Thèse soutenue

L'affaire de la mer de Chine méridionale : étude sur l’irréductibilité du problème de la justiciabilité des différends internationaux

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Auteur / Autrice : Charles-Emmanuel Detry
Direction : Julian Fernandez
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Droit international
Date : Soutenance le 10/01/2025
Etablissement(s) : Université Paris-Panthéon-Assas
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de droit international, droit européen, relations internationales et droit comparé (Paris ; 1992-....)
Partenaire(s) de recherche : Equipe de recherche : Centre Thucydide-Analyse et recherche en relations internationales (Paris)
Jury : Président / Présidente : Serge Sur
Examinateurs / Examinatrices : Denis Alland, Jean-Pierre Cabestan
Rapporteurs / Rapporteuses : Geneviève Bastid Burdeau, Romain Le Boeuf

Résumé

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Le 12 juillet 2016, un tribunal arbitral a rendu sur le fondement de l’annexe VII à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer une sentence favorable aux Philippines dans l’affaire qui l’oppose à la Chine à l’égard de la mer de Chine méridionale. La Chine a rejeté cet arbitrage et refuse depuis lors de mettre sa conduite en conformité avec la décision rendue ; jusqu’à aujourd’hui, la situation s’est continûment dégradée et représente une menace toujours plus aiguë à la paix et à la sécurité internationales. Ces faits posent une nouvelle fois le problème, traditionnel dans la doctrine internationaliste, de l’existence de différends non justiciables, dans lesquels il serait impossible d’obtenir justice et dont le règlement par les juridictions s’avérerait inadéquat. La présente thèse situe d’abord les demandes portées à l’arbitrage par les Philippines parmi toutes les questions qui opposent la Chine à ses voisins s’agissant de la mer de Chine méridionale. Relatives au droit de la souveraineté territoriale ou au droit de la mer, toutes se prêteraient à une évaluation par une juridiction compétente et, dans la procédure sino-philippine, le tribunal arbitral était fondé à trancher la partie de ces questions qui relevaient de sa compétence sans se prononcer sur l’ensemble. En effet, ainsi que l’avaient soutenu Hersch Lauterpacht et Hans Kelsen, dès lors que l’existence d’un différend est établie, il est objectivement justiciable puisqu’il est toujours possible de rejeter la prétention de l’État qui n’est pas dans son droit. Cependant, dans l’anarchie des relations internationales, l’abandon d’une prétention jugée contraire au droit suppose nécessairement la bonne volonté de l’État qui en est l’auteur. La justiciabilité est donc un problème politique en même temps que juridique. Comme l’avaient souligné E. H. Carret Hans Morgenthau, ce problème implique de considérer la justiciabilité subjective des différends, c’est-à-dire le degré d’investissement politique de leur objet. Or les différends relatifs à la mer de Chine méridionale sont investis au plus haut degré par une tension entre la Chine et les États-Unis, qui se contestent l’hégémonie régionale et mondiale. La thèse montre comment cette tension a conditionné le destin de la sentence arbitrale, qui a fait l’objet d’allégations multiples quant à sa validité ou à sa nullité et dont tant les parties que les tiers prétendent assumer ou empêcher l’exécution. L’affaire de la mer de Chine méridionale apparaît ainsi comme une illustration des limites inhérentes à toute tentative de transposition de la doctrine de l’État de droit aux relations internationales et finalement, à la justiciabilité des différends en droit international –sans préjudice de son existence et de sa validité.