Doctoral thesis in Études politiques
Under the supervision of Michel Offerlé.
defended on 2008
in Paris, EHESS .
The "victims" : the social fabric of an uncertain category and its uses in collective action
Invisible group for a long time, the category of "victims" has known a multifaceted process of objectification since the 1980s. This thesis focuses primarily on the social fabric of this category : the promotion of “victim assistance policy” the institutionalization of an academic discipline, the “victimology” ; the invention of a diagnosis (post-traumatic stress disorder) and therapeutic practices (medico-psychological crisis unit). In a second time, this thesis analyses the transformation of the label of “victims” in a claimed public identity. Based on an ethnographic investigation on the mobilization of associative movements and trade unions following a chemical accident, this work examines the role of an unexpected event in collective action. It specifies the role of emotions like grief and bereavement in the recruitment and the elaboration of the collective identity of victims movements. Ultimately, this work analyses the political and strategic uses victims activists make of psychological practices, confession in media reports, complaints and commemorations.
Population sérielle longtemps dépourvue de visibilité, la catégorie de « victime » a connu depuis les années 1980 un processus multiforme d’objectivation. Cette thèse s’attache d’abord, dans le cadre d’une sociologie (les catégories sociales en train de se faire, à suivre la construction d’une offre d’identification en termes de « victime »: promotion de « politiques publiques d’aide aux victimes » ; constitution d’une discipline académique, la « victimologie », prenant pour objet cette population ; invention d’un diagnostic (le traumatisme psychique) et de pratiques thérapeutiques (les cellules d’urgence médico-psychologique) communs à des événements jusqu’alors incommensurables (de l’agression à l’inondation). A partir d’une enquête ethnographique consacrée aux mobilisations associatives et syndicales consécutives à une catastrophe industrielle, cette thèse vise ensuite a appréhender les ressorts de la conversion de l’expérience dramatique et du label de « victime » en une identité publique revendiquée. On y interroge le rôle de l’événement dans le passage à l’action collective, l’hypothèse d’«émotions mobilisatrices » (des « victimes » saisies par le deuil) et celle d’ « émotions mobilisées » (le deuil comme registre de dénonciation saisi par des « victimes »). À partir d’une sociologie des pratiques protestataires, on étudie ensuite les appropriations différenciées du régime de la plainte : les usages des pratiques psychologiques, du témoignage médiatique, de la plainte judiciaire et de la commémoration. On définit enfin un registre victimaire d’expression publique des griefs qui s’implante aujourd’hui dans des secteurs diversifiés de 1’espace des mouvements sociaux.