le consentement en matière d'infractions sexuelles
Auteur / Autrice : | Amandine Angella |
Direction : | Stéphanie Fournier |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Droit Pénal |
Date : | Inscription en doctorat le 01/09/2020 |
Etablissement(s) : | Université Grenoble Alpes |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale sciences juridiques (Grenoble, Isère, France ; 2003-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Centre de recherches juridiques (Grenoble ; 1995-....) |
Mots clés
Mots clés libres
Résumé
LE CONSENTEMENT EN MATIERE D'INFRACTIONS SEXUELLES En France, les violences sexuelles se définissent par la caractérisation de la « surprise, violence, contrainte et menace » (article 222-22 du code pénal), des circonstances qui révèlent à la fois l'intention de l'auteur et l'absence de consentement de la victime (Traité de droit criminel, Merle et Vitu). Les violences sexuelles s'articulent, donc, autour de ces deux notions qui laissent apparaître un concept commun : le discernement. En effet, pour que l'auteur engage sa responsabilité, il est nécessaire qu'il fasse preuve d'une conscience suffisante de ses actes, autrement appelée libre arbitre ou discernement. Le discernement est, donc, un des fondements majeurs de la responsabilité pénale. Mais, « si l'intelligence et la liberté sont deux concepts essentiels à la responsabilité pénale de l'auteur » (J-A Roux, Cours de droit criminel T1), ils sont tout aussi essentiels à la caractérisation du consentement de la victime, dont l'absence est un élément constitutif de l'infraction sexuelle. Ainsi, alors que le droit pénal a pour habitude de s'intéresser au discernement de l'auteur, cette même exigence existe pour la victime. Celle-ci doit faire preuve de discernement, qui servira non pas à caractériser sa responsabilité, mais, à statuer sur son consentement. Le consentement et le discernement sont, à ce titre, deux concepts étroitement liés. L'intention de l'auteur passe par l'existence d'une conscience libre et éclairée qui témoignera de sa liberté d'action au moment du passage à l'acte et la victime doit elle-même, faire preuve d'un discernement suffisant lorsqu'elle donne son consentement, pour que celui-ci existe. Ainsi, dissocier les deux concepts se trouve être délicat. Aussi, quand ma première idée était d'étudier le discernement, mes recherches ont glissé, naturellement et de manière plus large, vers le consentement dont le discernement se trouve être un élément constitutif. L'absence de consentement est « le pivot de l'incrimination » des violences sexuelles (Mayer, Le nouvel éclairage donné au viol par la réforme du 23 décembre 1980) qui, aussi nombreuses et diverses soient-elles, ont ce point commun de nécessiter l'absence de consentement de la victime, contrairement à l'indifférence, théorique, du consentement en droit pénal. Ceci s'explique par le fait que les infractions sexuelles sont, en elles-mêmes, une atteinte au consentement de la victime. Le consentement de la personne visée exclurait donc la constitution de l'élément matériel de l'infraction. « Le consentement est le signe d'une rencontre » (Le consentement en matière pénale, Xavier Pin) et les infractions sexuelles mettent en jeu des mécanismes complexes qui rendent difficile sa caractérisation. L'emprise est un de ces mécanismes qui plongent la victime dans une situation de vulnérabilité, de dépendance qui rendent son consentement fragile. De nombreuses situations d'infractions sexuelles laissent planer une certaine ambiguïté sur un consentement qui, même s'il est donné formellement sans contrainte, menace, surprise ou violence au sens où la définition légale l'entend, ne semble pas toujours libre et éclairé. Les rapports sexuels seraient-ils, donc, une forme de nouveau contrat pour lequel il faudrait prendre soin de formaliser le consentement ? Ceci nous conduit à nous interroger, sur la constitution et la preuve du consentement en matière d'infractions sexuelles. Le consentement, qui, avant d'être une donnée juridique, peut s'analyser d'un point de vue psychologique, est parfois difficile à caractériser. Nombreuses sont les situations (viol entre époux, viol par surprise, inceste ) à la limite d'un consentement franc, qui laissent planer une interrogation : est ce que céder, sous la contrainte, sous la surprise c'est consentir ? La preuve du consentement doit-elle venir de la victime, doit-elle être donnée par l'auteur ? Le consentement, dans un domaine aussi sensible que les infractions sexuelles, qui touchent à l'intime, devrait-il être formalisé ? Mais avant cela, c'est la définition même du consentement, telle qu'elle est proposée indirectement par le code pénal, comme résultant de l'absence de contrainte, menace, surprise et violence, qui peut mériter une analyse et dont on peut se demander si elle ne devrait pas être renouvelée. La jurisprudence témoigne des difficultés liées à cette notion de consentement et des interrogations qu'elle engendre. On pense à certaines décisions récentes se rapportant au viol dit par surprise (Précisions sur la définition du viol par surprise Cour de cassation, crim. 23 janvier 2019 AJ pénal 2019) ou au viol entre époux (Le viol Conjugal : un crime comme les autres ? dirigé par Patrick Chariot, édition CNRS 19 dept 2019) qui font apparaître les insuffisances de la définition du viol, laquelle ne suffit plus à caractériser l'existence du consentement ou son absence. « Cette notion ne va pas de soi, avec d'un côté, une conception du consentement qui le fonde sur la volonté ou qui le dissocie du désir, et d'un autre côté, une conception qui le fonde sur le désir ou qui considère qu'un consentement à des rapports sexuels non désirés est un consentement à une effraction source de traumatisme » ( David Simard. La question du consentement sexuel : entre liberté individuelle et dignité humaine. Elsevier, 2015) En nous intéressant au consentement de la victime aussi bien mineure que majeure, en matière d'infractions sexuelles, nous serons amenés à étudier le discernement de la victime, élément constitutif essentiel du consentement, qui ne répond pas à une définition précise ; car le consentement est lui-même rarement défini en droit pénal. On ne s'y intéresse que par les effets qu'il produit. S'intéresser au consentement, c'est pénétrer dans le for interne des personnes, ce que le droit se refuse à faire. Et pourtant, il semble, à présent, dans les hypothèses nouvelles d'infractions sexuelles, qu'il soit impossible d'échapper à cette analyse Après avoir étudié la notion de consentement en droit pénal, nous nous intéresserons à l'objet du consentement et à sa preuve. La charge de la preuve doit-elle reposer sur la victime ou doit-elle passer par une formalisation qui contraindrait l'auteur à démontrer le consentement préalable de sa victime ? Cela nous conduira, entre autres, à étudier le consentement chez le mineur dans des hypothèses de relations sexuelles avec un majeur, mais, aussi entre mineurs. « On n'a pas tout dit du consentement quand on a dit qu'il est sympathie et sourire d'un être humain à un autre. Le sourire ne dure pas toujours et les difficultés restent au juriste ». (J Carbonnier Droit civil T4, 16eme édition, 1992). BIBLIOGRAPHIE Carbonnier J., Droit civil T4, 16eme édition, 1992 Chariot P., Le viol Conjugal : un crime comme les autres ? Édition CNRS 19 dept 2019 P.Conte, notion de surprise (commentaire Crim 4 sept 2019, n°18-85.919) Droit pénal 2019 comm.180 Darsonville A., Précisions sur la définition du viol par surprise Cour de cassation, crim. 23 janvier 2019 AJ pénal 2019 p153 Fabre Magnan M., L'institution de la liberté, PUF 2018 Fabre Magnan, La liberté du consentement, le sujet, les droits de l'homme et la fin des bonnes murs, de Droits, PUF, 2009 F. Gauvin, Viol par surprise : l'émule de Zeus, Dr pénal 2019 ; comm.42 Mayer, Le nouvel éclairage donné au viol par la réforme du 23 décembre 1980, D. 1981, Ch. p. 283 Merle et Vitu, Traité de droit criminel, Droit pénal général Tome I, 7ème édition 1981 Merle et Vitu, Traité de droit criminel, Droit pénal spécial Tome II, 7ème édition 1981 Seyyed Mohsen Nasr, l'influence de la victime sur la responsabilité pénale, thèse Lyon, 1933 Xavier Pin, Le consentement en matière pénale, LGDJ 2002 J-A Roux, Cours de droit criminel, Des conditions fondamentales de la responsabilité pénale, 2e édition, T.I p. 141 L. Saenko, La présomption de non-consentement des mineurs victimes d'agressions sexuelles : le retour ? D. 2020 p528 J-C. Saint Pau, Viol par surprise : le stratagème numérique et érotique, D.2019 p. 364 J-C Saint Pau, L'agression sexuelle par surprise, Mélanges B. Teyssier, LexisNexis 2019 David Simard, La question du consentement sexuel : entre liberté individuelle et dignité humaine. Elsevier, 2015