Etude paléosismologique multi-lacs au sud-est du Tibet : analyse de l'enregistrement sédimentaire de l'activité de la faille de Xianshuihe
Auteur / Autrice : | François Lemot |
Direction : | Anne Replumaz, Bruno Wilhelm |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sciences de la terre et de l'univers, et de l'environnement |
Date : | Soutenance le 16/12/2024 |
Etablissement(s) : | Université Grenoble Alpes |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sciences de la terre, de l’environnement et des planètes (Grenoble, Isère, France ; 1992-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Institut des sciences de la Terre (Grenoble, Isère, France ; 2011-....) |
Jury : | Président / Présidente : Julia de Bernardy de Sigoyer |
Examinateurs / Examinatrices : Katrina Kremer, Jean-François Ritz | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Olivier Bellier, Jamie Howarth |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Mots clés libres
Résumé
Situé au sud-est du plateau tibétain, le système de faille de Xianshuihe est l'un des plus actifs de Chine, avec un taux de glissement d'environ un centimètre par an et plus de 14 séismes de magnitude supérieure à 7 enregistrés depuis le XVIIIe siècle. Le séisme le plus récent est celui de Luding (Ms 6.8) en 2022, et pratiquement toute la longueur de la faille a rompu au moins une fois au cours des trois derniers siècles. Parallèlement, le développement économique rapide de cette zone, avec la croissance urbaine dans des vallées encaissées et la construction d'infrastructures stratégiques telles que la ligne de chemin de fer Chengdu-Lhassa, augmente l’exposition des populations et des infrastructures au risque sismique.Pour évaluer ce risque et comprendre les processus tectoniques, il est essentiel de disposer d'archives paléosismologiques à long terme. L’étude des sédiments lacustres, méthode qui n’avait jamais été appliquée dans cette région, permet d’obtenir un enregistrement continu à haute résolution des paléo-séismes. Durant cette thèse, j'ai prospecté et étudié 11 lacs de montagne répartis sur 350 km, en utilisant une approche multiméthode pour identifier et dater les dépôts issus de la remobilisation des sédiments causés par les séismes. Les analyses incluent la granulométrie, la tomographie aux rayons X (CT-scan), la géochimie XRF, l'analyse minéralogique (DRX et MEB), ainsi que l'étude de la matière organique et des mesures hyperspectrales. Plusieurs méthodes de datation ont été utilisées : radioéléments de courte période, datation par radiocarbone et corrélations paléomagnétiques.Cette étude a permis d'identifier les lacs les plus prometteurs. Pour obtenir des reconstructions quantitatives de l’activité sismique, j’ai étudié les facteurs qui contrôlent l’enregistrement des séismes, tels que la morphologie des lacs, la nature et le taux d’accumulation des sédiments, fortement influencés par les changements dans le bassin versant. Le premier article de cette thèse explore les variations climatiques et leur impact sur le flux de sédiments. Dans le lac proglaciaire de Yunzhu, nous avons démontré que le flux de sédiments détritique, contrôlé par l’extension des glaciers, est principalement influencé par les variations de température au cours des 2000 dernières années.Le deuxième article propose une méthode pour déterminer les scénarios de rupture sismique en combinant les enregistrements de plusieurs lacs. J’ai utilisé trois sites où j’ai calibré le seuil d’intensité sismique requis pour enregistrer les séismes, à l’aide des archives historiques. Le code que j’ai développé permet de retrouver les zones de ruptures et la gamme de magnitude les plus probables en fonction, même avec un nombre limité d'observations, formant ainsi un paléosismomètre quantitatif.Le troisième article présente l’enregistrement du lac Yalatuo sur plus de 6000 ans. Nous avons identifié 64 dépôts de séismes, avec une sensibilité variable au fil du temps : avant 3400 ans, les taux de sédimentation étaient faibles, limitant l'enregistrement des événements sismiques. Des changements climatiques et anthropiques ultérieurs ont augmenté le flux de sédiments, permettant d’enregistrer davantage de séismes. Depuis 1000 ans, un taux de sédimentation stable a permis d'enregistrer des séismes d'intensité supérieure à VI, avec une récurrence de 35 ans mais une forte irrégularité. Des dépôts plus épais, associés à des intensités plus fortes, se produisent avec une quasi-périodicité d'environ 330 ans.Ces travaux posent un cadre pour de futures études dans la région. Ils permettent de mieux comprendre ce qui contrôle l’enregistrement des séismes entre les différents sites et à travers le temps. Ils mettent en évidence l’intérêt de l’approche multi-lacs pour reconstituer l’activité de la faille et l’interaction entre les différents segments. Ces résultats apportent de nouvelles contraintes sur le comportement à long terme de la faille, encore mal connu.