Thèse soutenue

Compréhension de la dynamique spatiale et temporelle de populations d'holothuries à La Réunion : facteurs génétiques, alimentaires et environnementaux

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Auteur / Autrice : Joséphine Pierrat
Direction : Helene MagalonPatrick Frouin
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Biologie marine
Date : Soutenance le 23/06/2023
Etablissement(s) : La Réunion
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences, Technologies et Santé
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Écologie marine tropicale des océans Pacifique et Indien (Réunion)
Jury : Président / Présidente : Johann Henrich Bruggemann
Examinateurs / Examinatrices : Jérôme Delroisse
Rapporteurs / Rapporteuses : Annie Mercier, Nadia Améziane-Cominardi

Résumé

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Les récifs coralliens de La Réunion comptent environ 40 espèces d'holothuries dont trois (Holothuria atra, Holothuria leucospilota et Stichopus chloronotus) sont dispersées, avec des densités très élevées (> 1 ind.m²) par endroits. L'objectif de l’étude était de comprendre les facteurs génétiques, alimentaires et environnementaux à l'origine de cette distribution hétérogène dans l'espace et le temps. Des échantillons ont été collectés sur les récifs de l’Hermitage/La Saline et de l’Etang-Salé, de l'hiver 2019 à l'hiver 2021. Les individus ont été génotypés à l'aide de marqueurs microsatellites. La richesse clonale de H. atra et H. leucospilota étaient maximale (R = 1), impliquant un mode de reproduction principal de type sexué. La structure génétique des populations de H. leucospilota était homogène, probablement en raison de flux larvaires réciproques. La richesse clonale de S. chloronotus était plus faible (R = 0,24), induisant un rôle prépondérant de la reproduction asexuée pour cette espèce. Une faible connectivité a été trouvée à l'échelle intra-récifale uniquement. L’évolution spatio-temporelle de la densité, de saisons en décennies, montre que les populations d'H. leucospilota semblent désormais stables, à densités élevées, alors que celles d'H. atra et de S. chloronotus ont diminué depuis deux ans. Les variations de longueur des individus correspondaient au principal mode de reproduction identifié pour chaque espèce. Peu de corrélations ont été trouvées entre caractéristiques sédimentaires et densité des holothuries. Le taux et la vitesse d'ingestion étaient les plus élevés chez S. chloronotus, suggèrant qu’elle ingère plus de sable pour se nourrir, en couvrant une plus grande surface pour satisfaire ses besoins nutritifs. Cette espèce semble donc être spécialiste alors que les deux autres peuvent être considérées plutôt comme généralistes. Les analyses de métabarcoding ont permis d'identifier plus de 28 000 ASV dans le régime alimentaire des concombres de mer. La structure du bactériobenthos a montré des variations spatio-temporelles significatives, les phyla dominants étant Planctomycetota, Pseudomonadota et Cyanobacteria. Les fractions ingérées et assimilées étaient très variables selon les espèces, les saisons et les sites. Les Pirellulales ont été les plus assimilées par les trois espèces. Les Shingomonadales et les Spirochaetales principalement assimilées par H. atra, les Spirochaetales et les Chloroplastes par H. leucospilota, et les Shingomonadales et les Rhodobacterales par S. chloronotus. Deux nouveaux biomarqueurs liés aux dommages oxydatifs des protéines (l'activité du protéasome et le niveau des produits finaux oxydatifs avancés) ont été comparés au biomarqueur acétylcholinestérase dans les tissus. Ils ont révélé un stress physiologique le plus élevé chez H. leucospilota. Cependant, celui-ci pourrait être considéré comme relativement faible car les niveaux d'acétylcholinestérase étaient plus élevés qu'en 2005, signifiant une possible diminution de la pollution du récif par les pesticides depuis cette date. Une quantification directe des pesticides reste nécessaire. Holothuria leucospilota est à la fois sensible et résistante, capable de présenter une large gamme de valeurs pour un biomarqueur, mais possède des populations prospères. L’espèce H. leucospilota pourrait être considérées comme une indicatrice de la pollution par les pesticides. En conclusion, la distribution inégale de S. chloronotus pourrait s'expliquer par la reproduction asexuée plutôt que par la qualité de l'alimentation bactérienne. Les distributions de H. atra et H. leucospilota n'ont pu être liées à aucun patron particulier de communautés bactériennes, ni à aucun facteur environnemental évalué dans cette étude. De futures études devraient se concentrer sur le phénomène d'attraction conspécifique et sur d’autres fractions du régime alimentaire des holothuries, telles que les microalgues ou les bactéries de la colonne d'eau.