L'évolution précoce et tardive de notre Galaxie à travers la lentille des amas globulaires
Auteur / Autrice : | Giulia Pagnini |
Direction : | Paola Di matteo |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Astronomie et Astrophysique |
Date : | Inscription en doctorat le 01/10/2021 Soutenance le 25/09/2024 |
Etablissement(s) : | Université Paris sciences et lettres |
Ecole(s) doctorale(s) : | Astronomie et Astrophysique d'Ile de France |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : GEPI- Galaxies, Etoiles, Physique, Instrumentation |
établissement opérateur d'inscription : Observatoire de Paris |
Mots clés
Résumé
Notre galaxie, la Voie lactée, est un ensemble de centaines de milliards d'étoiles, de gaz et de poussières liés par la gravité. La plupart de ces éléments visibles sont répartis dans un disque qui s'étend sur des distances d'au moins 20 kiloparsecs à partir du centre galactique. Le disque est entouré d'un halo stellaire diffus, de forme aplatie, qui ne contient que quelques pourcents de la masse stellaire totale de la Galaxie. Un bulbe stellaire en forme de cacahuète se trouve au centre de la galaxie et domine la masse et la distribution de la lumière dans le kiloparsec intérieur. Toutes ces composantes sont constituées d'étoiles qui ont des propriétés différentes, en termes d'âge, d'abondance chimique et de cinématique, suggérant ainsi différents scénarios pour leur formation. Reconstruire comment toutes ces composantes stellaires se sont formées et assemblées au fil du temps, en étudiant les propriétés des étoiles qui les composent, est le but de l'archéologie galactique. Au cours de ces dernières années, ce domaine de recherche a connu une succession de nouvelles découvertes fascinantes, grâce au lancement de la mission astrométrique Gaia de l'ESA, en 2013, et à la livraison de ses catalogues (https://sci.esa.int/web/gaia). Cette mission ne fournit pas seulement une connaissance sans précédent de notre Galaxie, en termes de positions et de mouvements de ses étoiles, mais elle stimule également le développement de nombreux relevés spectroscopiques (le relevé APOGEE en cours avec le SDSS, et les relevés WEAVE@WHT et MOONS@VLT, bientôt opérationnels, pour n'en citer que quelques-uns) qui sont destinés à compléter Gaia en fournissant des abondances chimiques et des vitesses radiales pour plusieurs millions d'étoiles, chacune. Des résultats vraiment spectaculaires sont déjà en train d'apparaître : des restes fossiles de la formation du disque galactique encodés dans les étoiles ultra-pauvres en métaux ([1,2,3]) aux traces des événements d'accrétion les plus massifs vécus par notre Galaxie ([4,5,6]) ; de la caractérisation complète de la structure et du mouvement 3D des étoiles dans la barre et le bulbe ([7, 8]), et de la structure en spirale ([9]) aux empreintes chemo-cinématiques que ces composants asymétriques laissent dans le disque de la Voie lactée depuis des milliards d'années ([10, 11, 12]). Nous sommes, pour la première fois, en mesure de fouiller dans les couches du passé lointain et récent de notre Galaxie, mettant en lumière la chronologie des événements qui ont contribué à faire de la Voie lactée la galaxie que nous observons aujourd'hui. Ayant survécu pendant des milliards d'années à tous ces événements et changements, les amas globulaires (ci-après AG) observés aujourd'hui dans la Galaxie témoignent de tout ce passé. Ce sont de très vieux systèmes stellaires à symétrie sphérique - certains aussi vieux que la Galaxie elle-même - composés de centaines de milliers d'étoiles, liées entre elles par leur gravité mutuelle. On en connaît environ 150 dans la Galaxie ([13]), répartis aujourd'hui principalement dans le halo, mais aussi dans le disque et le bulbe, et considérés comme les restes d'une population initiale beaucoup plus nombreuse. Les AG ne se sont pas nécessairement tous formés dans la Galaxie elle-même. Une fraction d'entre eux peut en effet s'être formée dans des galaxies satellites accrétées par la Voie lactée au fil du temps, et pourrait donc constituer la contrepartie des événements d'accrétion découverts par l'analyse des propriétés des étoiles de champ. Ces dernières années, plusieurs tentatives ont été faites pour contraindre la nature des amas (accrétés ou in-situ, c-a-d formés dans la Voie lactée elle-même), et pour reconstruire à partir de leur nature les propriétés (masse, nombre) des événements d'accrétion vécus par la Voie lactée au cours du temps ([14], [15], [16], [17]). Cependant, dans tous les espaces analysés jusqu'à présent (principalement les espaces cinématiques et d'abondance chimique), on peut s'attendre à un chevauchement important entre les populations accrétées et in situ, comme on l'a constaté pour les étoiles de champ ([18], [19], [20]), ce qui conduit à des solutions dégénérées, et peut-être à une reconstruction incorrecte de l'histoire de l'accrétion de notre Galaxie. Avec ce projet, nous voulons faire un pas en avant dans la reconstruction des premières phases de l'assemblage de la masse dans notre Galaxie par l'étude de la population des AG galactiques, en couplant leurs positions dans la Galaxie, leurs propriétés cinématiques et d'abondance chimique à leurs paramètres internes (tailles caractéristiques et masses stellaires). Pour ce faire : 1) nous analyserons un ensemble de simulations N-corps à haute résolution, sans gaz ni formation stellaire, déjà disponibles dans notre groupe ([18]), et 2) nous effectuerons de nouvelles simulations où nous couplerons l'évolution dynamique des amas accrétés et in situ dans des galaxies de type Voie lactée à leur évolution interne ([21], [22]). Comme les paramètres des AG tels que leurs rayons caractéristiques et leurs masses stellaires totales résultent de l'équilibre entre les processus internes (dus à l'amas lui-même) et externes (dus au champ de marée galactique), ils doivent contenir des informations fondamentales sur l'environnement dans lequel ces amas ont évolué. Nous apprendrons donc, grâce à des simulations, comment coupler les propriétés à grande échelle des AG (leurs positions et mouvements dans la Galaxie) à leurs propriétés à petite échelle (rayons caractéristiques et masses stellaires) pour contraindre la nature accrétée ou in situ du système d'AG de notre Galaxie. Une fois la phase intense d'accrétion terminée, une galaxie à disque comme la Voie lactée entre dans l'ère dite de 'l'évolution séculaire' ([23]). Cette deuxième grande époque d'évolution commence avec la formation de la barre stellaire, qui, dans une galaxie comme la Voie lactée, a probablement eu lieu il y a environ 9 milliards d'années ([24], [25], [26]). L'émergence de la barre est fondamentale pour remodeler la Galaxie dans ses régions internes, en stimulant la formation du bulbe en forme de cachaouète. Nous étudierons la dynamique des AG à travers l'ère de l'évolution séculaire, un champ de recherche encore inexploré, principalement parce que la majorité de la population des amas se trouve actuellement dans le halo, où les effets de la barre sont négligeables. Cependant, il y a une fraction significative d'amas (au moins un tiers du total) qui est actuellement dans les 10 kpc intérieurs de la Voie lactée, et qui est en effet généralement associée aux populations d'étoiles de disque et de bulbe de la Galaxie ([27], [28]). Ces amas peuvent être les restes d'une population beaucoup plus nombreuse, qui a été détruite au fil du temps en raison de l'intense champ de marée présent dans les régions galactiques internes. Le fait qu'au moins une fraction de ces AG internes puisse être associée à la barre galactique a été discuté dans certains travaux ([29]). Depuis, peu de progrès ont été réalisés dans la description et la caractérisation de la population interne des amas, en raison des difficultés pour dériver leurs mouvements dans l'espace, et les abondances chimiques, en particulier pour les amas des régions les plus internes et les plus denses (à l'intérieur de 4-5 kpc). Cependant, cette situation est en train d'évoluer rapidement, grâce aux positions des AG et aux mouvements propres fournis par Gaia ([30]), et aux catalogues de vitesses radiales disponibles pour la plupart des amas ([31]). En particulier, l'arrivée de MOONS@VLT dans le ciel (prévue pour 2024) va révolutionner ce domaine, car MOONS devrait fournir des abondances chimiques et des vitesses radiales pour des dizaines, voire des centaines d'étoiles dans tous les amas des régions internes de la Voie lactée ([32]). Pour interpréter l'ensemble des données déjà disponibles pour les AG dans les régions internes de la Galaxie et pour préparer l'exploitation scientifique des observations en temps garanti (GTO) de MOONS, nous proposons d'analyser un ensemble de simulations à haute résolution et à N-corps disponibles dans notre groupe, qui modélisent une large gamme de phénomènes que les AG dans les régions internes de la Voie lactée peuvent subir : du piégeage de leurs orbites dans la barre et bulbe à cacahuète, à une forte perte de masse ; des passages proches et des échanges de masse entre AG ([33]) aux fusions complètes de certains d'entre eux ([33], [34]). Nous utiliserons cet ensemble de simulations pour interpréter les données actuelles (principalement les données Gaia, complétées par les relevés spectroscopiques déjà disponibles) et également pour fournir des prévisions basées sur des modèles qui seront fondamentales pour construire le relevé des 'Inner Milky Way Globular Clusters' (dont le porteur de ce projet est responsable) prévu dans le cadre du 'The reddened Milky Way survey' (PI : O. Gonzalez, Edinburgh) de MOONS, et pour préparer son exploitation scientifique. Ce projet s'appuie sur des expertises complémentaires, à la frontière passionnante entre la dynamique galactique et l'étude des populations stellaires galactiques, d'une part, et la dynamique et l'évolution des AG, d'autre part. Le porteur du projet possède une longue expérience dans ces domaines. L'équipe de collaborateurs impliqués dans ce projet garantira à l'étudiant l'acquisition d'un large et solide éventail de connaissances (voir fichier joint).