Thèse en cours

L’incorporation des habitus : de l’inertie à la puissance d’agir. Bourdieu avec Spinoza.

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Auteur / Autrice : Cécile Hellian
Direction : Frédéric Lordon
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Philosophie et sciences sociales
Date : Inscription en doctorat le 06/11/2020
Etablissement(s) : Paris, EHESS
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de l'École des hautes études en sciences sociales

Résumé

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Comment penser l’incorporation actuellement, sans revenir sur la genèse du concept de corps, constitué comme objet d’étude porteur d’une histoire scientifique ? Comme l’indiquait Bourdieu, de nombreux problèmes sont posés lors de la genèse d’un événement historique, ils font par la suite l’objet d’une amnésie, et sont enfin redécouverts tardivement. Cette étude se propose d’appliquer à la pensée de Bourdieu sur l’incorporation la méthode qu’il élaborait dans Sur l’Etat, qui consistait à sortir des oppositions pour penser la genèse historique de ses objets pour en proposer une définition. Cette démarche, appliquée au problème de l’incorporation suppose une relecture à l’aune des concepts qui ont été forgés au XVIIe siècle, période où la pensée de l’union de l’âme et du corps et leurs rapports aux institutions fût au centre des préoccupations philosophiques. Situés dans une perspective bourdieusienne, nous remobiliserons une philosophie parvenue à joindre l’analyse des effets des institutions sur les hommes et des rapports entre le corps et l’esprit. Or la problématisation la plus féconde de cette reformulation se situe dans l’œuvre de Spinoza. Notre propos part du constat de l’absence de conceptualisation de l’incorporation chez Bourdieu pour, en s’appuyant sur les pistes qu’il a néanmoins formulées à ce sujet, comprendre que Bourdieu n’a pas choisi la voie d’une radicalisation du déterminisme en sciences sociales. Il maintient ainsi une opposition entre le corps et l’esprit, et en tentant de s’opposer au pouvoir de l’esprit sur le corps, il en vient, comme Pascal, à supposer une force du corps sur l’esprit. Penser les possibilités de désapprendre par corps le discours porté par les institutions, nécessite le recours aux formulations de ce problème par Spinoza. Conceptualiser la possibilité des corps de s’affecter collectivement par le langage en gagnant en puissance d’agir – par la modification des enchaînements des images dans le corps – à travers l’ontologie spinozienne, qui défend l’unité du corps et de l’esprit, peut permettre de forger une pensée de l’incorporation traduisible dans les coordonnées des sciences sociales contemporaines.