S’engager à distance : les mobilisations pro-ukrainiennes en France (2013-2021)
Auteur / Autrice : | Hervé Amiot |
Direction : | William Berthomière, Yann Richard |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Geographie |
Date : | Soutenance le 13/12/2023 |
Etablissement(s) : | Bordeaux 3 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Montaigne-Humanités (Pessac, Gironde ; 2007-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Passages (Pessac, Gironde ; Pau ; Talence, Gironde) |
Jury : | Président / Présidente : Bénédicte Michalon |
Examinateurs / Examinatrices : Lydia Coudroy de Lille, Étienne Piguet | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Serge Weber, Ioulia Shukan |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
Convois humanitaires, collectes de matériels pour l’armée, manifestations publiques : l’invasion russe de février 2022 a entraîné d’importantes mobilisations des populations ukrainiennes immigrées à travers le monde. Celles-ci ne sont toutefois pas nouvelles, et trouvent en partie leurs racines huit ans auparavant, au moment de l’Euromaïdan, de l’annexion de la Crimée et du début de la guerre du Donbass. Cette thèse se penche sur les mobilisations pro-ukrainiennes en France dans le cadre du « premier » conflit russo-ukrainien, sur une période allant de la fin 2013 (début de l’Euromaïdan) à la fin 2021 (veille de la guerre à grande échelle). Inscrite à la croisée des travaux sur le transnationalisme migratoire et de la géographie des mobilisations, elle substitue la problématique de la distance à celle de l’origine : pourquoi et comment des individus - qu’ils soient immigrés ou non - s’engagent-ils pour des enjeux politiques qui se situent à distance de leurs espaces vécus ? Une méthodologie mixte, mêlant outils qualitatifs (observations, entretiens biographiques) et quantitatifs (enquête par questionnaire) sur un terrain multisitué (quatre villes françaises et trois villes ukrainiennes) permet de dépasser les approches en termes de contextes politiques (nationaux) structurant l’action. Elle met en évidence la façon dont la géographie des espaces vécus des personnes enquêtées – c’est-à-dire les espaces qu’elles pratiquent régulièrement, l’espace de leurs relations sociales et les espaces auxquels elles sont attachées – oriente la politisation de ces dernières et fournit des ressources à l’action politique et humanitaire. Je montre que la conjoncture critique de 2014 a déclenché une mobilisation qui a dépassé le strict cadre de l’immigration ukrainienne. Cette mobilisation a eu un impact inégal sur les aspects humanitaires et diplomatiques du conflit russo-ukrainien, mais une influence durable sur les personnes engagées : elle a créé une « communauté transnationale pro-ukrainienne », qui constitue une force importante de changement social en Ukraine et à l’étranger, en particulier dans sa capacité à diffuser un nationalisme anticolonial, fondé sur la séparation radicale entre les peuples ukrainien et russe. D’un point de vue théorique, la thèse relativise l’exceptionnalité de l’engagement dit « diasporique », en montrant que l’action politique des immigrés et de leurs descendants suit des mécanismes communs à tous les mouvements sociaux. D’un point de vue empirique, elle donne une profondeur historique aux mobilisations face à la guerre de 2022.