Le folklore de l'immigration portugaise en France : de la tradition du passé aux passions du présent. « Ranchos Folclóricos » au XXIe siècle
Auteur / Autrice : | Ana Freitas |
Direction : | Da Graca Dos santos |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Langues,littératures et civilisations romanes : Portugais |
Date : | Inscription en doctorat le 12/10/2017 |
Etablissement(s) : | Paris 10 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Lettres, langues, spectacles (Nanterre, Hauts-de-Seine ; 2000-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Études romanes (Nanterre) |
Mots clés
Mots clés libres
Résumé
Au cur de ce projet de recherche-création se trouve un long métrage documentaire réalisé dans une démarche combinant une analyse approfondie des dynamiques sociales et culturelles des ranchos folclóricos (groupes folkloriques portugais en France) et une exploration esthétique et narrative par le biais du cinéma documentaire. Le titre du film, Lá em Baixo, une expression courante lors des répétitions et festivals organisés par les associations portugaises en France, symbolise la proximité affective avec le Portugal et la réalité physique souvent souterraine des lieux de répétition et de présentation, soulignant la dualité entre l'attachement identitaire et les contraintes logistiques. Pendant l'année de 2019, le film accompagne les activités de trois ranchos folclóricos en région parisienne : ARCOP de Nanterre, Juventude Portuguesa de Paris 7, et Grupo Folclórico e Etnográfico Povo da Nóbrega em Créteil ; révélant les traditions ancestrales, l'importance de la transmission intergénérationnelle, et la passion qui anime les pratiques musicales, chorégraphiques et vestimentaires de chaque participant, indépendamment de leur âge ou de leur période d'immigration. Le rancho folclórico est ainsi un objet social, ethnographique, mais aussi artistique, avec une histoire collective, communautaire et individuelle. Ma pratique cinématographique s'inscrit dans une démarche personnelle et réflexive, où je suis responsable de toutes les étapes de création de mes documentaires. Cette approche artisanale et hybride permet d'explorer les implications théoriques et pratiques d'une collaboration profonde avec mes sujets. En tant que réalisatrice et chercheuse portugaise, mon engagement est également introspectif, nourri par un dialogue constant entre théorie critique et expérimentation cinématographique, questionnant les frontières fluides de l'expérience migratoire contemporaine, avec des les réflexions sur les méthodologies de création entre fiction et documentaire. Lá em Baixo ne se contente pas de documenter des pratiques culturelles, mais offre une fenêtre sur un processus dynamique où les participants deviennent co-créateurs de leur propre représentation. Cette collaboration enrichit le film et illustre la puissance transformative de la cinécriture en tant qu'outil de découverte et de transmission des identités culturelles en contexte migratoire. L'encadrement historique, sociologique et ethnographique du folklore de l'immigration portugaise en France articule deux axes principaux : le contexte de départ clandestin dans les années 1960, conditionné par un temps dictatorial qui imposait une certaine représentation de la culture traditionnelle et populaire portugaise, comme une formule d'identité nationale manipulée par l'Estado Novo ( le régime autoritaire portugais entre 1933 et 1974, qui a succédé à la dictature militaire instaurée en 1926 ) ; et l'évolution du folklore au sein des associations portugaises en France, depuis leur création dans les années 1970 et 1980 en répercussion de la révolution des illets au Portugal et du changement politique en France, soulignant le renouveau apporté par la vague d'immigration suite à la crise économique de 2008, et l'évolution des ranchos folclóricos jusqu'au moment de tournage et montage du film. Le fait d'avoir quitté son pays dans une situation dictatoriale, au cours de laquelle il y a eu une folklorisation de la culture portugaise, a eu des répercussions dans les premiers groupes folkloriques portugais en France et leur vision de ce qui est la tradition et la culture à transmettre. Le nouveau contexte social et culturel des générations suivantes crée une évolution de l'attachement à l'imaginaire et aux représentations des formes folkloriques en ce qu'elles représentent une image rêvée de la culture portugaise. La conception de ce qui est « vrai » ou « imaginaire », la transmission intergénérationnelle, la socialisation, les différentes passions et l'avenir de ces groupes, forment un parallèle avec les frontières entre le « réel » et la « fiction » dans l'esthétique cinématographique et la quête d'authenticité pour une auto-représentation identitaire fondée sur une « tradition » versatile dans un contexte migratoire en constante évolution.