La responsabilité de l’État pour faits internationalement illicites en droit international de l’armement : essai d’identification d’une lex specialis
Auteur / Autrice : | Boblewendé Gildas Ouedraogo |
Direction : | Philippe Lagrange |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Droit public |
Date : | Inscription en doctorat le 14/10/2019 |
Etablissement(s) : | Poitiers |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Droit et Science Politique Pierre Couvrat (Poitiers ; 1993-....) |
Mots clés
Mots clés libres
Résumé
La fragmentation du droit international et la menace qu'elle porte sur l’unicité souhaitée du droit international demeurent un thème central des travaux des juristes internationalistes de ces dernières décennies. Or, la réflexion sur ces questions est restée longtemps cantonnée aux compartiments traditionnels du droit international, tels que le droit de la mer, le droit international des droits de l’homme, le droit international humanitaire. En raison de préjugés scientifiques qui font du droit international de l’armement un « droit politique », cette partie du droit international a été tenue à l’écart. La présente étude se veut une contribution au débat sur la fragmentation du droit international de la responsabilité de l’État sur une de ses "branches" spéciales : le droit international de l’armement. Le droit international de l’armement est défini, aux fins de l’étude, comme un compartiment du droit international ayant substantiellement un objet singulier, la régulation de l’armement. Il est cependant composé de deux blocs hétéroclites de règles. D’un côté, les règles de désarmement et de maîtrise des armements, de nature essentiellement conventionnelle et qui visent à préserver les équilibres géopolitiques et stratégiques dans le monde pour ainsi instaurer la paix et la sécurité internationales. Elles ont pour objet de limiter le droit souverain des États de développer, d’expérimenter, de posséder, de stocker, de transférer ou de déployer certains armements. D’un autre côté, les règles d’interdiction et de restriction de l’emploi de certaines armes dans les conflits armés, avec pour finalité d’humaniser les conflits armés. Ces règles, autrefois qualifiées de « Droit de La Haye », font partie intégrante du DIH. L’étude qui se situe strictement sur le terrain du droit secondaire a consisté à vérifier si la violation de ces règles obéissait à un régime particulier de responsabilité de l’État. Autrement dit, il s’est agi de voir s’il existait des règles conventionnelles ou coutumières spécifiques applicables à la responsabilité de l’État pour violation du droit de l’armement qui formeraient une lex specialis, voire un self-contained régime. L’analyse des accords qui peuplent le droit de l’armement, de la pratique des États et des organismes de contrôle, mais aussi de la jurisprudence rudimentaire a permis de constater que le droit de l’armement consacre des règles spécifiques éparses sur certains aspects du droit de la responsabilité, mais que ces règles ne forment pas un régime autonome de responsabilité. À titre d’exemple, l’identification du fait générateur de responsabilité en droit de l’armement nécessite, l’existence d’une violation d’une obligation et son attribution à un État, l’établissement d’un préjudice. Concernant la mise en œuvre de la responsabilité, elle est fortement institutionnalisée et donc centralisée, et ce, grâce à l’institution de plusieurs mécanismes de contrôle des accords. Quant au contenu de la responsabilité, le droit de l’armement admet les conséquences classiques du fait illicite tout en prévoyant des conséquences spécifiques. Bref, le régime de responsabilité de l’État en droit de l’armement est fait d’une mosaïque de lex specialis sans une cohérence globale. En tout état de cause, ces spécificités ne forment pas un régime autonome, clos sur lui-même, si tant est qu’un tel régime puisse exister. Le régime de responsabilité de l’État reste applicable aux aspects non régis par les règles spécifiques. En outre, les régimes spéciaux de responsabilité du DIH, du DIDH et du droit de l’environnement sont applicables à la plupart des violations du droit de l’armement. De même, les violations du droit de l’armement donnent souvent lieu à la mise en œuvre, par le Conseil de sécurité de l’ONU, du régime de sécurité collective. En définitive, le constat qui s’impose est que les spécificités de la responsabilité de l’État applicable au droit de l’armement ne réalisent pas une fragmentation du droit international.