Thèse en cours

Faire la pluie et le beau temps : quand les méta-organisations chapeautent des systèmes d'information inter-organisationnels

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Auteur / Autrice : Louis Cousin
Direction : Muge OzmanLuc Audebrand
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Sciences de gestion
Date : Inscription en doctorat le 30/09/2020
Etablissement(s) : université Paris-Saclay en cotutelle avec Université Laval
Ecole(s) doctorale(s) : Droit, Economie, Management
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : LITEM - Laboratoire en Innovation, Technologies, Economie et Management
Référent : Université d'Évry Val d'Essonne

Résumé

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Les firmes suivent une tendance de réduire leur cœur et étendre leur périphérie, tendance qui se manifeste à deux égards. D'une part, une croissance des collaborations et une augmentation de la spécialisation des firmes, qui remonte aux années 1980. D'autre part, l'émergence d'Internet et des technologies qui y sont liées, qui ont favorisé la capacité des firmes à intégrer des connaissances produites à l'extérieur de leurs frontières. Ces éléments ont conduit à l'émergence de réseaux et de communautés de firmes, collaborant en l'absence de lien hiérarchique formel (Gulati et al., 2012). Dans certains cas, ces processus de collaboration et d'innovation peuvent être incorporés au sein de méta-organisations (Berkowitz, 2018). Les méta-organisations sont des associations, dont les membres ne sont pas des individus mais des organisations (Ahrne & Brunsson, 2005). L'Organisation des Nations unies (ONU), la Fédération internationale de Football (FIFA) et Business Europe sont trois exemples parmi les milliers de méta-organisations actives dans le monde. La forme méta-organisationnelle est aussi commune au mouvement coopératif : l'Alliance coopérative internationale (ACI), établie en 1895, unifie ainsi les voix de 310 organisations et fédérations coopératives de 109 pays (Le réseau coopératif mondial | ICA, s. d.). À travers leurs fonctions culturelles, les méta-organisations transforment un environnement chaotique en un espace discursif ordonné autour d'un paradigme et d'une identité commune à leurs membres (König et al., 2012; Spillman, 2018). Ce cadre discursif protecteur offre aux organisations membres une plateforme de coordination et d'apprentissage où les pressions de l'environnement sont collectivement maîtrisées (Harter & Krone, 2001). Néanmoins, dans le cas de changements non-paradigmatiques requérant des changements d'ordre identitaire et structurel, les actions des méta-organisations peuvent dépasser le champ culturel pour s'étendre au champ économique. Par exemple, certaines coopératives peuvent mutualiser une partie de leurs ressources et outils au sein de la méta-organisation, dans une logique de gain d'efficience et de compétitivité (Audebrand & Barros, 2018). Cette combinaison d'actions d'ordre culturel et économique se vérifie dans le contexte de la transition numérique. Les méta-organisations coopératives, qu'elles soient préétablies ou nouvellement constituées, adossent leurs actions discursives à des projets d'innovation numérique. Elles investissent dans des technologies et outils destinés à renforcer l'identité commune (par exemple : à travers le nom de domaine .coop ), établir des espaces de collaboration et d'innovation (par exemple : la plateforme Patio ), ou encore permettre la mutualisation de ressources entre leurs membres (par exemple : le projet de base de connaissances coopérative ). Ainsi, l'espace méta-organisationnel tend à se doter d'artefacts numériques incorporant l'identité du mouvement coopératif. Néanmoins, malgré l'enthousiasme des praticiens quant à l'émergence d'un écosystème numérique coopératif, sa réalisation reste hypothétique et cantonnée à quelques exemples de niche, peu stabilisés. Au regard de la littérature sur le changement organisationnel, la transformation numérique des espaces méta-organisationnels pose les questions suivantes : dans quelle mesure l'identité d'un champ est-elle affectée par l'usage d'artéfacts numériques communs aux organisations qui composent ce champ ? Comment les méta-organisations participent-elles à faciliter ou prévenir ces changements identitaires de leur champ ? Pour étudier ce phénomène, nous aurons recours à deux cadres théoriques. D'une part, la gestion des paradoxes méta-organisationnels : le cadre conceptuel de Harter et Krone (2001) permet en effet les stratégies mises en œuvre par les méta-organisations pour stimuler le changement parmi leurs membres, tout en préservant l'identité du champ. D'autre part, la théorie de l'acteur-réseau et le concept du récit ordonnateur. Selon Doolin (2003), les récits ordonnateurs organisationnels consistent en des réalisations discursives stratégiques, qui cherchent à dépasser leur instabilité en s'incorporant au sein d'artefacts. Le récit ordonnateur permet de suivre l'évolution des discours et technologies, leur confrontation avec d'autres récits concurrents, ainsi que les dynamiques conduisant à leur émergence, leur développement, leur transformation et leur disparition.