Thèse soutenue

L'adversité environnementale et les préférences prosociales, et une nouvelle méthodologie pour accroître la validité externe des jeux économiques

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Auteur / Autrice : Niels Lettinga
Direction : Coralie Chevallier
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences cognitives
Date : Soutenance le 30/06/2021
Etablissement(s) : Université Paris sciences et lettres
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Cerveau, cognition, comportement (Paris)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire de neurosciences cognitives & computationnelles (Paris)
établissement de préparation de la thèse : École normale supérieure (Paris ; 1985-....)
Jury : Président / Présidente : Alex Cristia
Examinateurs / Examinatrices : Coralie Chevallier, Alberto Acerbi, Nicolas Claidière
Rapporteurs / Rapporteuses : Alberto Acerbi, Nicolas Claidière

Résumé

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Bien que la coopération constitue un aspect fondamental et universel des relations sociales humaines, elle varie considérablement d'un individu à l'autre. L'adversité environnementale, qui chez l'homme est liée à la privation économique, aux instabilités du foyer familial et à la mortalité extrinsèque, semble déterminer une partie de cette variabilité. Si une relation entre adversité et coopération a été mise en évidence dans diverses études, sa nature précise reste encore indéterminée : dans des environnements défavorables, la coopération pourrait tout aussi bien augmentée que diminuée, voir ne pas être affectée. Par ailleurs, on ne sait pas par quel canal l'adversité environnementale pourrait éventuellement affecter la coopération. Plusieurs explications ont été avancées pour répondre à ces questions, que nous détaillons dans le premier chapitre de cette thèse. Dans les chapitres deux et trois, nous présentons un modèle explicatif inspiré de la théorie des histoires de vie, qui stipule que les organismes doivent faire des compromis dans la manière d’allouer leurs ressources métaboliques limitées à des fonctions biologiques concurrentes. Jusqu'à présent, le rôle médiateur de ces compromis dans la relation entre adversité et coopération n'a pas été étudié. À l’aide de modèles d’équations structurelles, nous avons donc testé dans deux études distinctes l’idée que cette relation soit médiée par une allocation prioritaire des ressources à la reproduction, au détriment de la maintenance somatique. Dans la première, nous avons montré une association négative entre environnements défavorables et coopération – ici mesurée par des questionnaires d'auto-évaluation – qui était médiée par un compromis latent caractérisé par plus d'efforts de reproduction et un statut de santé dégradé. Dans la deuxième étude où la coopération était mesurée par des jeux économiques, ce pattern était tout simplement absent. L'ambiguïté de ces résultats interroge la précision des méthodes habituellement employées pour mesurer les préférences prosociales des gens (par exemple, la confiance sociale). Dans l'ensemble, deux méthodes principales sont utilisées : les questionnaires d'auto-évaluation et les jeux économiques. Cependant, ces derniers sont soupçonnés de manquer de validité externe par rapport aux questionnaires d’auto-évaluation. Pourquoi en est-il ainsi et que peut-on faire pour remédier à ce problème ? Nous avançons l'idée que les décisions prises dans les jeux économiques en laboratoire sont susceptibles d'être influencées par la situation actuelle (l'état actuel des participants), tandis que les questionnaires d'auto-évaluation sont conçus pour mesurer le comportement moyen des personnes (un trait stable dans le temps). Il a en effet été démontré que les décisions prises dans divers jeux économiques présentent une faible stabilité, contrairement aux réponses aux questionnaires d'auto-évaluation. Dans une troisième étude présentée au chapitre quatre, nous souhaitons tester l'hypothèse selon laquelle la passation répétée de jeux économiques dans une période de temps plus longue permet de contrecarrer l'influence de tout état momentané. Ainsi, la répétition des jeux économiques sur une période prolongée devrait rapprocher les réponses moyennes des participants de leur comportement moyen mesuré par les questionnaires d’auto-évaluation. Pour tester cette prédiction, nous souhaitons réaliser une étude longitudinale dans laquelle 275 répondants joueront à 10 sessions séparées comprenant chacune 16 ‘jeux de confiance’, et qui seront également réparties sur une période de 3 semaines. Un questionnaire mesurant la confiance sociale lors sera également complété au cours de la première et de la dernière session. Enfin, dans le cinquième chapitre, nous discutons les limites de nos recherches et évoquons les approches prometteuses que celles-ci pourront éventuellement inspirer.