Approche épidémiologique et bioclinique des troubles du comportement alimentaire chez l'enfant.
Auteur / Autrice : | Valérie Bertrand |
Direction : | Pierre Déchelotte, Marie-Pierre Tavolacci |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sciences de la vie et de la sante |
Date : | Soutenance le 06/03/2023 |
Etablissement(s) : | Normandie |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Normande de biologie intégrative, santé, environnement (Mont-Saint-Aignan, Seine-Maritime) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Nutrition, Inflammation et axe Microbiote-Intestin-Cerveau (Rouen ; 2012-...) - Nutrition, Inflammation et axe Microbiote-Intestin-Cerveau |
Établissement de préparation : Université de Rouen Normandie (1966-....) | |
Jury : | Président / Présidente : Noël Peretti |
Examinateurs / Examinatrices : Pierre Déchelotte, Marie-Pierre Tavolacci, Noël Peretti, Nathalie Godart, Ludovic Gicquel, Dominique Turck |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
Les troubles des conduites alimentaires (TCA) de l’adulte et de l’adolescent sont bien connus depuis les années 1980, mais il a fallu attendre les années 1990 pour que les troubles d’oralité (TO) et les TCA de l’enfant soient étudiés spécifiquement, et soient intégrés à la classification américaine des troubles mentaux (DSM-5) en 2013. Actuellement les professionnels de l’enfance connaissent bien les TCA de l’adolescent (essentiellement pris en charge par des pédopsychiatres), et les troubles d’oralité du nourrisson (pris en charge par des pédiatres), mais il semble que les TCA de l’enfant soient encore assez méconnus des professionnels de soins primaires et secondaires, et donc peu pris en charge. L’objectif de la thèse était donc dans un premier temps de faire une étude prospective non interventionnelle en population générale pour évaluer la prévalence et la prise en charge de ces troubles (étude PEDIANUT), puis dans un deuxième temps de faire une étude rétrospective d’une cohorte déjà constituée de TO-TCA (étude PEDIAFED).L’étude PEDIANUT, en utilisant la classification DSM-5 chez 401 enfants âgés de 0 à 18 ans interviewés avec leur famille, a permis de montrer que les Avoidant and Restrictive Food Intake Disorder (ARFID) et les Unspecified Feeding and Eating Disorders (UFED) sont probablement plus fréquents en pédiatrie que des TCA plus connus comme l’anorexie et la boulimie ; et qu’ils sont peu pris en charge. La prévalence des ARFID dans notre étude était ainsi de 3% [95%CI (1.7-5.1)], et celle des UFED de 9.7% [95%CI (7.2-13.0)]. Seuls 15.2% des enfants étaient pris en charge par un professionnel, alors que 87.8% des familles étaient inquiètes, ce qui suggère un manque de connaissances de ces troubles par les professionnels. Une étude ancillaire exploratoire de cette même cohorte a analysé les facteurs associés aux traits d’appétit de ces patients (profil normal, petit mangeur, gros mangeur, problématique ou non) : on retenait surtout comme associations peu décrites et étudiées dans la littérature le fait que les gros mangeurs problématiques étaient associés à la présence de troubles sensoriels, et que les petits mangeurs (1-6ans) étaient associés à un retard de langage (p<.05), ce qui peut constituer des pistes de recherche intéressantes.L’étude PEDIAFED a permis de comparer 2 cohortes de TO-TCA selon 2 recrutements gastropédiatrique (n=100) et pédopsychiatrique (n=91), chez 191 enfants âgés de moins de 12 ans. Cette cohorte comprenait 100 ARFID, 57 UFED, 33 anorexie mentale à début précoce (AMDP), 1 pica/ rumination. Les ARFID étaient associés aux troubles sélectifs et sensoriels ; et présentaient plus de troubles anxieux et de douleurs abdominales récurrentes que les UFED (p<.001). Les UFED avaient plus de maladies chroniques, refus des morceaux, troubles du langage (p<.05). Les AMDP étaient référées exclusivement aux psychiatres, étaient plus souvent dénutries, de sexe féminin, en dépression (p<.001). La cohorte de gastroentérologie comprenait plus d’UFED et de maladies chroniques, alors que celle de psychiatrie comprenait plus de comorbidités psychiatriques (p<.05). Les ARFID avaient une moins bonne évolution clinique (p<.001). Cette étude montrait que 25% des enfants avaient à la fois des comorbidités digestives et psychiatriques, ce qui suggère dans cette tranche d’âge la nécessité d’une approche pluridisciplinaire.Ainsi ces travaux montrent la nécessité de former les professionnels au dépistage des TCA de l’enfant. Il faudrait mieux définir les sous-types d’UFED, très fréquents en pédiatrie, et les FED en général selon les comorbidités associées (psychiatriques, maladies chroniques). Nous abordons également dans cette thèse des pistes de recherche (microbiote/ARFID) et essais thérapeutiques (cyproheptadine/ARFID). Une vision transdisciplinaire des FED permettra d’améliorer ces objectifs de recherche.