Thèse en cours

Frontera, frontières. Entre deux Royaumes ? Limites politiques et identités territoriales dans les comtés du Roussillon et de Cerdagne, XIIe-XVe siècles

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Auteur / Autrice : Margault Coste
Direction : Claude Denjean
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Histoire
Date : Inscription en doctorat le 30/09/2019
Etablissement(s) : Perpignan
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale INTER-MED (Perpignan ; 2011-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : FRAMESPA- France, Amériques, Espagne-Sociétés, pouvoirs, acteurs

Résumé

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À première lecture, étudier la notion de frontière en Roussillon et Cerdagne à la fin du Moyen Âge présente un caractère d'évidence : la fixation, lors de la rencontre de Corbeil de mai 1258, d'une ligne séparant le Royaume de France de la Catalogne, l'invasion qui poussa Philippe III jusque devant Gérone en 1285, les négociations de 1462 à l'époque de Louis XI, mais aussi la reconquête des comtés du nord par Pierre le cérémonieux … bien des événements témoignent du dessin et de la définition d'une ligne de séparation entre puissants États à la fin du Moyen Âge, qui fut fixée en tenant compte des limites des anciens comtés. Cependant, les médiévistes ne sont pas certains de saisir entre le XIIe et le XVe siècle des faits, des représentations et, surtout, des modes d'inscription sur un territoire qui auraient été comparables à ceux de la période moderne et, d'abord, à ceux de la période contemporaine. Certes, le mythe des frontières naturelles a été revisité depuis longtemps. Certes, chacun se souvient que les médiévaux parlèrent de marche (« marca ») plutôt -et plus tôt- que de frontière (« frontera »). On sait que, sur certains espaces, nommés alors « périphériques », « tampons », « interstitiels », les délimitations bougèrent. La tentation d'une histoire régressive menée sans précautions, son instrumentalisation politique et culturelle au service d'identités sans cesse remémorées et reconstruites, voire pour légitimer des nations ou des territoires politiques actuels, les thèses historiographiques simplificatrices enfin font beaucoup pour attirer l'attention sur ce sujet. Le désamour pour une histoire politique restreinte à un récit événementiel, la crise des démocraties ¬-française, espagnole, européenne- ont tari la tradition de l'histoire de France ou d'Espagne classique ou, moins radicalement, celle de la Catalogne. Alors que les murs et les barbelés sont au cœur de l'actualité, la tradition que portèrent en France B. Guenée -prosopgraphie et historiographie- ou C. Beaune -naissance de la « nation » France-, sans être abandonnée comme en témoigne la thèse de L. Dauphant, héritier de la réflexion du F. Braudel de L'Identité de la France, reste désormais en retrait. Cependant, la recherche des lignes de partage, politiques ou de civilisation, se porte désormais vers la mer et les océans, ainsi que sur les espaces extra-européens. Divers doctorats à peine ou pas encore soutenus touchent à cette thématique et proposent des visions originales sur l'Afrique, le monde islamique, Byzance, la Méditerranée, l'Écosse, la Baltique, les marches orientales. Le moment semble bien choisi pour renouveler les perspectives sur la longue histoire de la fixation et des déplacements de frontières entre États au cœur de l'Occident médiéval, là où s'épanouit une « civilisation féodale ». Le terrain choisi n'a rien d'exotique : il est déjà connu, il fut marche, barrière et point de passage. Il s'ouvre ou se ferme à la mer, qui permet d'aller vers le nord ou le sud, de manifester l'impérialisme occidental vers l'est. Les fausses évidences de sa supposée position frontalière, son insertion successive, voire simultanée, dans plusieurs États, durant les siècles du Moyen Âge central et finissant, la richesse et la diversité de la documentation conservée, sont autant de gardes fous contre une pensée simpliste ou téléologique. La perspective assumée est celle d'une histoire au ras du sol de la construction et du sentiment des appartenances. C'est une histoire sociale et économique du politique, une histoire culturelle, une archéologie du sentiment vécu qui sera privilégiée. Nous proposons tout simplement un sujet d'histoire dont le centre est l'homme, être de mémoire territorialisé et social.