Thèse soutenue

La composition picturale : modélisation, perception & création

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Auteur / Autrice : Pierre Lelièvre
Direction : Peter Neri
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : SACRe, arts visuels, Sciences cognitives
Date : Soutenance le 25/11/2022
Etablissement(s) : Université Paris sciences et lettres
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Lettres, Arts, Sciences humaines et sociales (Paris ; 2010-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Équipe d'accueil SACRe - Sciences, arts, création, recherche (Paris)
Établissement de préparation de la thèse : École normale supérieure (Paris ; 1985-....)
Jury : Président / Présidente : Norberto M. Grzywacz
Examinateurs / Examinatrices : Peter Neri, Norberto M. Grzywacz, Audry Sofian, Alasdair Newson, Katherine Storrs, Chien-Chung Chen, Sylvie Tissot
Rapporteurs / Rapporteuses : Norberto M. Grzywacz, Audry Sofian

Résumé

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La composition picturale, entendue comme la disposition des éléments graphiques sur le plan, est généralement associée à des règles qualitatives et des heuristiques. Bien qu'instructives pour les artistes et leur pratique, ces normes n'agissent que comme des contraintes externes sur le plan. Nous pensons que les œuvres d'art sont capables de fixer des caractéristiques de composition plus fondamentales dans leur matière picturale même. Nous développons donc un paradigme supposant toutes les œuvres d'un·e artiste comme les vues partielles d'une représentation en plus grandes dimensions, agrégeant des régularités compositionnelles intrinsèques. Nous choisissons de matérialiser cet objet hyper-compositionnel théorique par un espace continu, vectoriel et probabiliste. Notre objectif est de rendre ces régularités explicites pour un usage artistique et d'établir des mesures quantitatives pour des études scientifiques. Notre recherche s'inscrit donc pleinement dans un programme réflexif de recherche-création; fondé à la fois sur un matériau artistique personnel, riche d'une pratique de plus de 10 ans de la composition abstraite ; et sur une approche interdisciplinaire projective, combinant une modélisation itérative par apprentissage automatique et des vérifications perceptives avec de la psychophysique. La nature séquentielle et non stationnaire du processus de composition, ainsi que la définition complexe et évolutive de ses unités fonctionnelles sous-jacentes, se combinent en un phénomène perceptif qui ne se modélise pas facilement par les modèles d'apprentissage profond basés sur des pixels, e.g. CNNs. Nous adoptons une stratégie différente, construite autour d'une définition paramétrique de l'exécution des traits, et de RNN-VAEs (Recurrent Variational Auto-Encoders) imbriqués hiérarchiquement, permettant à notre modèle d'aborder la matière picturale en alignant son comportement sur le geste artistique. Plus précisément, cette architecture extrait les régularités compositionnelles en compressant les dessins en un nombre réduit de dimensions indépendantes, alignées dans l'idéal sur la représentation intérieure construite par les artistes et les observateurs. Ces réseaux neuronaux artificiels sont entraînés sur plus de 5000 compositions abstraites personnelles et vectorisées par des courbes de Bézier. Bien que cet ensemble de données soit important pour un seul artiste, son échelle reste relativement réduite pour l'entraînement de réseaux profonds. Nous abordons cette problématique en introduisant de nouvelles contraintes qui encouragent un espace latent à la fois compact, cohésif et expressif. Nous étudions ensuite l'espace compositionnel résultant à travers des jugements perceptifs de trajectoires interpolées entre des points précis de cet espace. Nous vérifions particulièrement l'homogénéité de la densité latente en mesurant l'échelle perceptive produite par des participants humains jugeant la similarité entre des compositions. Nous limitons notre exploration à des coupes circulaires d'hypersphères, dont la densité latente est relativement stable, et des progressions linéaires orthogonales le long de la norme, provoquant des distorsions perceptives plus importantes. Nous utilisons une variante de la méthode MLDS, que nous avons restreinte à des triplets locaux et étendue aux espaces physiques périodiques. Les échelles perceptives mesurées empiriquement présentent des régularités qui sont capturées de manière satisfaisante par la notion d'information de Fisher calculée à partir des métriques fournies par le modèle. Les algorithmes qui en résultent permettent aux artistes d'explorer l'interaction dynamique des éléments graphiques en fonction non seulement de leurs propres régularités de composition, mais aussi des régularités perceptives intrinsèques de ceux qui voient leur art. Nous terminons enfin ce cycle en révélant les dimensions compositionnelles cachées avec de l'encre et du papier, via des créations par traceur numérique.