Thèse soutenue

S’exposer en inquiétude. Le sujet fait et défait avec les médiations nouvelles sur sa santé

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Auteur / Autrice : François Romijn
Direction : Laurent ThévenotNathalie Zaccaï-Reyners
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sociologie
Date : Soutenance le 24/04/2018
Etablissement(s) : Paris Sciences et Lettres (ComUE) en cotutelle avec Université libre de Bruxelles (1970-....)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de l'École des hautes études en sciences sociales
Partenaire(s) de recherche : établissement de préparation de la thèse : École des hautes études en sciences sociales (Paris ; 1975-....)
Jury : Président / Présidente : Nicolas Dodier
Examinateurs / Examinatrices : Nicolas Dodier, Mathieu Berger, Fabrizio Cantelli, Jean-Louis Genard, Laurence Kaufmann

Résumé

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L’être humain est de plus en plus souvent inscrit dans des contextes où lui est accessible un savoir nouveau sur sa vie biologique (e.g., gènes, épigénome, neurones, microbiote). À portées de mains ou de clics, des médiations toujours plus nombreuses (e.g. tests génétiques prédictifs en matière de santé ; « récréatifs », relatifs à l’« ancestralité biogéographique », microbiote intestinal ou à l’« âge épigénétique » ; applications dites de « self-tracking ») mettent l’usager en relation avec des formats d’information de plus en plus diversifiés (e.g., SNP’s, diagnostics, probabilités exprimées sous forme de pourcentages de développer des maladies ou d’autres conditions : réponses de l’organisme à certains pathogènes et molécules, résistance à certaines pathologie, et d’autres propriétés qui seraient influencées par la génétique, comme la longévité ou les facultés cognitives). La découverte de ces données biologiques éprouve la personne et la confronte à de nouvelles inquiétudes qu’elle doit traverser.Menée sur base de trois terrains situés dans le champ de la santé (consultation médicale, usage du web en matière de santé, et usage d’auto-tests tests génétiques), cette recherche contribue à la compréhension de ce phénomène de société. Elle s’applique en particulier à préciser la variété des façons dont la personne intègre ces données nouvelles qui s’accompagnent d’une prétention à un réalisme fort. Dans certains cas, ces technologies fournissent à l’individu une image objectivante de son « identité ». L’approche préconisée s’articule à un questionnement anthropologique singulier : Comment la personne s’arrange-t-elle de situations dans lesquelles elle est mise en relation non plus seulement avec d’autres humains mais au premier titre avec des données objectivantes relatives à son intériorité biologique ? Cette question anthropologique invite à porter au moins autant d’attention à ce qui nous relie à autrui et à notre environnement (deux questions classiquement situées au cœur du projet de la sociologie), qu’aux façons dont l’humain assure une continuité avec lui- même dans des situations où le vivant pose question. Cette recherche démontre que la conduite effectivement adoptée par les usagers des trois médiations examinées est irréductible à l’attente d’autonomie souvent promue comme prise en charge de sa santé relevant d’un plan d’action orienté vers un but à atteindre. Soutenue par des outils sociologiques qui sous-tendent une conception plurielle du sujet et de l’action, cette recherche attire l’attention sur des dynamiques peu traitées dans les sciences sociales de la santé. L’examen attentif du maintien du sujet mis à l’épreuve de ces nouveaux savoirs jette une lumière nouvelle sur l’habileté de l’humain à évoluer entre une pluralité de positions, de définitions de ce qu’il se passe et/ou de qui il est afin de s’arranger de ces découvertes qui insécurisent son état de sujet. Plutôt que de considérer le caractère ambivalent, équivoque et parfois carrément ambigu de la conduite de l’usager comme un échec de l’analyse, ce travail contribue à une approche de la composition dans le rapport à soi et à autrui.