Thèse en cours

Gouverner la rue par l’informalité : L’occupation conflictuelle des espaces publics par les vendeurs des rues à Mumbai (Inde)

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Auteur / Autrice : Lola Sales
Direction : Frédéric LandyJean-Fabien Steck
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Géographie humaine, économique et régionale
Date : Inscription en doctorat le 22/10/2013
Etablissement(s) : Paris 10
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Espaces, Temps, Cultures (Nanterre, Hauts-de-Seine ; 2000-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire Espaces travail (Paris)

Résumé

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Le commerce de rue, qui se caractérise entre autres par une occupation précaire de l’espace, fait vivre un très grand nombre d’habitants tout en fournissant quotidiennement des services essentiels à la population d’une métropole comme Mumbai, qui a connu d’importantes recompositions urbaines mais où les formes d’occupations informelles apparaissent de plus en plus indésirables. Ces vendeurs de rue, qui représentent plus de 300 000 travailleurs, interrogent la notion même d’espace public, envisagé à la fois comme un lieu de travail, un lieu de vie, ressource économique essentielle, mais également comme espace de circulation, de récréation, de flânerie, de consommation voire comme une aménité urbaine. Plus encore, pour nombre d’acteurs, l’espace public représente une « rente spatiale » officieuse, créée par des pratiques corruptives, notamment pour les pouvoirs municipaux qui prélèvent une « taxe » sur les activités des rues rendues illégales, mais également par des pratiques clientélistes et mafieuses pour d’autres types d’acteurs exerçant un contrôle social et politique sur la rue. C’est dans un contexte de compétition généralisée pour l’espace urbain et ses ressources que nous devons analyser les processus d’appropriation des espaces publics par des acteurs urbains divers, ainsi que les conflits, les arrangements, les mobilisations et les modes de régulation formels ou informels qui en découlent. Dès la période coloniale, la vente de rue est vue comme une menace à l’ordre public et un problème de gouvernement par les autorités coloniales, ainsi que par une partie des élites urbaines. C’est à cette période que ces activités sont majoritairement rejetées dans l’illégalité, avec l’introduction de nouvelles normes juridiques, bien que celles-ci, en pratique, soient toujours l’objet de transgression et de négociation. En mars 2014, une nouvelle loi concernant les vendeurs des rues (Street Vendors Act) a été adoptée au niveau fédéral, reconnaissant la légitimité et la légalité de leurs activités par le biais d’un processus de régularisation qui va modifier leur statut juridique et instaurer de nouvelles modalités de gouvernance des espaces publics en y intégrant les vendeurs. Cependant, l’application du Street Vendors Act ne s’effectue pas sans un certain nombre de résistances, blocages structurels et irrégularités à l’échelle locale, réifiant l’informalité comme mode de gouvernement à Mumbai. De surcroît, la multiplication des associations de résidents, de commerçants formels, mais également de vendeurs de rue redéfinit les discours de légitimation, les pratiques concrètes du droit, les nouveaux usages des outils juridiques, mais également les rapports quotidiens à l’État. Privilégiant une approche par les acteurs et par les pratiques quotidiennes, cette thèse s’inscrit dans le champ renouvelé de l’informalité politique pour interroger la notion de « droit à la ville » à plusieurs niveaux de lecture : comme processus d’inclusion et d’exclusion des habitants dans leur accès aux ressources urbaines, comme forme d’institutionnalisation du droit en ville, mais également comme possibilités différenciées et inégales de participation aux changements urbains par des pratiques ordinaires de l’espace public, des rapports quotidiens et ambivalents à l’État et à la citoyenneté urbaine ou par des luttes et des mobilisations « par le bas ».