Thèse en cours

Étude de l’activation induite dans les accélérateurs utilisés pour les applications médicales et optimisation des opérations de leur démantèlement

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Auteur / Autrice : Irmina Peiro riera
Direction : Valentin Blideanu
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Radio et hadron-thérapies
Date : Inscription en doctorat le 02/11/2020
Etablissement(s) : université Paris-Saclay
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Particules, hadrons, énergie et noyau : instrumentation, imagerie, cosmos et simulation (Orsay, Essonne ; 2015-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire d'intégration des systèmes et des technologies (Gif-sur-Yvette, Essonne ; 2001-....)
Référent : Faculté des sciences d'Orsay

Résumé

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De nombreux accélérateurs de particules sont utilisés dans les hôpitaux et centres cliniques dans le monde à des fins médicales. En fin de vie, lors de leur démantèlement, certains composants de ces accélérateurs, de géométrie souvent complexe, sont radioactifs suite à leur activation par les faisceaux accélérés utilisés et par les particules secondaires générées par l’interaction de ces faisceaux avec les matériaux. La radiothérapie représente l’utilisation principale de ces installations, avec plus de 500 accélérateurs recensés en France et une augmentation de leur nombre d’environ 14 % sur ces 5 dernières années. Des accélérateurs sont également utilisés dans la production des radio-isotopes pour le diagnostic en médecine nucléaire, et bien que leur nombre soit largement inférieur à celui des accélérateurs de radiothérapie, les techniques d’accélération utilisées sont susceptibles de générer des quantités plus importantes de déchets radioactifs. Actuellement, le nombre de demandes adressées à l’ANDRA (Agence Nationale pour la gestion de Déchets Radioactifs) concernant la prise en charge de pièces activées issues du démantèlement des accélérateurs utilisés dans les applications médicales est croissant et ne cessera d’augmenter au fil des années compte tenu du parc actuel et de son évolution à la hausse. Le volume des composants, leur masse et les activités radiologiques présumées permettraient d’envisager un classement des déchets en TFA (Très Faiblement Actif) pour la plupart des pièces issues de ces démantèlements. Par ailleurs, certaines pièces susceptibles d’être activées peuvent présenter des niveaux d’activité suffisamment faibles pour être classifiées en déchet conventionnel, optimisant ainsi le flux vers l’exutoire final. Cependant, les mesures radiologiques pouvant être réalisées sur les composants lors des opérations de démantèlement afin de valider les filières d’évacuation sont limitées aux radio-isotopes émetteurs gamma ou bêtagamma qui ne représentent qu’une partie de l’inventaire radiologique. Les émetteurs bêta purs qui sont souvent les contributeurs majoritaires à l’activation induite ne sont pas mesurables lors de ces opérations. Il est donc très important de disposer d’une méthode fiable permettant de déterminer par calcul avec une bonne précision l’inventaire radiologique complet pour chacune des pièces activées. Le sujet de thèse proposé a comme objectif d’apporter une réponse adéquate à cette demande. Le Laboratoire National Henri Becquerel (LNHB) de la DRT est déjà en relation étroite avec l’ANDRA afin d’étudier la problématique notamment à travers un groupe de travail dédié. Ce groupe de travail présidé par l’ANDRA démontre le besoin fort des acteurs du démantèlement quant à l’identification des solutions appropriées pour gérer la problématique des déchets radioactifs issus du démantèlement des accélérateurs utilisés dans les applications médicales. Il réunit des experts dans cette thématique. A ce titre, le LNHB a été sollicité afin d'apporter son expertise dans les domaines des interactions rayonnement-matière, des mesures dosimétriques, des mesures spectrométriques et de radioactivité. Il s’agit d’une première dans la manière d’aborder cette problématique à travers la mise en place de méthodes précises s’inscrivant dans la spécificité des activités du LNHB, le laboratoire français en charge de la métrologie des rayonnements ionisants. L’approche est basée sur la modélisation détaillée des accélérateurs et des interactions rayonnement-matière par des codes de calcul et la mesure rigoureuse des spectres d’émission des radio-isotopes créés par l’activation. Les accélérateurs pour les traitements par radiothérapie utilisent dans leur grande majorité des électrons à des énergies pouvant atteindre une énergie de 20 MeV, soit pour traiter directement des tumeurs localisées à de faibles profondeurs (voire en surface) ou pour obtenir un faisceau de photons par rayonnement de freinage. Dans ce dernier cas qui correspond à la méthode de traitement la plus courante, ce sont les photons qui vont irradier la tumeur. La source d’activation identifiée pour ce type d’accélérateur est liée aux neutrons secondaires produits par les photons, sous certaines conditions, au travers de réactions nucléaires avec les noyaux des éléments des accélérateurs. La première difficulté que la thèse se propose de traiter concerne la connaissance précise de ces réactions, étape primordiale, car celles-ci définissent le terme source neutronique à l’origine de l’activation des accélérateurs. En effet, les réactions photo-nucléaires, assez peu étudiées, ont la particularité d’être “à seuil” (c’est à dire qu’elles ne peuvent être induites que par des photons d’énergie supérieure à une certaine valeur) et leur probabilité dépend fortement du noyau cible. Même si des modèles théoriques existent pour les décrire, la véracité de leur précision souffre de l’absence de jeux complets et précis de données expérimentales. Les codes de calcul utilisent les valeurs issues de ces modèles, ce qui peut potentiellement conduire à des erreurs importantes dans le calcul du taux de production des neutrons et in fine du niveau d’activation induite par ces derniers et de la composition du spectre radiologique associé. Pour y remédier, une étape du travail de thèse consistera en la réalisation de nouvelles mesures de production des neutrons et de leur distribution en énergie par des réactions photo-nucléaires pour des éléments représentatifs des matériaux présents dans les accélérateurs médicaux. Les mesures seront réalisées en utilisant les accélérateurs d’électrons disponibles sur la plateforme DOSEO du LNHB et du Service Capteurs et Instrumentation (SCI) de la DRT, en collaboration avec les équipes de ce service et d’autres structures de la DRF disposant de moyens et de compétences dans la détection de neutrons comme le SPhN et les équipes du GANIL. Ces mesures permettront, par comparaison avec la production des neutrons modélisée par les codes de calcul, de vérifier les performances de ces derniers et de faire les ajustements nécessaires afin de garantir une bonne précision des calculs. Les calculs d’activation induite par les neutrons dans les composants des accélérateurs seront réalisés en utilisant des outils déterministes existants. Ces outils de calcul utilisent des bibliothèques de sections efficaces pour calculer la probabilité de création des radio-isotopes par les réactions neutron-noyau. Ces sections efficaces sont généralement bien connues, les réactions neutroniques ayant été largement étudiées. Cependant la précision des outils de calcul d’activation est affectée par la structure plus ou moins fine des groupes en énergie des neutrons retenus pour les bibliothèques de sections efficaces. Le nombre des groupes peut aller de 25 dans les approches les plus simplifiées à plus de 700, la précision du calcul augmentant avec le nombre de groupes utilisés notamment pour les réactions dont la probabilité présente des zones de résonances. Une étude de sensibilité sera réalisée pendant la thèse, consistant à irradier des échantillons de diverses matériaux dans les faisceaux des accélérateurs médicaux de la plateforme DOSEO. L’activation induite et les contributions de chaque radio-isotope seront calculées en utilisant les différentes options de calcul disponibles et mesurées par spectrométrie afin d’étudier l’influence sur les résultats des calculs de la précision liée au nombre des groupes en énergie utilisé. Les mesures spectrométriques seront réalisées en collaboration avec le SCI et le Laboratoire de Métrologie de l’Activité du LNHB. Le sujet proposé permettra la mise en place d’une méthodologie rigoureusement validée pour la détermination de l’inventaire radiologique des pièces activées des accélérateurs médicaux. Cette problématique n’a jamais été précisément traitée. En effet, les accélérateurs médicaux n’ayant pas une grande ancienneté, les aspects liés à leur démantèlement commencent juste à être abordés sous l’impulsion des principaux acteurs: exploitants, entités en charge de la gestion des déchets, sociétés en charge des chantiers. La connaissance précise de l’activation induite permettra une meilleure gestion des déchets issus du démantèlement des accélérateurs médicaux, en définissant les bonnes filières et en optimisant les flux vers les différents entreposages ou réutilisations. Au-delà du besoin exprimé par la communauté française, ces travaux s’inscrivent dans un contexte plus large de niveau international. Le parc des accélérateurs médicaux dans le monde suit la même tendance croissante qu’en France et les chantiers de démantèlement vont se multiplier les prochaines années. Grace à ces travaux précurseurs dans le domaine, le CEA pourra se positionner en proposant à la communauté internationale une méthodologie précise et fiable.