Thèse soutenue

« On ne mord pas la main qui nous nourrit » ? Action associative et politique partenariale de la direction de l'administration pénitentiaire

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Auteur / Autrice : Adrien Maret
Direction : René LévyJacques De maillard
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences Politiques
Date : Soutenance le 09/12/2024
Etablissement(s) : université Paris-Saclay
Ecole(s) doctorale(s) : Sciences Sociales et Humanités
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales (Guyancourt, Yvelines ; 1983-....)
Référent : Université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines
graduate school : Université Paris-Saclay. Graduate School Sociologie et science politique (2020-....)
Jury : Président / Présidente : Matthieu Hély
Examinateurs / Examinatrices : Camille Hamidi, Marie-Sophie Devresse, Claire de Galembert
Rapporteur / Rapporteuse : Camille Hamidi, Marie-Sophie Devresse

Mots clés

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Résumé

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Afin d'interroger les conditions d'intervention associative dans l'espace pénitentiaire en France et les modalités de coopération avec l'administration, cette recherche porte sur les principales têtes de réseaux associatifs dans le domaine « prison-justice » (Secours catholique, Croix-Rouge, Genepi…). Ces associations agissent pour la plupart en prison ou à la sortie, en réalisant des actions sociales au sens large (aides matérielles, ateliers de formation, prévention sanitaire…) auprès des personnes majeures sous main de justice ou qui l'ont été. Elles ont la particularité d'être majoritairement composées d'équipes bénévoles, éventuellement appuyées par des personnes salariées, et d'interagir régulièrement avec la direction de l'administration pénitentiaire (DAP).Cette thèse repose sur une approche transversale et multiniveaux des liens entre ces associations et les pouvoirs publics. Elle articule une perspective sociohistorique, s'intéressant aux conditions d'émergence et de diffusion de l'action associative dans l'espace pénitentiaire au cours la seconde moitié du XXème siècle ; une analyse du cadre juridique et des pratiques d'encadrement rencontrées à l'époque contemporaine par les intervenant∙e∙s extérieur∙e∙s ; et une étude détaillée des relations partenariales nouées à l'échelon central par la DAP et les associations. Les résultats obtenus se fondent sur le traitement qualitatif d'un corpus documentaire inédit, une enquête de terrain par entretiens et de longues séquences d'observation ethnographique menées de 2015 à 2020 auprès des représentant·e·s d'associations et de la DAP.D'une part, l'intérêt de cette démarche est d'interroger la participation associative à l'action publique pénitentiaire : dans sa capacité à faire émerger de nouveaux services et problèmes publics, à assurer des actions sur l'ensemble du territoire, et à influer sur le fonctionnement du système et sur les décisions politico-administratives. D'autre part, elle permet d'analyser la régulation opérée par l'État sur ces interventions menées par le secteur privé non lucratif. Les interventions associatives, en particulier en détention, sont reconnues par la législation, mais faiblement règlementées au-delà des simples autorisations d'accès. L'institutionnalisation s'est faite de façon non harmonisée, si bien que les associations restent confrontées à une disparité de traitements administratifs et de décisions discrétionnaires. Enfin, la DAP a constitué une arène partenariale à l'échelon central, qui offre un espace de négociation et de confrontation, des remontées d'information, ainsi que des leviers pour appuyer le développement des réseaux associatifs.Cette thèse montre que, par le biais de l'encadrement partenarial du secteur associatif, l'État central est moins dans une forme de désengagement que dans une reconfiguration à distance de son action. Au cours du XXème siècle, l'administration pénitentiaire s'est vu retirer de nombreuses prérogatives sociales, éducatives et sanitaires, au profit d'autres services publics. Pourtant, elle réaffirme son souhait de développer une prise en charge plus complète des personnes, bien qu'elle laisse ou délègue de nombreux aspects à des associations. C'est à partir de ses objectifs redéfinis que la DAP formalise ses relations à travers des conventions partenariales et soutient des associations tout en les évaluant à partir d'indicateurs. Dès lors, le secteur associatif constitue une interface entre le rôle répressif et social de l'État. Il se trouve ainsi confronté à des tensions entre participation et dénonciation, engagement citoyen et travail gratuit, le tout dans le cadre d'une coopération asymétrique et sous contrôle.