La réception d'Athalie de Jean Racine en France de sa rédaction à 1981 : vie et mort d'un classique
Auteur / Autrice : | Nicolas Réquédat |
Direction : | Olivier Leplatre |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Lettres mention langues et littérature françaises |
Date : | Inscription en doctorat le 01/10/2018 Soutenance le 18/12/2023 |
Etablissement(s) : | Lyon 3 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Lettres, langues, linguistique, arts (Lyon ; 2007-....) |
Résumé
La dernière tragédie de Racine est un classique oublié. C’est de cet étonnement premier que naît notre travail. Ou plutôt de l’écart entre l’extraordinaire fortune scolaire de cette œuvre et la radicalité de son oubli. Athalie est en effet un cas à part du fait de la longévité de sa présence dans l’enseignement secondaire et de la place cruciale qu’elle occupe dans les programmes et les manuels scolaires au long du XIXe siècle. Ainsi, si l’on se situe dans les décennies où Athalie disparaît des salles de classe, elle fait partie des pièces françaises présentes dans les écoles depuis le plus longtemps, grâce notamment aux mises en scène scolaires du XVIIIe siècle qui lui ont donné une vie à l’école avant même que des textes en langue française n’aient fait leur entrée dans des programmes nationaux. Plus qu’une simple anecdote, la réception singulière d’Athalie en fait un cas limite qui nous permet de nous interroger sur les mécanismes de constitution d’une œuvre théâtrale en classique scolaire, de sa transmission entre autres en tant qu’élément de patrimoine et de sa disparition des circuits éducatifs. C’est l’objet de cette étude historique et littéraire sur le temps long – près de trois siècles – qui nous mène à enquêter sur les traces d’une pièce qui, par les différentes modalités de transmission qu’elle a connues, offre une importante diversité de documents à inspecter. Des programmes de représentations de théâtre scolaire aux mémoires de jeunesse, en passant par les cahiers d’élèves et les manuels édités, la diversité du corpus que nous étudions ici témoigne de la grande variété de formes qu’a pu endosser la réception scolaire d’Athalie en France. Ainsi, la première partie de ce travail, se concentre sur la période où Athalie est encore dans le giron saint-cyrien de 1690 à 1713 et sur son émancipation sur les scènes des collèges et dans les cours de rhétorique et de grammaire de ces mêmes établissements jusqu’en 1803. La première période de cette partie, dans le faux huis-clos de la Maison Royale de Saint-Louis, donne à voir le rôle problématique de la nature théâtrale d’Athalie, à la fois facilitatrice et obstacle tout au long de sa transmission. L’étude s’intéresse ensuite, sur une période qui couvre la majeure partie du XVIIIe siècle, à la réception scolaire de la pièce dans des espaces masculins. Au fil du siècle, la dernière tragédie de Racine conquiert une place dans les collèges et les institutions éducatives par le biais des représentations scolaires, alors même que le français comme matière n’existe pas et que l’étude des textes en langue française est surtout réservée aux traductions d’auteurs classiques. La deuxième partie de ce travail s’intéresse à la période qui court de 1803 à 1980. C’est à la fois celle de la consécration d’Athalie comme classique scolaire et de son oubli. Au XIXe siècle, la pièce entre dans les programmes et y occupe une place centrale. Pour ce premier moment, notre étude s’emploie à déterminer les grandes dynamiques de consécration de la pièce dans une profusion de sources institutionnelles – programmes, catalogues, rapports – qui contraste largement avec ce que fournissait le XVIIIe siècle. Enfin, la dernière période se concentre sur les dernières décennies pour s’interroger sur l’effacement de la pièce entre 1880 et 1980 en s’attachant notamment à mesure la portée des deux crises de l’éducation décrites, notamment, par Martine Jey et Isabelle de Peretti. Dans cette dernière période, les politiques éducatives générales, qui conduisent in fine à la féminisation, et plus largement à la massification de l’enseignement secondaire, ont un effet aussi important sur la transmission d’Athalie que les programmes scolaires et leurs instructions pédagogiques. Les questions relatives à la structure de l’école y sont donc traitées à jeu égal avec celles concernant l’enseignement de la littérature française, toujours dans la perspective de la réception de la dernière tragédie de Racine.