Thèse soutenue

Régulation tarifaire et incitations financières : Quels effets sur l'activité des médecins libéraux ?

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Auteur / Autrice : Aimée Kingsada
Direction : Sidartha GordonAnne-Laure Samson
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences Economiques
Date : Soutenance le 15/12/2022
Etablissement(s) : Université Paris sciences et lettres
Ecole(s) doctorale(s) : Ecole doctorale SDOSE (Paris)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire d’Economie de Dauphine (Paris) - Laboratoire d’Economie de Dauphine (Paris)
établissement opérateur d'inscription : Université Paris Dauphine-PSL (1968-....)
Jury : Président / Présidente : Alain Paraponaris
Examinateurs / Examinatrices : Sidartha Gordon, Anne-Laure Samson, Alain Paraponaris, Thomas Barnay, Carine Franc, Wanda Mimra
Rapporteurs / Rapporteuses : Alain Paraponaris, Thomas Barnay

Résumé

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En France, les médecins libéraux sont principalement payés à l'acte avec des tarifs fixés (pour les médecins de secteur 1) ou des dépassements d’honoraires (médecins de secteur 2). Ce mode de rémunération, qui, par définition, incite les médecins à multiplier les actes pour augmenter leurs revenus, impacte leurs comportements d'offre de soins. Il influence donc plus généralement l'organisation et l'efficience du système de santé. À partir de bases de données administratives et exhaustives de l’ensemble des médecins libéraux exerçant en France, cette thèse a pour objet de mieux comprendre comment les médecins réagissent lorsqu'ils font face à des modifications de leur rémunération. Plus particulièrement, lorsqu’un système de « paiement à la performance » est introduit en complément du paiement à l’acte (chapitre 1), ou lorsque la pratique des dépassements d’honoraires est interdite (chapitre 2) ou limitée (chapitre 3). Le paiement à la performance a été introduit en 2009 par le biais du « Contrat d’Amélioration des Pratiques Individuelles » (CAPI). Le premier chapitre montre que le CAPI a significativement infléchi les pratiques des médecins généralistes qui y ont adhéré dans un sens compatible avec une amélioration de la qualité des soins : contrairement à l'ensemble de leurs collègues, les adhérents du CAPI n’ont pas diminué le nombre de consultations par patient ni le montant des prescriptions par patient. Ils ont également augmenté, plus fortement que les autres, la proportion de leurs patients suivis en tant que médecin traitant. Finalement, le CAPI a conduit à une augmentation des honoraires perçus par patient, avec, en conséquence, un coût de prise en charge plus élevé pour la Sécurité sociale.Le deuxième axe de recherche s'intéresse principalement aux médecins spécialistes, qui sont souvent conventionnés en secteur 2 et peuvent ainsi pratiquer des dépassements d’honoraires. Ces dépassements, élevés et à la charge des patients, peuvent générer des inégalités dans l’accès aux soins. La première tentative de régulation de la pratique des dépassements d’honoraires est la réforme du « gel du secteur 2 », en 1990. À l’aide de régressions par discontinuité, le chapitre 2 évalue l’effet causal de cette régulation des tarifs. Il montre que les médecins spécialistes ayant une activité de nature plutôt « technique » augmentent fortement leur activité lorsqu’ils sont contraints d’exercer en secteur 1 et principalement leur activité technique. Les deux-tiers de ce surcroit d’activité sont associés à l’accueil de nouveaux patients, signe d’une amélioration de l’accessibilité aux soins ; le tiers restant est assimilable à des comportements stratégiques, visant à compenser la baisse de leurs tarifs par une augmentation du contenu des actes délivrés. En revanche, les spécialistes qui ont une activité principalement composée de consultations en cabinet n’ont pas de marge de manœuvre pour augmenter leur activité lorsqu’ils sont contraints d’exercer en secteur 1. Le chapitre 3 estime, à l’aide de différence de différences, l’effet causal de deux programmes d’incitations financières à la réduction de la pratique des dépassements d’honoraires et à l’amélioration de l’accès aux soins : le « Contrat d’accès aux soins » (CAS) introduit en 2013, remplacé par l’« Option Pratique Tarifaire Maîtrisée » (OPTAM) en 2017. Les résultats indiquent que la restriction de la pratique des dépassements a permis d’améliorer l’accès aux soins de la population ; l’OPTAM a cependant été plus efficace que le CAS. Les médecins spécialistes adhérant au CAS puis à l’OPTAM ont, parallèlement à la baisse de leurs tarifs, augmenté leur activité (nombre de consultations, actes techniques), en raison d’une augmentation du nombre de patients suivis, et en particulier d’une hausse du nombre de patients à bas revenus (bénéficiaires de la CMU-C). Cette amélioration à l’accès aux soins génère cependant un coût important pour la Sécurité sociale.