Ce que l'impôt ne peut acheter : philosophie politique de la « mobilisation fiscale pour le développement », à partir du cas togolais
Auteur / Autrice : | Laetitia Citroën |
Direction : | Jean-Philippe Pierron, Cécile Renouard |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Philosophie mention éthique, politique et droit |
Date : | Inscription en doctorat le 01/10/2014 |
Etablissement(s) : | Lyon 3 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale de philosophie (Lyon ; Grenoble ; 2007-....) |
Mots clés
Mots clés libres
Résumé
Le concept de « développement » présente un déficit démocratique, particulièrement quand on le pense par l’impôt. La « mobilisation fiscale pour le développement », prônée par les Agences d’aide, pourrait apparaître comme un progrès (fin de la dépendance à l’aide, « développement endogène », souveraineté économique). Pourtant, l’impôt est-il un outil de justice sociale ? Symbole du vivre-ensemble et de la solidarité nationale, il fait aussi l’objet de craintes, pour des raisons passées (idéologie fiscale coloniale) et présentes (opacité des affaires publiques au Togo, pouvoir « mystique » de l’État). L’approche philosophique délaissera la réflexion sur les moyens (économiques ou juridiques), pour remettre en question deux présupposés. 1/ « Mobiliser » la population dans un effort commun pour le « développement » rappelle les heures sombres du Parti Unique ; est-il légitime de « mobiliser » en démocratie ? Ne faut-il pas défendre le pluralisme, et même le dissensus, plutôt que la vérité unique du « développement », et de l’État en général ? L’esprit démocratique remet en question la parole des puissants, et s’autorise l’irrévérence, y compris à l’égard de l’impôt. Un impôt n’est-il légitime que s’il est contesté et contestable ? Et peut-on mettre en commun, même sans unifier ? 2/ « Développement » comme « impôt » renvoient à des dimensions économiques, qui ne peuvent suffire à créer du lien social. Ils enferment la pensée dans une logique d’achat et dans une vision libérale, appauvrie, des relations humaines. C’est ailleurs, dans une « logique de surabondance », dans une ouverture éthique à autrui, dans la reconnaissance d’une dette sociale, que se nouent les liens sociaux – autant de choses qui débordent les attributions de la comptabilité nationale. La réticence à payer des impôts dénote un désintérêt préoccupant pour l’appartenance commune, mais l’impôt est impuissant à acheter le retour des individus vers la pensée du collectif, tandis que la pression de l’Etat pour forcer cette harmonie sociale est contreproductive, et illégitime. La fiscalité pose donc la question de la construction du « nous », sans en apporter la réponse.