Thèse soutenue

Vivre sans abri au XXI siècle : une ethnographie sensible de l’urgence sociale à Marseille

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Auteur / Autrice : Carlotta Magnani
Direction : Yannick Jaffré
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Anthropologie sociale et ethnologie
Date : Soutenance le 04/12/2023
Etablissement(s) : Paris, EHESS
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de l'École des hautes études en sciences sociales
Jury : Président / Présidente : Bertrand Bergier
Examinateurs / Examinatrices : Bertrand Bergier, Sophie Arborio, Eleonora Canepari, Cyril Farnarier, Godefroy Lansade
Rapporteurs / Rapporteuses : Bertrand Bergier, Sophie Arborio

Mots clés

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Résumé

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À Marseille, chaque année, des milliers de personnes connaissent une situation de sans-abrisme et ont recours aux services d’aides pour satisfaire leurs besoins fondamentaux de survie. Chaque soir, des centaines d’hommes et des dizaines de femmes s’adressent aux hébergements d’urgence pour le temps de la nuit, tandis que d’autres restent dans la rue ou des abris de fortune. En dépit des déploiements de ressources toujours plus importantes, le système de l’urgence sociale, dont les accueils de jour et de nuit constituent les piliers, ne parvient jamais à réabsorber la demande. Fondée sur une enquête ethnographique menée à Marseille, cette thèse adopte une approche multidisciplinaire pour explorer les multiples facettes de ce phénomène complexe. Son objectif principal est de comprendre comment les personnes sans-abri interagissent quotidiennement avec leur environnement socio-affectif et comment elles cherchent à se maintenir, au niveau corporel et identitaire, malgré les difficultés rencontrées. La compréhension de leurs manières d’être, de leurs représentations et de leurs raisons d’agir nous permet d’établir des comparaisons entre leurs propres catégories de l’expérience et celles mobilisées par les politiques sociales qui leur sont adressées. Des facteurs socio-symboliques, moraux et épistémologiques façonnent aussi bien les représentations que les possibilités d’existence des personnes sans abri. L’analyse quantitative, combinée à une approche phénoménologique des expériences professionnelles, éclaire les enjeux liés aux définitions et l’impact des facteurs socio-économiques et culturels globaux et locaux sur l’évolution de ces populations. La description de l’agencement des services d’aide dans le tissu urbain local permet de comprendre les facteurs matériels, temporels et relationnels qui façonnent le contexte de vie des personnes sans-abri. La deuxième partie de cette thèse est consacrée à l’identification, la description et l’analyse des catégories affectives et morales à travers lesquelles les personnes conceptualisent leurs expériences. Elle démontre de quelles manières les attentions portées au corps, soubassement de l’être bien ou mal, se définissent selon des repères à la fois organiques et normatifs. Elle examine également comment les conceptions et les usages des catégories relatives à la souillure et aux craintes de contamination participent au maintien de soi en tant qu’être social. Dans l’analyse des processus de socialisation, la discussion aborde les concepts de désocialisation et ses évolutions, ainsi que l’inscription des jeunes adultes dans des trajectoires de délinquance. Enfin, l’argumentation se conclut en décrivant les modalités de relations et les formes de solidarité, qui permet de comprendre les agencements et les ressorts de la violence.