Thèse soutenue

Des films qui touchent le monde : un nouveau matérialisme photochimique

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Auteur / Autrice : James Hewison
Direction : Emmanuelle André
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Histoire et sémiologie du texte et de l'image
Date : Soutenance le 25/11/2022
Etablissement(s) : Université Paris Cité
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Langue, littérature, image, civilisations et sciences humaines (domaines francophone et anglophone) (Paris ; 1992-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre d'étude et de recherche interdisciplinaire de l'UFR LAC (Paris ; 2009-....)
Jury : Président / Présidente : Martine Beugnet
Examinateurs / Examinatrices : Martine Beugnet, Eric Thouvenel, Emmanuel Siety, Kim Knowles
Rapporteurs / Rapporteuses : Eric Thouvenel, Emmanuel Siety

Résumé

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Depuis une trentaine d'années, un nouveau rapport à la création cinématographique photochimique a vu le jour. Ce phénomène est corrélé à l'émergence du mouvement des laboratoires cinématographiques autogérés, en réaction à la montée de l'hégémonie numérique. Toute une sous-culture du cinéma expérimental, encore relativement peu étudiée en France, s'est ainsi bâtie autour d'approches artisanales et matérialistes de la pellicule. Dans cette thèse nous explorons une pratique particulière au sein de ce "nouveau matérialisme photochimique" : celle de la création d'images à partir du contact direct entre la pellicule photochimique et des éléments environnementaux sans la médiation d'une caméra. Ces films sont en effet réalisés, au moins en partie, avec des pellicules enterrées, noyées, brûlées ou simplement exposées à l'air libre. Comprendre ces images nécessite la connaissance de leurs conditions de création. Leur sens ne réside pas uniquement dans l'immédiateté de leur apparition à l'écran, mais dans les relations diverses entre le dispositif cinématographique - entendu comme agencement d'éléments matériels hétérogènes -, l'artiste et un environnement donné qui les ont engendrées. En d'autres termes, ces films appellent à une appréhension processuelle, vitaliste et néo-matérialiste de la création cinématographique. Recourant à une méthodologie "diffractive" inspirée de Donna Haraway et Karen Barad, nous analysons ces films à travers plusieurs approches disciplinaires : la philosophie esthétique, l'analyse filmique, la philosophie - contemporaine ou classique -, et l'histoire des sciences. Cette méthode permet d'évaluer la manière dont ces films participent d'une certaine nouveauté dans le champ de la création cinématographique tout en étant le reflet d'évolutions dans la pensée contemporaine liée à l'écologie, au matérialisme et à la théorie politique. L'étude de ces films se situe donc au croisement de deux champs d'études contemporains : l'écocritique et la philosophie néo-matérialiste. Nous explorons également les relations que ces films entretiennent avec des imaginaires plus anciens, liés ici à la pratique alchimique - ou "chymique" - des XVIe et XVIIe siècles, là aux vitalismes de la première moitié du XXe, ou encore à la pensée marxiste des années 1970. La lecture de ces films au travers de ces pensées diverses, couplée avec l'analyse des contextes technologiques et sociétaux dans lesquels ils s'inscrivent, révèle l'importance du réenchantement (des matières, des pratiques et des rapports au monde) au coeur du nouveau matérialisme photochimique. Plus généralement, elle ouvre la possibilité de proposer une théorie du cinéma qui soit déterminée par les relations multiples que nous entretenons avec le monde qui nous entoure - et avec les matières qui le composent.