Thèse soutenue

Penser la peur au temps des catastrophes : Matériaux féministes pour une autodéfense affective

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Auteur / Autrice : Léna Silberzahn
Direction : Astrid von BusekistBrigitte Bargetz
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Science politique
Date : Soutenance le 12/12/2023
Etablissement(s) : Paris, Institut d'études politiques
Ecole(s) doctorale(s) : Institut d'études politiques (Paris). École doctorale
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de recherches politiques de Sciences Po (Paris)
Jury : Président / Présidente : Benedikte Zitouni
Examinateurs / Examinatrices : Astrid von Busekist, Brigitte Bargetz, Fabienne Brugère, Luc Semal, Christine Hentschel
Rapporteurs / Rapporteuses : Fabienne Brugère, Luc Semal

Résumé

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Cette thèse mobilise le prisme des affects pour étudier les ressorts de l’impuissance politique face au ravage écologique. Elle contribue à théoriser les manières dont les affects, et en particulier la peur, sont transformés, instrumentalisés, et rendus politiquement productifs au temps des catastrophes. Là où l’opposition entre liberté et peur est un lieu commun en théorie politique, ce travail explore plutôt la possibilité d’une politique qui révélerait la puissance critique et émancipatrice de cet affect, au-delà des trajectoires sécuritaires et pathologiques. Le premier chapitre décrit le risque de dérives autoritaires liées à la peur des catastrophes en offrant une lecture de Franz Neumann et Brian Massumi. Le deuxième chapitre complexifie le diagnostic en soulignant avec Günther Anders que la peur n'est pas seulement ce que les gouvernements génèrent à des fins de discipline, mais aussi ce qu'ils répriment pour éviter des mouvements de résistance. Il propose le concept de « dispositifs de désensibilisation », pour rendre compte de ce rapport souvent oublié, en théorie politique, entre répression de la peur et impuissance politique. La thèse explicite ensuite les manières dont les pensées de l'écologie, partant de cette impuissance même, se sont saisies des angoisses écologiques. Ainsi, les chapitres trois et quatre se penchent respectivement sur les catastrophismes éclairés, et les politiques de l’émerveillement. Si ces deux manières de répondre à l’impuissance semblent diamétralement opposées, elles s'appuient de fait sur la même hypothèse, qui limite leur portée critique : celle d’un prétendu manque d’affects. Dès lors, la troisième partie exhume un ensemble de concepts et de pratiques héritées de la deuxième vague féministe et des écoféminismes étatsuniens pour envisager une politique émancipatrice des passions tristes. Là où la politique de l’émotion renvoie communément à une manipulation hétéronome des affects, ces traces militantes esquissent une méthode autonome d’enquête, de mobilisation et de soin collectifs qui prend les affects comme point de départ des stratégies d’émancipation.