Thèse soutenue

Entre cloître et université, la bibliothèque de Saint-Victor de Paris (fin XIIe - début XIVe siècle)

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Auteur / Autrice : Eve Defaÿsse
Direction : Cécile CabyCédric Giraud
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Histoire
Date : Soutenance le 15/04/2023
Etablissement(s) : Lyon 2
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences sociales (Lyon)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Histoire, archéologie, littératures des mondes chrétiens et musulmans médiévaux (Lyon ; 1977-....)
Jury : Président / Présidente : Isabelle Guyot-Bachy
Examinateurs / Examinatrices : Claire Angotti
Rapporteurs / Rapporteuses : Dominique Poirel, Dominique Stutzmann

Résumé

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L’abbaye de Saint-Victor de Paris, fondée en 1113, devient rapidement une abbaye influente. Son rayonnement spirituel est renforcé par son aura intellectuelle, née de son école, dirigée par de brillants maîtres renommés : Hugues de Saint-Victor et ses successeurs, Achard, Richard, André. Sa bibliothèque est un pilier de sa vie intellectuelle et spirituelle. Centre privilégié du savoir durant toute la période médiévale, elle est la plus grande bibliothèque de Paris jusqu’à la fondation de celle du collège de Robert de Sorbon, et elle continue d’être louée par les contemporains l’époque moderne. Une étude bibliothèque au Moyen Âge peut aider à comprendre l’histoire des pratiques intellectuelles à Saint-Victor à une période où on perd la trace de ces activités. En effet, après le départ du dernier maître enseignant, Thomas Gallus, en 1219, on connaît peu de choses de l’histoire intellectuelle de Saint-Victor.Une reconstitution diachronique de la bibliothèque est proposée, de la fondation de l’abbaye au milieu du XIVe siècle car on souhaite avant tout démontrer la continuité des pratiques intellectuelles des chanoines. On se concentre ainsi sur un « long XIIIe siècle » qui est celui de la naissance de l’université et de sa consolidation. Cette reconstitution est réalisée au moyen de l’étude codicologique d’un large corpus de manuscrit, ainsi que la structuration des informations réunies dans une base de données. Les ex-libris datables jusqu’au milieu du XIVe siècle ont été étudiés, classés et datés afin de donner une chronologie de ces inscriptions et d’identifier diverses pratiques bibliothéconomiques. Les dons de livres ont été analysés afin de comprendre la perception de Saint-Victor et de sa bibliothèque par les contemporains ; durant toute la période médiévale, la bibliothèque est perçue comme un lieu de référence de l’exégèse biblique. Enfin, les livres des Victorins vraisemblablement acquis par eux-mêmes (c’est à dire ceux qui n’ont pas été donnés par des externes à l’abbaye) ont été analysés dans les trois genres littéraires dominants : l’exégèse, la théologie, la prédication. La bibliothèque possède une large collection des commentaires bibliques d’Étienne Langton, car son exégèse découle de la tradition victorine ; un peu plus tard, il apparaît qu’Hugues de Saint-Cher a sans doute fait usage de la bibliothèque pour l’élaboration de la première partie de sa Postille ; enfin, les Victorins recherchent largement les nouveaux outils d’exégèse créés par les ordres mendiants. Dans le domaine de la théologie, l’abbaye est en retard dans la réception des Sentences de Pierre Lombard et de leurs commentaires, parce qu’ils se reposent encore largement sur les Sentences de leur ancien maître, Hugues, comme montré par les belles copies de ses travaux dans le second quart du XIIIe siècle. Les Victorins commencent à rassembler les textes en usage à l’université d’ici la fin du XIIIe siècle, alors qu’ils s’adaptent davantage au système d’enseignement et des grades – une idée confirmée par la réception de Thomas d’Aquin à partir des années 1320. L’adaptation au système universitaire et la poursuite des études et de l’enseignement a pour but la prédication. En tant que chanoines augustins, ils ont des devoirs d’administration des sacrements et de prédication. Les Victorins produisent des textes de prédication dans la fin du XIIe siècle, ainsi que des collections, centrées sur la prédication et la pénitence dans le premier quart du XIIIe siècle, se représentant ainsi comme des exemples de prêcheurs et de confesseurs. À travers le siècle, les Victorins recherchent les nouveaux outils auxiliaires à la prédication, ils composent des copies et se fournissent en collection de sermons de prédicateurs parisiens, issus de l’université et des ordres mendiants.