Thèse en cours

Impact de l'intégration de la responsabilité sociale de l'entreprise (RSE) sur la création de valeur

FR  |  
EN
Auteur / Autrice : Stephanie Leprieur
Direction : Patricia Brillet-coutelle
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Sciences de Gestion
Date : Inscription en doctorat le 02/12/2020
Etablissement(s) : Tours
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences de la Société : Territoires, Économie et Droit (Centre-Val de Loire ; 2018-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Val de Loire Recherche en Management (2012-....)

Résumé

FR  |  
EN

La création de valeur est un objectif prioritaire des entreprises. Selon Milton Friedman (article publié en 1970 dans le New-York Times) “la seule raison d'être d'une entreprise est de générer des profits pour ses actionnaires.” La création de valeur est donc une opportunité pour inventer de nouveaux business models, adapter son organisation et enrichir l'offre de produits et services des entreprises et donc des marques en intégrant dans la chaîne de valeurs l'ensemble des parties-prenantes : clients, collaborateurs, influenceurs, syndicats, partenaires, fournisseurs, financeurs, distributeurs, collectivités territoriales, … Le concept de valeur a fait l'objet de beaucoup de travaux dans différents domaines (économie, finance, comptabilité, audit, marketing). Il représente un concept central dans de nombreux modèles mais il reste encore peu opérationnalisé (Rivière et Mencarelli, 2020). Cette recherche a pour objectif de déterminer, d'évaluer et d'opérationnaliser les différents attributs constitutifs de la responsabilité sociale de l'entreprise et de démontrer comment ces éléments peuvent contribuer à la création de valeur d'un point de vue financier. Elle se situe à l'interface d'un courant de recherche qui cherche à relier le dilemme marketing finance. Plus précisément, les consommateurs doivent désormais concilier le désir de consommer plus responsable avec leur envie de conserver confort matériel et plaisirs, tout cela dans un contexte de pouvoir d'achats sous tension. Aujourd'hui, 86% des Français veulent consommer de manière plus responsable et toutes les dimensions comptent (protection des ressources de la planète (86%) et des petits producteurs (72%), bien-être animal (85%), anti-gaspillage (86%), le local (78%) et l'équitable (33%)). 71% des Français veulent vivre en accord avec des valeurs plus fortes (+7 points versus 1992) et 56% souhaitent que les entreprises et les marques prennent position sur les enjeux sociétaux. (Source : Enquête Kantar Wordpanel 2019 ). Au-delà des attentes des consommateurs, les crises financières, ou la crise sanitaire actuelle et ses conséquences économiques ainsi que les contraintes imposées par l'environnement naturel (raréfaction des ressources primaires, déclin de la biodiversité, …), l'environnement social et sociétal (droits humains fondamentaux, recherche de sens des collaborateurs, santé et sécurité au travail, …) et l'environnement économique poussent les entreprises à agir. Les initiatives se multiplient de la part des industriels et des distributeurs. Si certains d'entre eux pouvaient encore résister, pour des raisons de profit à court terme ou d'incapacité à transformer leur organisation et leur modèle par exemple, aucun ne peut ignorer, a minima, la réglementation qui s'intensifie sur le sujet : la loi « NRE » relative aux nouvelles régulations économiques de 2001, a, la première, imposé aux sociétés cotées en Bourse de publier dans leur rapport de gestion des informations relatives à la façon dont elles prenaient en compte les conséquences sociales et environnementales de leur activité. La loi « Grenelle 2 » portant sur l'engagement national pour l'environnement, en 2010, a permis de décliner de manière concrète les orientations de la loi « Grenelle 1 » de 2009, loi de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement qui place la lutte contre le changement climatique « au 1er rang des priorités ». Cette loi défini 6 grands chantiers : bâtiment et urbanisme, transport, énergie et climat, préservation de la biodiversité, protection sanitaire et gestion des déchets, définition d'une « nouvelle gouvernance écologique ». Elle a donc ajouté un pilier sociétal à ce reporting et a élargi la catégorie des sociétés y étant soumises. Le terme de « démocratie écologique » est employé. Il s'agit principalement de développer le droit à l'information environnementale en amenant les acteurs publics et les entreprises à rendre accessible la manière dont ils prennent en compte les impératifs de développement durable dans leur stratégie. Par exemple, la norme ISO 26000, sans donner lieu directement à une certification, permet quant à elle aux entreprises ayant décidé d'engager une démarche volontaire de s'appuyer sur un standard international développé par des experts de plus de 80 pays et 40 organisations internationales. Elle aborde les thèmes de la gouvernance de l'organisation, des droits de l'Homme, des relations et conditions de travail, de l'environnement, de la loyauté des pratiques, des questions relatives au consommateur, de l'engagement social et de la contribution au développement local. Par ailleurs, la réputation et l'image d'une entreprise aujourd'hui ne pourrait souffrir d'un scandale lié à une attaque sur les conditions de travail de ses collaborateurs, son type de management, ses pratiques environnementales, la rémunération de ses partenaires, …. Et même plus simplement, il existe aussi un risque pour l'entreprise de ne pas être identifiée comme responsable. Cela amène à réfléchir à une problématique générale concernant l'impact de l'intégration de la RSE sur la création de valeur, permettant de concilier performance sociétale et performance économique, en tenant compte de la démarche globale auprès de l'ensemble des parties-prenantes. Une marque crée de la valeur pour l'entreprise en suscitant une préférence durable auprès de ses différents publics (collaborateurs, clients, fournisseurs), en s'appuyant sur sa pertinence (être utile à son écosystème) et sa différence (ressource unique et difficilement imitable), (Géraldine Michel, 2017). Depuis les travaux de Farquhar (1989) et Aaker (1991), les études consacrées aux déterminants de la valorisation des marques ont donné lieu à une littérature importante. Cette valeur est concrétisée par le concept de capital – marque dont il existe plusieurs définitions (Aaker, 1991 ; Keller, 1993 ; Changeur et Dano, 1998) ; la plus répandue est celle de Aaker : « tous les éléments d'actif et de passif liés à une marque, à son nom ou à ses symboles et qui apportent quelque chose à l'entreprise et à ses clients parce qu'ils donnent une plus-value ou une moins-value aux produits et aux services ». La marque apporte une valeur ajoutée qui repose alors sur 5 éléments : notoriété, qualité perçue, image de marque, fidélité et tout autre actif lié à la marque. Sattler, Högl, Hupp (2003) précise dans un article consacré à l'évaluation de la valeur économique des marques qu'il « est essentiel d'arriver à estimer la valeur financière des marques de façon aussi exhaustive et claire que possible ». Plusieurs méthodes de calcul de la valeur de marque ont vu le jour. Dans une étude dédiée à la pertinence des méthodes d'évaluation financière des marques, Beldi, Chastenet, Dupuis et Talfi (2010) décrivent particulièrement les méthodes mises en œuvre par deux organismes spécialisés Interbrand et Brand Finance. Ils s'interrogent sur la pertinence des valeurs de marque affichées par ces organismes. En conclusion, les résultats de cette recherche montrent « la pertinence des valeurs de marques telles qu'elles peuvent être estimées par ces organismes indépendants » et permet aux auteurs de conclure que ces valeurs apportent un contenu informationnel supplémentaire pour les investisseurs. Le pilotage de la marque est devenu une activité multidimensionnelle et complexe pour les entreprises aujourd'hui qui s'appuient la plupart du temps sur 2 types d'indicateurs : des indicateurs de situation (Notoriété, familiarité, préférence, attractivité, valeur, confiance, qualité, e-reputation) et des indicateurs de causalité (expérience de marque). La RSE est partie-prenante de l'image d'une entreprise. Pérez et del Bosque (2013) définissent l'image RSE comme les perceptions des consommateurs des activités de RSE menées par une entreprise. Différents travaux ont conceptualisé la RSE perçue comme un construit multidimensionnel (Rowley et Berman, 2000 ; Swaen et Chumpitaz, 2008 ; Acquier et Aggeri, 2008). Parmi les mesures correspondantes, celle de Sen et Bhattacharya (2001), adaptée de Maignan et al (1999), est utilisée dans le cadre de la perception des initiatives socialement responsables de l'entreprise envers ses parties prenantes. Elle englobe quatre dimensions : la responsabilité philanthropique, le respect de l'environnement, le respect des travailleurs et le respect des consommateurs. Carriga et Melé (2004) ont également démontré que la RSE perçue par les consommateurs influence la réputation des entreprises et la confiance qu'elles inspirent. Il semble donc qu'il faille intégrer l'image RSE comme un déterminant de l'image de l'entreprise auprès de ses différents publics (collaborateurs, clients, citoyens, partenaires) mais aussi l'image socialement responsable de la marque (Cornudet (2020)) et donc de sa valeur de marque, de sa valorisation financière. Notre problématique générale est donc : Comment mesurer l'impact de l'image RSE et de l'image socialement responsable de la marque dans la valeur de marque d'une entreprise ? et quels pourraient être alors les dimensions de la valeur proposée ? D'autres questions permettant de répondre à la problématique : Quels seraient les pratiques et les mécanismes d'opérationnalisation du marketing responsable dans l'intégration de la RSE sur la création de valeur proposée par l'entreprise ? Quel est l'impact de la RSM sur la perception de la marque socialement responsable par les autres parties prenantes (les salariés, les actionnaires, les fournisseurs, … ?). L'intérêt théorique de la recherche serait de proposer un modèle de création de valeur collective et sociétale qui puisse concilier les dimensions de la valeur issues d'un engagement responsable avec la performance de l'entreprise mesurée sur les plans financier et comptable. L'intérêt managérial permettrait aux entreprises de mieux cibler leur engagement responsable. Cette recherche implique la formalisation d'un cadre conceptuel autour de 3 concepts (le concept de valeur, la responsabilité sociale de l'entreprise (RSE) et la responsabilité sociale de la marque (RSM)). La méthodologie envisagée, dans le cadre d'une posture épistémologique de réalisme critique (post-positivisme), se fera en 2 parties. Dans une 1ère partie, un état de l'art nous permettra de comprendre le concept de valeur et ses dimensions afin d'éclairer le rôle de la valeur dans un contexte de marketing responsable. Nous mobiliserons le cadre théorique de la RSM (Responsabilité Sociétale de la Marque). Une phase d'analyse théorique avec un état des lieux de la littérature disponible nous permettra de proposer un modèle de création de valeur collective et sociétale. Un des livrables pourrait être un outil de mesure visant à montrer que l'engagement responsable de l'entreprise, en lien avec ses marques, et ses déclinaisons sous forme de produits / services responsables créent de la valeur mesurable au plan financier et comptable. Notre objectif est donc d'opérationnaliser la valeur perçue (y.c. sociale et environnementale) Une phase d'accès au réel sera mise en œuvre à travers une étude empirique qualitative par des entretiens semi-directifs auprès de professionnels multidisciplinaires : Marketing, marque, CDG, finances, innovation. Nous confronterons les résultats de l'étude qualitative avec la théorie (lien littérature / terrain) et ferons évoluer l'objet de recherche le cas échéant. Le terrain envisagé : - les Adhérents de l'ADETEM, association de professionnels notamment issus du marketing, ayant développé un collectif autour du marketing responsable. - Une ou plusieurs entreprises du secteur de la distribution En 2ème partie, nous travaillerons sur le terrain de recherche d'une entreprise, dans une démarche hypothético-déductive associée à une étude quantitative. Notre objectif sera de vérifier la validité du modèle et l'amender le cas échéant.