Thèse en cours

Le Palais des doges de Venise à l'époque moderne (1595-1625). La conclusion d’un grand chantier
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Auteur / Autrice : Nicolas Moucheront
Direction : Pascal Dubourg GlatignyMario PianaElisabetta Molteni
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Sciences, savoirs, technologies: histoire et société
Date : Inscription en doctorat le 30/01/2018
Etablissement(s) : Paris, EHESS en cotutelle avec Università Iuav di Venezia
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de l'École des hautes études en sciences sociales

Résumé

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Les formes gothiques du Palais des doges de Venise se mettent en place à partir de 1340 et les travaux se poursuivent sans solution de continuité durant les derniers siècles du Moyen Âge et pendant toute la Renaissance. L’édifice acquiert ses formes actuelles vers 1625 et n’a depuis plus connu que des chantiers de restaurations. Cette thèse en histoire de l’architecture analyse la phase conclusive de ce processus constructif afin de comprendre comment et pourquoi à partir de 1595 ce grand chantier s’achève. Les dynamiques de financement des travaux publics à Venise sont dans un premier temps inscrites dans une perspective de longue durée analysant le rôle de l’Office du sel dans l’amortissement de la dette publique entre le Moyen Âge et l’époque moderne. Cette étude permet de reparcourir à l’aide de la bibliographie disponible les principales étapes de construction du Palais des doges et de reprendre sur le plan financier l’étude de quelques grands chantiers vénitiens de la fin du XVIe siècle tels que la construction du pont du Rialto ou de l’église du Rédempteur. L’analyse du rôle institutionnel de l’Office du sel est dans une seconde partie confrontée à la conjoncture politique que traverse la République de Venise au moment de la crise de l’Interdit. Des recherches biographiques portant sur la commande publique et privée des différents doges qui se succèdent entre 1595 et 1625 sont développées avec un intérêt particulier pour les représentants respectifs des vecchi favorables au pape et de leurs antagonistes, les giovani, Marino Grimani et Leonardo Donà. Des recherches dans des archives de la République et de la famille ont également été accordées au parcours exceptionnel d’Antonio Priuli entre Padoue et Paris. Il conduit en effet tant que Réviseur de tous les lieux de la cour du Palais des doges de 1601 à 1614 les transformations de l’édifice puis relance les travaux lorsqu’il monte sur le trône ducal entre 1618 et sa mort en 1624. Pendant toute cette période, le charpentier Bartolomeo Manopola dirige le chantier en tant que proto de l’Office du sel. Une analyse détaillée est accordée à l’organisation de son entreprise familiale de construction associant tailleurs de pierres, charpentiers et maçons. Les relations entre la fabrique publique et des personnages de premier plan tels que le tailleur de pierre Giovanni Grapiglia, l’architecte Vincenzo Scamozzi ou le marchand d’art Daniel Nijs sont également développées en croisant une analyse des réseaux des commanditaires, des détails de l’architecture et de la comptabilité du chantier. Cette micro-histoire de l’infrastructure productive du chantier sert de support à une analyse de la suprastructure, c’est-à-dire des transformations architecturales que connaît le Palais des doges entre 1595 et 1625. Après avoir interprété à la lumière des rapports de force internes au chantier le programme fonctionnel qui se définit progressivement pour les salles réaménagées au rez-de-chaussée de l’édifice et dans les loges, les représentations du pouvoir sur la façade dite de l’horloge et dans la nouvelle salles des banquets sont analysées en regard de la situation politique qui se dégrade avec la guerre de Gradisca et devient explosive au moment de l’avènement d’Antonio Priuli en 1618 avec la conjuration Bedmar. Un chapitre d’ouverture replaçant le processus de modernisation du Palais des doges dans les cycles de transformation que connaissent à la même époque les autres sièges du pouvoir vénitien dans les villes du Stato da Terra et da Mar permet enfin de saisir la fonction politique qu’assume projet d’architecture dans une République. Le palais public sont des représentations du pouvoir sophistiquées dont les processus de transformations matérielles servent de support à de complexes négociations permettant de dépasser des moments de crises politiques.