Vers une gestion circulaire de l'azote et du phosphore des excrétats humains : état des lieux, potentiel agricole mondial, et contraintes spatiales en France.
Auteur / Autrice : | Thomas Starck |
Direction : | Bruno Tassin |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Sciences et Techniques de l'Environnement |
Date : | Inscription en doctorat le 01/09/2021 |
Etablissement(s) : | Marne-la-vallée, ENPC |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sciences, Ingénierie et Environnement (Champs-sur-Marne, Seine-et-Marne ; 2010-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : LEESU - Laboratoire Eau Environnement et Systèmes Urbain |
Mots clés
Résumé
Les nutriments dans les excrétions humains pourraient être utilisés comme fertilisants, mais sont généralement considérés comme une pollution. Dans cette thèse, j'évalue le devenir actuel de l'azote (N) et du phosphore (P) dans les excrétions humains et leur contribution potentielle à la fertilisation, à l'échelle mondiale et en particulier en France. Je décris d'abord le système d'assainissement français, à partir des données 20 000 stations d'épuration des eaux usées (STEU). Environ 10 % du N contenu dans les excrétions est réutilisé en agriculture, via les boues d'épuration ; 50 % est perdu sous forme de N2 atmosphérique, après dénitrification ; les 40 % restants sont perdus sous forme de N réactif dans l'environnement. L'indicateur actuellement suivi, le rendement épuratoire (70 % pour le N en France), est aveugle à la plupart de ces pertes, car il ne suit que la part de N qui n'est pas rejetée dans les eaux. Pour le P, j'estime que le taux de réutilisation est d'environ 50 %. La principale différence avec N est que le P est éliminé par précipitation des boues, permettant un meilleur recyclage si le rendement épuratoire est élevée (80% en France) et les boues d'épuration épandues (75% en France) ; mais des pertes se produisent aussi en dehors des STEU, dans les égouts et en assainissement non collectif. Je montre aussi l'influence de la législation européenne sur le rendement, notamment pour les grandes STEU situées dans des zones classées sensibles à l'eutrophisation. Le faible taux actuel de réutilisation du N témoigne d'un potentiel agronomique non exploité, que j'évalue pour le système alimentaire actuel. Le N contenu dans les excrétions humains, exprimé en pourcentage des intrants de N aux terres arables, se situe généralement entre 5 % dans les pays exportateurs à forts intrants et 50 % dans les pays importateurs à faibles intrants, et la plupart des pays se situent entre 10 et 30 %. À l'échelle mondiale, le taux est de 15 à 20 % et correspond à l'efficacité d'utilisation du N du système alimentaire. Je donne également des estimations pour des systèmes alimentaires plus sobres et trouve des bornes supérieures plausibles de 30 %, voire 40 % avec des changements considérables et des régimes principalement végétariens. Dans la plupart des pays et à l'échelle mondiale, la quantité de N dans les excrétions des humains et des monogastriques est similaire. Le N des excrétions humains est également équivalent au N des effluents d'élevage épandus sur les terres arables. Le taux de récupération effectif des nutriments dépendra de facteurs socio-techniques, et je me concentre sur un facteur impactant sa logistique, en France. Avec des données spatiales à résolution fine de fertilisation et de population, j'évalue la distance entre excrétions et cultures, si toutes les excrétions humaines sont récupérées et épandues de manière optimisée. Avec la fertilisation N actuelle, la distance moyenne serait de 14 km, ce qui est assez similaire aux 17 km trouvés avec des pratiques de fertilisation à faible apport d'intrants. Dans les deux cas, 60 à 70 % du N contenu dans les excrétions pourraient être épandus à moins de 10 km ; 20 à 25 % pourrait être épandues entre 10 et 50 km, correspondant principalement à des villes de taille moyenne (0,1 à 1 million d'habitants). Enfin, 5 à 15 % des excrétions, surtout à Paris et sur la côte méditerranéenne, devraient aller au-delà de 50 km. Sur la base d'analyses de cycle de vie existantes, mes résultats suggèrent qu'en France, la concentration des nutriments des excrétions humains avant transport ne serait pas nécessaire d'un point de vue environnemental, mais plutôt pour des questions de commodité logistique ou de préférence des agriculteurs. Pour cnclure, la réutilisation des nutriments des excrétats peut contribuer à réduire la pollution et diminuer le besoin en nouveaux intrants dans les systèmes agricoles, ainsi qu'à construire des systèmes alimentation/excrémention moins gaspilleurs.