Thèse en cours

La réparation du préjudice causé aux personnes privées en droit international

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Auteur / Autrice : Lisa Dumazet
Direction : Pierre Bodeau-Livinec
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Droit public
Date : Inscription en doctorat le 24/10/2019
Etablissement(s) : Paris 10
Ecole(s) doctorale(s) : École Doctorale Droit et Science Politique
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de droit international (Nanterre)

Résumé

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La réparation est un principe du droit international largement admis et s'inscrit dans un système complet, en ce sens que la commission d'un fait internationalement illicite entraîne la responsabilité de son auteur, lequel doit alors « réparer » afin de permettre la restauration de la situation ex ante. Partant, elle est le corollaire direct et fondamental de la responsabilité engagée pour violation d'une obligation internationale. Initialement conçue comme une institution juridique jouant d'État à État, la réparation a vu son champ subjectif d'application s'élargir du fait, notamment, de l'affirmation de la personnalité juridique internationale de l'individu depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale. En violant les obligations internationales qui leur incombent, les États sont responsables à l'égard des titulaires des droits corrélatifs, y compris lorsque ces derniers sont des personnes, qu'il s'agisse d'individus, de groupes d'individus ou de personnes morales de droit privé. Nombre d'outils normatifs internationaux ont reconnu aux victimes un droit à demander réparation devant des juridictions internationales en cas de manquement. Plusieurs facteurs contextuels justifient d'appréhender la réparation sous une nouvelle approche. À titre d'illustration, la portée potentiellement transfrontière des dommages en matière environnementale complique le processus engendrant la réparation. Ces derniers sont, en effet, susceptibles d'être individuellement mais aussi collectivement subis. Le réchauffement climatique peut générer des dommages individuels, groupés ou collectifs. La mondialisation des échanges et l'internationalisation des investissements atteignent également la vie et les activités des personnes privées, physiques comme morales, seules ou regroupées. Il s'agit d'autant de facteurs supplémentaires à prendre en compte dans la mise en œuvre des modalités de réparation afin que celle-ci puisse entièrement remplir la fonction qui lui est assignée. Le principe de réparation constitue per se une garantie de la légalité internationale et, plus largement, de l'état de droit, mais n'aura effectivement de sens que si son application pratique a réellement vocation à « réparer » de manière satisfaisante le préjudice individuel ou collectif. Or, pour être satisfaisante, la réparation doit répondre à un critère d'adéquation. Il résulte en ce sens de l'arrêt Usine de Chorzów de la CPJI que l'adéquation est sous-jacente au principe de réparation : « la violation d'un engagement entraîne l'obligation de réparer dans une forme adéquate ». Il apparaît dès lors nécessaire d'étudier l'adéquation des modalités de la réparation à la réalisation d'un principe de responsabilité, fondamental au bon fonctionnement du système juridique international. En effet, si l'édifice de l'engagement de la responsabilité pour fait internationalement illicite entraînant une obligation de réparation est théoriquement remarquable, il apparaît néanmoins fissuré en pratique par les failles apparues dans l'octroi de la réparation, en particulier lorsque celle-ci est due à des personnes privées. S'interroger sur la réparation du préjudice causé aux personnes privées en droit international nécessite donc d'examiner les différentes formes de réparation, soit tant les procédés traditionnels que ceux que l'on voit émerger sur la scène internationale. Si « la forme adéquate de la satisfaction dépendra des circonstances et ne peut être prévue », il apparaît alors absolument nécessaire d'interpréter largement le principe de réparation adéquate, non pas en le cantonnant au critère de proportionnalité eu égard à la gravité du fait illicite, mais en l'adaptant également aux circonstances matérielles, spatiales, temporelles et personnelles dans lesquelles s'inscrit le préjudice subi. À cet égard, si l'adéquation de la réparation s'apprécie au cas par cas et ne peut se prévoir, l'on peut supposer que des standards de référence constitueraient néanmoins une réelle garantie à la satisfaction des personnes lésées. S'il est largement admis en droit international, le principe de réparation aux personnes privées, qu'elles soient individuelles ou organisées en communauté, physiques ou morales, souffre d'insuffisances aussi bien matériellement que conceptuellement. Les situations potentielles de violation d'obligations préjudiciables ne cessant de se multiplier, il est primordial de s'interroger sur le point de savoir si la réparation demeure adéquate et suffisante lorsqu'elle a vocation à bénéficier aux personnes privées. Cette thèse vise à mesurer le degré d'adéquation existant entre les obligations de principe incombant au(x) sujet(s) responsable(s), d'une part, et, de l'autre, le droit des personnes privées victimes de violations du droit international d'obtenir une réparation participant effectivement et pleinement à la restauration de leur situation juridique antérieure.