Représentations sensorimotrices dans la perception des phonèmes natifs et non natifs
| Auteur / Autrice : | Tzu-Yi Tseng |
| Direction : | Véronique Boulenger, Claudio Brozzoli |
| Type : | Thèse de doctorat |
| Discipline(s) : | Sciences cognitives - neurosciences cognitives |
| Date : | Soutenance le 21/01/2025 |
| Etablissement(s) : | Lyon 2 |
| Ecole(s) doctorale(s) : | NSCo - Neurosciences et Cognition |
| Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Laboratoire Dynamique Du Langage (1994-...) |
| Jury : | Président / Présidente : Noël Nguyen |
| Examinateurs / Examinatrices : Véronique Boulenger, Claudio Brozzoli, Claudia Gianelli, Kristof Strijkers, Alice Roy | |
| Rapporteurs / Rapporteuses : Claudia Gianelli, Kristof Strijkers |
Mots clés
Résumé
Les théories incarnées de la cognition considèrent le langage comme ancré dans le système sensorimoteur. Les preuves convergent pour montrer que la perception de la parole induit des activations dans les zones sensorimotrices du cerveau impliquées dans la production de la parole. Notamment, une activité motrice est suscitée lors de la perception de phonèmes natifs et non natifs, et elle est organisée somatotopiquement en fonction du lieu d’articulation des phonèmes natifs. L’activité motrice reflète ainsi spécifiquement les caractéristiques articulatoires des sons de parole entendus : écouter des consonnes bilabiales et dentales active respectivement les représentations motrices corticales des lèvres et de la langue. Cependant, certaines études n’ont pas reproduit cette cartographie somatotopique dans le cortex moteur lors de la perception de phonèmes issus de la langue maternelle, tandis que d’autres ont montré un recrutement prémoteur uniquement lorsque les sons de parole sont dégradés mais identifiables. Ainsi, la nécessité et le rôle de l’activation motrice dans le traitement des sons de parole natifs et non natifs, qu’ils soient intacts ou dégradés, restent incertains. Lorsque la parole dans la langue maternelle est masquée par du bruit ou que les sons proviennent d’une langue étrangère, les régions motrices semblent soutenir la perception de la parole en récupérant les caractéristiques articulatoires ancrées dans le système de production de la parole. Compte tenu de cette contribution motrice, la question se pose de savoir si un entraînement engageant les régions motrices pourrait améliorer l’apprentissage et le traitement des phonèmes non natifs.Cette thèse vise à explorer le traitement sensorimoteur lors de la perception de la parole à travers une étude expérimentale utilisant l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) et une revue des paradigmes d’apprentissage des langues étrangères basés sur un entraînement sensorimoteur. Dans l’étude expérimentale, nous avons combiné des mesures comportementales et en IRMf, et mené des analyses multivariées pour examiner comment les régions sensorimotrices encodent et sont activées en fonction des caractéristiques phonétiques des phonèmes natifs et étrangers dans des conditions perceptuelles optimales et dégradées. Nos résultats montrent que l’activité évoquée par les mouvements articulatoires des lèvres et de la langue dans le gyrus précentral prédit l’activation corticale pour les consonnes labiales et dentales de la langue maternelle lorsqu’elles sont dégradées, illustrant le codage somatotopique des traits articulatoires dans le cortex moteur. De plus, les patrons d’activation sensorimotrice associés à la perception des phonèmes natifs et non natifs reflètent la similarité phonétique entre les sons de parole au sein d’une même langue et entre les deux langues. Dans la revue de littérature, nous présentons d’abord les travaux sur le traitement de la parole dans le cadre de la cognition incarnée, en soulignant le rôle fonctionnel du cortex moteur dans la perception de la parole. Nous discutons de la contribution potentielle de l’activité sensorimotrice à l’apprentissage des langues étrangères, notamment pour les phonèmes, à travers des entraînements gestuels renforçant l’ancrage des caractéristiques articulatoires des phonèmes non natifs. Enfin, nous proposons des perspectives pour le développement de paradigmes d’entraînement ainsi que pour de futures études en neuroimagerie fonctionnelle afin de combler les limites identifiées dans la littérature.