Thèse en cours

La réticence dans l'oeuvre de Jane Austen : figures et enjeux

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Auteur / Autrice : Catherine Lallemand
Direction : Christine Berthin murphy
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Langues et littératures anglaises et anglo-saxonnes
Date : Inscription en doctorat le 20/10/2017
Etablissement(s) : Paris 10
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Lettres, langues, spectacles
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de Recherches Anglophones

Mots clés

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Résumé

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A ce jour, peu de recherches ont été menées sur la notion de réticence chez Jane Austen. Dans leur ouvrage intitulé La Réticence (2004), Liliane Louvel et Catherine Rannoux définissent la réticence de la manière suivante : « la réticence est un mode du dire : elle dit qu'elle ne veut pas, ou qu'elle ne peut pas, ou qu'elle ne doit pas dire. Mais elle dit toujours . » Cette citation signe le point de départ de notre réflexion sur la réticence car elle met en évidence le statut paradoxal de la réticence dans l'écriture et son rapport différentiel avec le non-dit. Dans ses écrits, Jane Austen aborde tous les grands problèmes de la société dans laquelle elle évolue en utilisant une langue toute en nuance et toute en retenue. La retenue se rapproche alors en cela de la réticence. La retenue est la marque du non-dit, d'un langage restreint par des contraintes tout aussi bien intérieures qu'extérieures. Jean-Jacques Lecercle établit un lien complexe entre silence et réticence, réticence où le jeu social prend toute son importance. Nous devons, cependant, bien faire la différence entre langue et langage. La langue est une codification du réel à travers un système de signes qui se substituent symboliquement à la réalité. Ces signes ne font sens que par leur différenciation à l'intérieur du système de la langue. Le langage est, quant à lui, un phénomène spontané et préréflexif. Il est le signe de la parole, extraverti par définition puisqu'il est adressé à un autre. Aussi, serait-il intéressant d'inscrire Jane Austen dans cette approche du langage. La réticence incarne un paradoxe car elle signe le discours en y inscrivant son absence. Dans leur préface à La Réticence (2004), Liliane Louvel et Catherine Rannoux introduisent leur réflexion en suggérant que lorsque la réticence fait silence, c'est, en fait, en le disant. Il existe donc un lien entre réticence et silence. Par ailleurs, il y a une différence entre silence « dit » et le silence « tu » : « dire sans dire » ne veut pas dire « silence total ». Dès lors, la réticence a ses propres caractéristiques et ne peut être assimilée à un silence total. En effet, ce n'est pas parce que nous n'avons rien à dire que nous cachons quelque chose ou que nous restons sur notre réserve. Le vide ne qualifie pas la réticence qui se construit au contraire autour de ce qui n'est pas ouvertement exprimé. Dans l'œuvre de Jane Austen, la réticence tend à être paradoxalement l'empreinte de l'auteure : c'est ce que mes recherches tenteront de démontrer. Ce que l'auteure ne dit pas devient la marque, la trace de sa présence dans son œuvre littéraire. Ainsi, la réticence sert le discours tout en le dépassant : elle excède le dit et ou le précède. Comme le souligne Jean-Jacques Lecercle (2004), la réticence représente le passage au silence, tension vers le silence, la parole lancée mais aussitôt avortée. Elle est une figure paradoxale où se conjugue le manque, le silence et l'interruption, mais aussi les « tout dire », l'épuisement du sens et la prolifération. La réticence se dérobe à la lecture mais demeure fascinante car elle est insaisissable. Si nous pouvons la qualifier d'insaisissable, alors nous pouvons probablement faire le lien entre réticence et retrait et, ainsi, poser la question suivante : la réticence est-elle la marque d'une retenue ou d'un retrait ? Cette interrogation met en évidence que le manque et l'excès qui caractérisent la réticence.