hydraulique s'impose comme la deuxième source d'électricité en France, derrière le nucléaire (2). La France compte aujourd'hui près de 400 concessions hydroélectriques et dispose du second parc hydroélectrique d'Europe, après la Norvège (3). L'énergie hydraulique représente 10 à 12 % de la production nationale d'électricité et définit la principale source d'énergie d'origine renouvelable, devant l'éolien (4). Exploitée depuis la fin du 19ème siècle, cette énergie résulte de la force motrice de l'eau, liée principalement à la hauteur de la chute et générée par les cours d'eau, lacs et plus rarement marées, par le biais de barrages (5). Cela justifie leur localisation massive dans les massifs alpins et pyrénéens (6). Institutionnellement, cette dimension nationale se manifeste par le fait que les concessions hydroélectriques sont très majoritairement gérées par Electricité de France (EDF), aujourd'hui société anonyme détenue à près de 84 % par l'Etat, opérateur public historique dont le monopole a marqué l'histoire du secteur électrique français (7). Le monopole d'EDF concourt au triptyque du service public à la française : activité d'intérêt général, opérateur public, droit public. Intérêt européen enfin, car le monopole d'EDF n'est plus adapté aux dispositions européennes du droit de la concurrence. Ainsi, la production et la fourniture d'électricité - le transport et la distribution d'électricité restent des activités réglementées - sont ouvertes à la concurrence (8). De fait, les « concessions hydroélectriques » sont problématiques aux yeux de la Commission européenne qui, depuis la fin des années 2000, somme la France d'ouvrir à la concurrence ses concessions hydroélectriques et dénonce le statu quo. L'actualité du sujet est, par ailleurs, prégnante sous trois aspects. L'actualité est juridique car 150 concessions sur 400 arrivent à échéance d'ici 2023, occasion - ou non… - pour l'Etat de se conformer au droit européen, en particulier aux mises en demeure adressées à la France par la Commission européenne en 2015 et en 2019. L'actualité est économique car l'hydroélectricité représente en France une part non négligeable de la production d'électricité et plus de 10.000 emplois directs (9). La souveraineté énergétique de la France est assurément un enjeu dans la cadre d'une réflexion renouvelée de la souveraineté économique de l'Etat (10) . L'actualité est environnementale. Première source d'énergie renouvelable, l'hydroélectricité participe à la protection de l'environnement et plus particulièrement de l'eau, denrée précieuse, à multi-usages et qui se raréfie. Les installations hydroélectriques font aujourd'hui partie intégrante de l'aménagement des vallées. L'eau des barrages hydroélectriques participe à l'irrigation, la pêche, l'agriculture, le tourisme, la navigation et l'industrie (11). En tenant compte de ces éléments, la recherche doctorale relative aux concessions hydroélectriques offre ainsi un nouveau regard sur le ballotement entre le modèle français du service public d'une part, et les exigences européennes imposant l'ouverture à la concurrence, d'autre part. Cette dissension ne peut être résolue sans satisfaire aux enjeux économiques et, point majeur, environnementaux connexes à ce secteur. Au regard du contexte général d'ouverture à la concurrence - tout comme le recours à la privatisation - le régime juridique français des concessions hydroélectriques invite donc à s'interroger sur le rôle de la puissance publique dans la production de l'énergie hydroélectrique. L'Etat intervenant aujourd'hui davantage dans une logique de participation et de régulation des activités économiques, un réel changement de paradigme se produit, à tel point que la figure de l'Etat propriétaire unique apparait aujourd'hui comme obsolète, voire inadaptée à la société actuelle. Les résultats contrastés des grandes entreprises publiques - à l'instar d'EDF, récemment de l'EPR ou encore de la gestion du parc nucléaire - appellent à l'analyse du modèle concessif, profitant aujourd'hui majoritairement à EDF (12). Il est donc nécessaire d'établir le droit applicable aux concessions hydroélectriques, respectivement le droit français et le droit européen afin d'ouvrir une réflexion prospective sur la balance entre monopole et concurrence. (1) V. annexe 4 ; https://www.orcae-auvergne-rhone-alpes.fr/analyses-thematiques/energie/la-production-denergie-en-auvergne-rhone-alpes ; http://www.auvergne-rhone-alpes.developpement-durable.gouv.fr/concessions-hydroelectriques-a14552.html. (2) V. annexe 3. (3) V. annexe 2. (4) DELEPINE (J.) - EDF démantelé au profit du privé ?, Alter éco, n° 412, 2021/5, p. 54-57 ; DELAUNAY (B.) - Chapitre 10 - L'énergie hydraulique, in BOITEAU (C.), dir. - Énergies renouvelables et marché intérieur, 1ère éd., Bruxelles, Bruylant, 2014, p. 195-197 ; CR n° 89, Commission des affaires économiques, Ass. nat., session ord. 2017-2018, 30 mai 2018, disponible sur https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/comptes-rendus/cion-eco/l15cion-eco1718089_compte-rendu. (5) V. annexe 1 ; https://www.ecologie.gouv.fr/hydroelectricite ; NAIM-GESBERT (E.) - La loi de 1919 sur l'énergie hydraulique / retour et reprises, RJE, 3/2019, p. 475-477 ; DELAUNAY (B.), Ibid., p. 195-197. (6) V. annexe 2. (7) V. annexe 5 ; Portefeuille de l'APE - clôture du 15 juin 2021, disponible sur https://www.economie.gouv.fr/agence-participations-etat/Les-participations-publiques. (8) SAGUAN (M.), SAUTEL (O.) - L'ouverture à la concurrence du secteur électrique / rôle et gains du client, Flux, vol. 84, n° 2, 2011, p. 8-20. (9) CR n° 89, Ibid. ; https://fr.statista.com/statistiques/565916/employes-secteur-de-electrcite-hydraulique-france/. (10) CR n° 89, Ibid. ; DEBREGEAS (A.), PLIHON (D.) - L'impasse de la libéralisation du marché de l'électricité et du projet Hercule, févr. 2021, Les économistes atterrés, disponible sur http://atterres.org/article/l'impasse-de-la-libéralisation-du-marché-de-l'électricité-et-du-projet-hercule. (11) Sud Energie, Ouverture à la concurrence des concessions hydrauliques : surcoûts, risques et mise à mal de la transition énergétique, mai 2019, disponible sur https://www.sudenergie.org/site/wp-content/uploads/2019/05/2019-05-tract_Hydro_4Pages_definitif.pdf.; DELEPINE (J.) - Ibid., p. 54-57. (12) COLSON (J.-P.), IDOUX (P.) - Droit public économique, Paris, LGDJ, 9ème éd., 2018, p. 245.