Thèse en cours

Faillite et arbitrage: Droit interne, international et comparé.

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Auteur / Autrice : Axel Mayombo
Direction : Éric Loquin
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Droit privé et sciences criminelles
Date : Inscription en doctorat le 01/10/2011
Etablissement(s) : Bourgogne Franche-Comté
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Droit, Gestion, Economie et Politique (Dijon ; Besançon ; 2017-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : CREDIMI - Centre de REcherche sur le DroIt des Marchés et des Investissements internationaux

Résumé

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S’il reste aujourd’hui encore assez mal perçu par une grande partie de l’opinion publique, l’arbitrage est pourtant un mode de résolution des différends connu de longue date et couramment usité par les acteurs de la vie économique, ce en raison de caractères et d’avantages prompts à satisfaire leurs attentes et exigences. S’étant particulièrement développé et enrichi au cours des dernières décennies; sous l’influence conjuguée d’un élan législatif bienveillant, d’une œuvre prétorienne favorable et audacieuse, et d’une jurisprudence arbitrale entreprenante et innovante ; l’arbitrage s’est imposé comme le mode ordinaire de règlement des litiges du commerce international et a acquis une place de choix au sein des pratiques alternatives à la justice étatique dans les conflits en matière interne. Sa ’’progression’’ n’a cependant pas été enregistrée sans résistance, sans opposition notamment d’autres branches du droit des affaires, ayant elles aussi connu un essor durant les cinquante dernières années. Pendant longtemps nombre d’entre elles n’ont laissé aucun droit de coexistence à l’arbitrage. Leurs rencontres débouchant sur le rejet de ce dernier, l’impossibilité pour lui de pouvoir en connaitre ! Elles étaient systématiquement soustraites à son appréhension en raison de ce qu’elles étaient porteuses d’ordre public. C’était du temps du règne de l’inarbitrabilité absolue des matières ayant un lien avec l’ordre public. Depuis, les considérations des législateurs et des juges étatiques ont beaucoup évolués. Il n’est plus radicalement proscrit à l’arbitrage de ’’pénétrer’’ bon nombre de disciplines du droit des affaires. Il lui est loisible de pouvoir connaitre de litiges qui les impliquent, de veiller à leur respect et de sanctionner leur violation. Il peut donc ’’cohabiter’’, exister concomitamment avec elles. Dans ces conditions l’enjeu tant législatif que jurisprudentiel (et doctrinal), a consisté, et consiste encore aujourd’hui, à démêler et préciser les termes, conditions et limites de leur coexistence. Ainsi en a-t-il été pour l’arbitrage et le droit des sociétés, le droit de la concurrence, le droit de la propriété industrielle, le droit de la faillite…Certaines de ces ’’associations’’ ont déjà été l’objet d’études de synthèse, fournies et détaillées. Dans le cadre de la présente, il s’agit d’expliciter et analyser la nature, l’étendue et les limites de la coexistence entre arbitrage et faillite. En clair, d’exposer et apprécier les contours de leur ’’cohabitation’’; tant du point de vue du droit interne que du droit international ; ce principalement en droit français, mais aussi suisse anglais, américain. L’arbitrage est une justice fondée sur la liberté et la volonté individuelle des personnes qui choisissent d’y recourir. Si ceux qui sont investis du pouvoir de la rendre exercent bien une mission juridictionnelle, celle-ci est d’origine privée et repose sur la conclusion d’une convention dite d’arbitrage. Ces juges, appelés arbitres, ne relèvent nullement d’un quelconque appareil judiciaire étatique, même si ils bénéficient de la ’’bénédiction’’ et du concours des Etats. L’on est clairement, en cette matière, dans la primauté de l’autonomie de la volonté, la prépondérance du pouvoir individuel, du libre choix ! Les règles qui en gouvernent le fonctionnement sont pour l’essentiel contenues ; en France, dans le Code de procédure civile ; en Angleterre et aux Etats-Unis, au sein d’Arbitration act ; et en Suisse dans le Concordat sur l'arbitrage du 27 mars 1969 et la loi sur le droit international privé; auxquelles s’ajoutent dans certains cas et sur certains points celles prévues par la convention de New York de 1958 pour la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères. Quant à la notion de faillite, il convient de retenir que par celle-ci nous entendons désigner les procédures de traitement judiciaire (et/ou administratif dans certains pays) des difficultés d’une entreprise débitrice, susceptibles d’être ouvertes à la suite d’un constat de son insolvabilité . Autrement dit, et pour emprunter les termes du Règlement communautaire CE n° 1346/2000 du 29 mai 2000 relatif aux procédures d’insolvabilités, nous visons sous ce vocable les « procédures collectives fondées sur l’insolvabilité du débiteur, qui entrainent le dessaisissement partiel ou total de celui-ci, ainsi que la désignation d’un syndic » ; et qui ont pour finalités d’assurer sa réorganisation ou sa liquidation ; leur déclenchement résultant généralement du prononcé d’un jugement dit d’ouverture. Il s’agit ; en France des procédures de Sauvegarde, Redressement et Liquidation judiciaire, prévues par le code de commerce ; en Angleterre de celles de Liquidation, Administration, Administrative receivership (cependant disparue en 2003), et Bankruptcy , régies par l’Insolvency Act de 1986 qu’à complété l’Enterprise Act de 2002 ; aux Etats-Unis , d’une procédure de réorganisation dénommée Chapter 11 et d’une procédure de liquidation communément appelée Chapter 7, prévues par le Bankruptcy Act ; et en Suisse, régies par la Loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, cela concerne une procédure concordataire et une autre dite de faillite. Ces dernières, à visée curative, plus que les autres procédures, organisent strictement le traitement collectif de la situation de l’entreprise débitrice en imposant des principes et normes impératives, tant de fond que de procédure, destinées à préserver l’intérêt général, lequel exige d’assurer la continuité de l’activité de l’entreprise, la sauvegarde de l’emploi, l’apurement du passif, l’intérêt du crédit…). Ainsi les pouvoirs et droits individuels des différents protagonistes (débiteur, créanciers, autres partenaires) se trouvent bouleversés, les contrats en cours affectés, le formalisme amplifié, le contentieux né et à naitre centralisé et soumis à un régime spécial…En cette matière-là, règne l’impérativité, la soumission à une discipline d’ensemble, la limitation du pouvoir et des initiatives individuelles. On le voit, les logiques internes des disciplines que le thème de notre étude rapproche apparaissent aux antipodes l’une de l’autre. On ne s’étonnera dès lors pas que leur rencontre « ne manque pas de tonus », qu’elle suscite « an inevitable clash » et que l’on observe que leurs « rapports (…) n’ont jamais été sereins », alors même que la fréquence de leurs contacts est allée s’accroissant! A propos, ceux-ci sont rendus possibles par la présence d’une ou plusieurs clauses d’arbitrage au sein des relations contractuelles liant une entreprise sujette à une procédure de faillite à un ou plusieurs de ses créanciers. Reste à préciser le sens de ces rapports ! Qu’arrive-t-il donc lorsqu’un arbitrage rencontre une faillite ? Les relations entre les deux disciplines sont-elles réciproques ? L’arbitrage a-t-il une incidence sur la faillite tout autant que celle-ci a des effets sur lui ? Nous verrons que comme la faillite est porteuse d’intérêts supérieurs pour la société, il lui est consenti le droit d’exercer une sorte ’’d’impérialisme’’. Partant, elle va ’’imposer sa loi’’ à l’arbitrage. Il s’agira alors pour nous de voir dans quelle mesure, drapée de ce ’’droit à l’impérialisme’’, la faillite impacte l’arbitrage. De prime abord on observera que cet impact est susceptible d’être apprécié sous deux principaux axes : celui de la compétence de la juridiction arbitrale et celui du déroulement de l’arbitrage. Ceci entendu, les questions fondamentales se dégagent aisément. La survenance d’une procédure de faillite annihile-t-elle la compétence éventuelle de juridictions arbitrales ? ; empêche-t-elle le recours à l’arbitrage pour connaître et trancher les litiges auxquels est partie l’entreprise en faillite ? Affecte-t-elle l’instance et le résultat de l’arbitrage ? Pourquoi et comment? L’arbitrage peut-il être d’un apport dans le traitement d’une faillite ? Est-il économiquement et pratiquement toujours opportun de recourir à l’arbitrage lorsque un des protagonistes à l’instance est soumis à une procédure de faillite ? Et qu’en est-il du risque d’instrumentalisation d’une des disciplines par l’autre ? Ces interrogations revêtent un intérêt pratique indéniable pour les entreprises, soumises à des procédures de faillite ; signataires de conventions d’arbitrage, ou désireuses d’en souscrire ; de même que pour leurs créanciers et partenaires. Mais aussi pour les praticiens, tant de l’arbitrage que de la faillite, arbitres et juges étatiques appelés à y être confrontés. Pour leur élucidation, la thèse étudie successivement les rapports entre survenance d’une faillite et compétence arbitrale (I), existence d’une faillite et déroulement de l’arbitrage (II).