Thèse en cours

Une histoire des pratiques lettrées antiques et de leurs mutations : l'exemple de la pragmatique des textes attribués à Apulée
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Auteur / Autrice : Cyril Rouanet
Direction : William MarxPierre Vesperini
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Littérature comparée
Date : Inscription en doctorat le 27/09/2017
Etablissement(s) : Paris 10
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Lettres, langues, spectacles
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de recherches en littérature et poétique comparées (Nanterre, Hauts-de-Seine)

Résumé

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Ces vingt dernières années, la tendance des études consacrées à Apulée (c. 125-170) est à une approche globale de son œuvre, qui mêle le rhéteur, le philosophe et le « romancier ». Cette thèse propose d'envisager les œuvres d'Apulée non pas comme un corpus unifié (par sa pensée, son adhésion au platonisme, sa tendance à faire de belles œuvres rhétoriques, sa sensibilité pour les cultes orientaux…), mais en interrogeant leurs usages de façon individuelle. On évite donc des catégories d'analyse modernes, telles que « médioplatonisme », « romans antiques », « littérature didactique », « conviction philosophique », qui sont certes utiles pour l'histoire des idées et doctrines, mais ne permettent pas complètement de comprendre les pratiques et les mentalités anciennes. Elles sont en effet des opérateurs d'unification de la démarche d'Apulée, qui reposent sur des présupposés exogènes à l'Antiquité (la cohérence des idées philosophiques, la notion d'auteur, la linéarité des récits, etc.). La plupart des études sur Apulée, en particulier sur ses opuscules philosophiques, s'intéressent aux idées qu'on peut en dégager (sur la divinité, le cosmos, l'éthique, etc.) et se contentent souvent de quelques courts chapeaux introductifs concernant l'histoire de ces textes, ou encore leur place dans l'ensemble des pratiques lettrées qui leur sont contemporaines. Ce travail cherche donc à combler ce manque, en essayant de comprendre non pas le contenu doctrinal (reconstructible par le regard moderne, qui se focalise sur le seul énoncé) mais les usages réels des textes : leur pragmatique, c'est-à-dire leurs modalités de composition et d'énonciation, les performances sociales dont ils sont la trace, etc. Les textes attribués à Apulée étant particulièrement divers, ils permettront de balayer un large panel des pratiques lettrées impériales et des mentalités indigènes avec lesquelles elles ne font qu'un : discours public, transfert (qui deviendra traduction) de la philosophie grecque, sophistique, littérature de banquet, paradoxographie, narration, philosophie platonicienne, etc. Une fois reconstruite la pragmatique initiale des textes d'Apulée, on cherche à montrer quels sont les changements culturels qui ont entraîné des modifications d'usages jusqu'à la constitution progressive d'un corpus unique tout au long du Moyen Âge. En défaisant l'image tardive d'Apulée au profit d'un Apulée originel, et en analysant les ruptures culturelles qui expliquent le passage de l'une à l'autre, on met en évidence un « pluri-objet », qui s'inscrit dans la démarche comparatiste (F. Lavocat, 2012). Cet aspect comparatiste est redoublé par la double culture d'Apulée, typique des lettrés de son temps, qui mélange de façon complexe modèles grecs et latins (utraque lingua).