Thèse soutenue

Résister à l'hétérosexualité en Corée du Sud. Parcours genrées de femmes queer entre elles (depuis 2016)
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Auteur / Autrice : Marion Gilbert
Direction : Alain DelissenÉric Fassin
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sociologie
Date : Soutenance le 25/05/2021
Etablissement(s) : Paris, EHESS
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de l'École des hautes études en sciences sociales
Jury : Président / Présidente : Sylvie Tissot
Examinateurs / Examinatrices : Sylvie Tissot, Catherine Achin, Kyung-mi Kim, Hui-Yeon Kim
Rapporteurs / Rapporteuses : Sylvie Tissot, Catherine Achin

Mots clés

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Résumé

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En 2016, une femme est tuée par un homme dans des toilettes publiques du quartier de Gangnam, à Séoul. Aux policiers, le meurtrier répond qu’il a voulu tuer une femme parce qu’il les hait. Par leur socialisation primaire, les femmes sont censées incorporer, avec une norme hétérosexuelle basée sur la division sexuelle, l’évidence de la domination masculine. Cette affaire juridico-médiatique fonctionne comme un rappel à l’ordre sexuel pour celles qui oseraient remettre en cause leur rôle traditionnel. Ce travail de sociologie qualitative repose sur une enquête de terrain menée pendant huit mois à Séoul en 2018 et 2019. Il étudie comment certaines jeunes femmes sud-coréennes luttent pour la reconnaissance et la visibilité de leur identité homosexuelle tandis que d’autres femmes résistent à l’hétérosexualité en s’auto-identifiant à la même catégorie : queer. À travers une trentaine d’entretiens semi-directifs retraçant les parcours de femmes homosexuelles et de femmes non-homosexuelles, il met en évidence que l’identité queer n’est pas toujours une question de sexualité. En effet, la prépondérance de la famille tend à assigner les femmes à une classe de sexe qu’elles rejettent désormais. La prise de distance avec l’hétérosexualité se fait par l’identification soit à une catégorie traditionnelle d’orientation homosexuelle, soit à de nouvelles catégories de genre (fluide, non binaire, agenre) et d’orientations sexuelles (pansexuel·le, homoromantique). Ce sont autant de manières de résister à la contrainte de relations amoureuses hétérosexuelles, qui passe par le mariage et la procréation. L’identité queer est utilisée de façon subversive par des femmes résolument queer – en termes de genre sinon de sexualité. Les femmes non-homosexuelles rencontrent les femmes homosexuelles sur des réseaux sociaux, où elles apprennent les codes d’identités non-hétérosexuelles avant de se fréquenter dans des cafés, des bars, des clubs lesbiens interdits aux hommes, en pleine expansion depuis la fin des années 2010 à Séoul. La précarité des femmes lesbiennes les pousse à établir des stratégies de résilience. Les combats lesbiens et anti-hétérosexualité se mélangent. A l’unisson, les femmes non-hétérosexuelles demandent la création d’un partenariat reconnu légalement pour les personnes de même sexe, le vote d’une loi anti-discrimination. La thèse montre comment, entre femmes, elles développent des stratégies pour vivre en dehors de l’hétérosexualité, à travers des réseaux de solidarité qui passent par une économie lesbienne et des familles féminines.