Thèse soutenue

Les valences fonctionnelles et dysfonctionnelles de la violence en milieu hospitalier : cas d'un bloc opératoire en Centre Hospitalier Universitaire

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Auteur / Autrice : Isabelle Teboul
Direction : Katia Kostulski
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Psychologie et Ergonomie. Psychologie
Date : Soutenance le 05/10/2023
Etablissement(s) : Paris, HESAM
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Abbé Grégoire (Paris)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de recherche sur le travail et le développement (2007-... ; Paris) - Psychologie du Travail et clinique de l'activité - Centre de recherche sur le travail et le développement
établissement de préparation de la thèse : Conservatoire national des arts et métiers (France ; 1794-....)
Jury : Président / Présidente : Isabelle Olry-Louis
Examinateurs / Examinatrices : Emmanuelle Zolesio, Éric Hamraoui, Brigitte Almudever
Rapporteurs / Rapporteuses : Isabelle Olry-Louis, Philippe Sarnin

Résumé

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Cette thèse porte sur les valences fonctionnelles et dysfonctionnelles de la violence au sein d’un bloc opératoire en Centre Hospitalier Universitaire de même que sur la fonction psychologique de cette violence, entendue dans son histoire et sa réalité actuelle. Ce travail a été élaboré dans le champ de la psychologie du travail et plus particulièrement dans le courant théorique et d’intervention de la clinique de l’activité (Clot 1995 ; 1999 ; 2008). Cette thèse a été réalisée à la suite d’une intervention-recherche de deux ans, conduite dans un bloc opératoire d’un hôpital parisien, à la suite d’une commande sur « les coopérations interprofessionnelles au sein du bloc opératoire », mises en difficultés. Nous soutenons la thèse selon laquelle la violence verbale et comportementale, identifiée d’après Moïse, Meunier et Romain (2015), produite et utilisée par les chirurgiens dans le cadre de leur activité opératoire, aurait une fonction soutenante de leur activité et qu’elle leur permettrait d’assurer leurs fonctions sur les multiples champs qui sont les leurs (activité opératoire, activité d’enseignement aux internes, activités à l’extérieur de la salle) ainsi que de réguler les variations de leurs états émotionnels durant le déroulé des interventions opératoires générés par les multiples domaines que nous avons mentionné et d’autres relatifs au niveau organisationnel du travail. Par ailleurs, nous soutenons l’idée que l’usage de ces violences leur permet d’obtenir un niveau d’efficacité de travail élevé de la part des personnes de la salle assurant d’autres métiers (infirmière de bloc aux postes d’instrumentiste et de circulante, infirmier anesthésiste). Cependant, l’usage de ce mode opératoire dégrade les relations sociales de travail entre les métiers et contribue à abîmer les relations professionnelles entre les chirurgiens et les autres métiers de même que la perception des coopérations professionnelles qui conduisent à créer et à maintenir un milieu de travail dégradé. La thèse s’appuie sur l’analyse du travail réel (Clot, 1995; 1999) des infirmières de bloc opératoire (IBO ou IBODE) avec lesquelles un imposant dispositif d’analyse de l’activité aura été conduit sur le terrain dans une perspective dialogique transformatrice des situation de travail (Kostulski, 2018; 2011), mais aussi sur l’analyse d’un cas unique : celle de la réalisation dialogique des échanges lors d’une intervention en chirurgie viscérale, filmée puis analysée aux plans des échanges verbaux réalisés et de la violence de ceux-ci (Zolesio, 2009 ; 2013). Elle repose sur une conceptualisation de l’activité professionnelle, entre prescription, activité réelle et empêchements de toutes sortes, liés aux conditions de réalisation du travail dans ce bloc opératoire, dont nous pensons qu’il n’est pas une exception dans le travail hospitalier et chirurgical aujourd’hui. La thèse conclue sur une possible valence fonctionnelle de la violence (une forme de violence utile ?) dans l’activité des chirurgiens, de même que sur les conséquences à vivre, au plan professionnel, cette violence par les autres personnels, en particulier les infirmiers et infirmières de bloc (IBO et IBODE). Cette situation vécue par les IBO et IBODE est largement bâtie sur les piliers historiques et culturels d’une « condition » telle que Le Guillant aura pu la développer au plan conceptuel (Le Guillant, 2010). Cette « condition » viendrait supplanter la perception objective d’un savoir-faire de métier et d’une considération professionnalisante du métier d’infirmière de bloc pour les enfermer dans un traitement qui tend à effacer les frontières de ce métier et de la façon dont il se réalise. Cette « condition » tend à légitimer, et à justifier, l’usage de la violence à l’égard de ce métier de même qu’à le faire errer dans les strates d’un usage questionnable en termes d’efficacité et de santé, épuisant les collectifs.