Les buts ultimes de l'individu. Enjeux éthiques de la philosophie de Hegel.
Auteur / Autrice : | Gauthier Tumpich |
Direction : | Olivier Tinland |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Philosophie |
Date : | Inscription en doctorat le 01/09/2021 |
Etablissement(s) : | Université de Montpellier Paul-Valéry |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Langues, Littératures, Cultures, Civilisations (Montpellier ; 1991-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : CRISES - Centre de Recherches Interdisciplinaires en Sciences Humaines et Sociales |
Résumé
La présente étude vise à montrer que, dans la philosophie hégélienne de l'esprit, les questions relatives aux buts ultimes de la vie individuelle jouent un rôle structurant. Il s'agit, autrement dit, de souligner l'importance des questions éthiques chez Hegel, concernant notamment le bonheur, la mort, le ''souverain bien'', ou de manière générale les différentes façons pour un individu d'adopter une perspective globale sur son existence. La pensée éthique de Hegel est ici étudiée conjointement avec celle des auteurs qui ont été ses principales références, qu'il s'agisse d'auteurs anciens comme Platon, Aristote et les stoïciens, d'auteurs modernes comme Spinoza, Hume et Rousseau, ou d'auteurs contemporains de Hegel comme Kant notamment, mais aussi Goethe, Schiller, Jacobi, Fichte, Hölderlin, F. Schlegel, Schelling, et Schleiermacher. Une attention particulière est également accordée au débat concernant la ''destination de l'être humain'' (''die Bestimmung des Menschen''), ouvert par Johann Joachim Spalding à partir de 1748, et qui est central durant toute l'Aufklärung. L'une des caractéristiques les plus originales de la philosophie hégélienne, en la matière, est son refus de l'immortalité de l'âme, d'une vie future, ou plus largement de toutes les conceptions qui admettent la possibilité d'un ''au-delà'' : alors que les réflexions sur les buts ultimes étaient souvent associées à la perspective d'une vie après la mort, le système de Hegel implique que la mort de l'individu est radicale, et que les représentations concernant l'immortalité doivent être comprises comme des métaphores de la valeur infinie de la vie humaine présente. De même, ce système implique le rejet de ce que Hegel appelle le ''dualisme'' religieux, c'est-à-dire la conception suivant laquelle il existerait un être divin infini et transcendant, extérieur au monde. Dès lors, l'un des enjeux essentiels de la philosophie de Hegel est de montrer que sa perspective anti-dualiste ne nous condamne pas à l'idée selon laquelle tout serait vain, ou encore à ce que Jacobi appelle à partir de 1799 le ''nihilisme''. Le point de départ de la philosophie pratique de Hegel est un développement du concept de volonté : toute volonté individuelle est initialement partagée entre de multiples buts particuliers, qui sont incompatibles entre eux, de sorte qu'il est nécessaire de faire des choix ; cela implique un critère, un but unique permettant de mettre en place une hiérarchie des priorités, ce qui est le cas lorsque la volonté atteint le stade eudémoniste, c'est-à-dire lorsque son unique but ultime est le bonheur. Mais ce but se révèle contradictoire ; en effet, à ce stade, la volonté se donne des buts ''tout autant qu'elle ne s'en donne pas'' (§ 480 de l'Encyclopédie), elle ne s'engage dans aucune cause, aucun but n'est considéré par elle comme important par lui-même. Ce point de vue doit dès lors être dépassé par le point de vue de ce que Hegel appelle la ''volonté libre'' : c'est une volonté qui ne se consacre pas principalement à des buts choisis arbitrairement, mais au contraire à des buts dotés d'une certaine ''teneur'', d'un contenu rationnellement justifiable. Hegel étudie ces buts les uns après les autres dans sa philosophie de l'esprit (buts moraux, éthiques, politiques, artistiques, scientifiques, etc.). Le fait de se destiner plutôt à tels ou tels buts relève de l'individualité, et la ferme résolution pour un ensemble particulier de buts de ce genre constitue ce que Hegel appelle le ''caractère'' (Charakter) individuel. Le rôle éthique du système philosophique est dès lors notamment de montrer que ces buts ont une ''validité'' objective, qu'ils ne sont pas de simples inventions contingentes, contrairement à ce qu'affirme le point de vue de la vanité.