Thèse en cours

Expériences de pensée et intelligences multiples : la science-fiction comme pédagogie du présent et du futur

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Auteur / Autrice : Floriane Morin
Direction : William Dow
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Langues et littératures étrangères
Date : Inscription en doctorat le 01/11/2019
Etablissement(s) : Université Gustave Eiffel
Ecole(s) doctorale(s) : Ecole doctorale Cultures et Sociétés
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de recherche Littératures, savoirs et arts (Champs-sur-Marne, Seine-et-Marne)

Mots clés

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Résumé

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La SF est un révélateur social et un outil d'apprentissage qui, sur un mode narratif, ludique et décalé des réalités sociales courantes, permet d'appréhender les contours de certains concepts des sciences sociales aidant à mieux comprendre la société qui nous entoure. Comme ceux de « monde » de David Lewis, ou de « simulacre » de Jean Baudrillard. La littérature SF est une sorte de pédagogie active procédant des observations plus ou moins conscientes de leurs auteurs sur les rapports sociaux, les évolutions de l'économie et des institutions. Je travaille sur un échantillon de quatre écrivains qui évoquent de manière déformée les inégalités, crises financières, épidémies, idéologies, etc. Ils invitent leurs lecteurs à poser le décalque des mondes parallèles et personnages qu'ils inventent sur les réalités qui nous entourent, et à apprendre des différences et ruptures cognitives qui en résultent. Ils ont appris à s'adresser, si l'on utilise la typologie en sciences cognitives d'Howard Gardner, à nos intelligences logico-mathématiques. Mais aussi surtout à nos intelligences littéraires et langagières, voire émotionnelles qui entendent et voient plus que ce qui est dit de manière dénotée. La SF cultive autrement dit l'esprit en invitant à rêver et à comprendre par l'intuition. C'est là son supplément de pédagogie qui fascine les enfants, notamment dans ses déclinaisons cinématographiques et sous forme de BD. Ces hypothèses étant posées, cette thèse se demande si cette propension de la SF à nous instruire, que de nombreux auteurs de SF ont confirmée en devenant en quelque sorte des miroirs de la culture de leurs époques, perdure avec autant de force dans la SF moderne. Laquelle tend à partir dans un grand nombre de directions, au point de remettre en cause l'idée de genre. Pour tenter de répondre, je suis un axe divisé en plusieurs parties se rapportant à une période de l'histoire de la SF. On y distingue trois étapes reliées entre elles par des imaginaires sociaux relativement bien structurés. L'âge d'or (1945-1975) correspond à une société qui fonctionne relativement bien sur plusieurs plans. Où le contrat social entre les personnes et les groupes sociaux est plutôt solide. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la science et la technologie se mettent au service d'une reconstruction des sociétés et des espoirs qu'elles transportent. De nouveaux courants d'idées et des mutations culturelles nourrissent la littérature SF, dont les écrivains se projettent très loin, imaginant tout ce dont un être humain a pu et pourrait rêver. La période de crise (1975-2000) met l'accent sur une certaine déficience de la société, qui ne peut plus être représentée comme on se l'était imaginée au sortir de la période d'après-guerre. L'instabilité la saisit. Le chômage devient de masse. L'inflation se développe, etc. Des visions post-apocalyptiques apparaissent. Une sorte de mouvement de fragmentation de la SF se produit, et ses thèmes et sous-genres commencent à se multiplier. Ses limites littéraires sont pour partie repoussées. La période « post-apocalyptique » (XXIe siècle) est notamment marquée par le fait que, depuis plusieurs années avec la crise économique, mais aussi une crise de confiance institutionnelle, la coordination sociale dans la société tend à se défaire. Robert Castel parle d'« individualisation » et de « décollectivisation » sociales. La littérature SF s'en fait l'écho en se fragmentant en de nombreux sous-genres et déclinaisons. Comme si les imaginaires de la SF, à l'instar de la dispersion des fractions de classes et des modes de vie dans la société réelle, se diversifiaient. On observe une augmentation de la consommation des réalités virtuelles et, à travers cette progression, le développement d'une société où les individus sont pour partie socialisés à travers ces dites réalités. Ce qui rappelle les propos de Jean Baudrillard qui avançait que nous allions entrer dans des sociétés d'images et de simulations du réel.