Thèse soutenue

Les Antigones espagnoles : modalités esthétiques et idéologiques des reprises de la figure mythique, de la Guerre Civile à la Transition

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Auteur / Autrice : Fanny Blin
Direction : Dominique Breton
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Études ibériques et ibéro-américaines
Date : Soutenance le 22/09/2017
Etablissement(s) : Bordeaux 3
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Montaigne-Humanités (Pessac, Gironde)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : AMERIBER-Amérique latine, Pays ibériques (Pessac, Gironde)
Jury : Président / Présidente : Isabelle Reck
Examinateurs / Examinatrices : Dominique Breton, Carole Egger, Manuel Aznar Soler, Stéphanie Urdician, Begoña Riesgo
Rapporteurs / Rapporteuses : Isabelle Reck, Carole Egger

Résumé

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En réponse au traumatisme de la division nationale suscitée par la guerre civile et cristallisée pendant le franquisme, la figure d’Antigone resurgit avec force dans la dramaturgie espagnole. Le parcours de résistance de cette héroïne grecque devient, sous la plume des auteurs espagnols du XXème siècle, l’emblème de la « juste mémoire » (Ricœur, 2000). Partant de l’hypothèse que le corpus des Antigones espagnoles constitue un ensemble relevant d’une dynamique commune de relecture de l’histoire, cette thèse recherche, à travers un travail comparatif des structures et des symboliques, la cohérence des versions catalanes, galiciennes et castillanes, de l’exil comme de l’intérieur, pour la période comprise entre 1936 et 1989. Dix-huit pièces sont ainsi mises en perspective pour démontrer la conquête de discours mémoriels et compensatoires à partir des sources hypotextuelles que constituent la tragédie de Sophocle, mais aussi les autres versions théâtrales du mythe. La première partie examine les procédés de réécriture du mythe, de l’histoire et de la tragédie, pour qualifier les pièces et déterminer un éventuel noyau mythique ou un schéma référentiel récurrent. La notion de « (re)configurations contemporaines » au prisme du contexte politique émerge alors pour désigner les objets de ce travail. La deuxième partie analyse les convergences esthétiques et les motifs récurrents dans les textes, car les Antigones espagnoles contemporaines placent au centre de la scène la métaphore de la marge pour figurer l’exclusion politique, ou encore celle du chemin pour représenter les destins brisés et l’exil. Fondamentalement, ces œuvres forgent un tombeau littéraire pour les défunts oubliés, mais aussi un monument en l’honneur des invisibles. La dimension esthétique de cette place théâtrale compensatrice ouvre une réflexion sur son sens cathartique dans une société en recomposition pendant la Transition. En effet, le troisième volet de cette thèse est centré sur la théâtralisation de l’histoire : il s’agit d’étudier les dispositifs de déconstruction des récits nationaux à travers les différents réagencements du mythe des Labdacides. Cette clé de lecture révèle les stratégies de démythification-remythification qui président aux nouvelles charges sémantiques des épisodes mythiques, dépeignant un autoportrait déformant de la communauté espagnole en crise. À l’horizon de ces pratiques de réécriture, se lit la conception d’une époque historique comme une épopée, que la parole cérémonielle et le dispositif scénique peuvent contribuer à purger, par une distance qui englobe un large prisme, de la sacralité au grotesque.