Thèse soutenue

Étude de la tumorigenèse pancréatique des tumeurs intracanalaires papillaires et mucineuses du pancréas (TIPMP)

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Auteur / Autrice : Diane Lorenzo
Direction : Cécile Haumaitre
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Physiologie et physiopathologie
Date : Soutenance le 13/12/2024
Etablissement(s) : Université Paris Cité
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Bio Sorbonne Paris Cité (Paris ; 2014-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de recherche sur l'inflammation (Paris ; 2014-....)
Jury : Président / Présidente : Pascal Hammel
Examinateurs / Examinatrices : Alice Carrier, Marc Barthet
Rapporteurs / Rapporteuses : Julie Guillermet-Guibert, Nicolas Jonckheere

Résumé

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Le cancer du pancréas a un pronostic sombre, avec un taux de survie à 5 ans inférieur à 10 %. Il est souvent diagnostiqué trop tardivement et les traitements sont peu efficaces. Plus de 90 % des cas de cancer du pancréas prennent naissance au niveau des cellules exocrines. L'adénocarcinome pancréatique est principalement issu de deux types de lésions prénéoplasiques : les néoplasies intraépithéliales pancréatiques (PanIN) dérivant des cellules acineuses qui subissent initialement une métaplasie acino-canalaire, et les tumeurs intracanalaires papillaires et mucineuses du pancréas (TIPMP) provenant des cellules canalaires. Les TIPMP, définies par des canaux pancréatiques dilatés et dysplasiques, sont fréquentes, touchant 7 à 10% de la population adulte et augmentant avec l'âge. Leur évolution est très difficile à prédire. Il est essentiel de mieux comprendre les mécanismes moléculaires d'initiation et de progression de ces lésions pour un meilleur diagnostique et un meilleur pronostique. Notre équipe a démontré que l'inactivation du gène Hnf1b dans les canaux pancréatiques murins entraîne une dilatation canalaire et une prolifération cellulaire accrue, pouvant constituer une prédisposition à l'initiation des TIPMP. Par ailleurs, les mutations de l'oncogène Kras sont très fréquentes dans les TIPMP, mais la seule activation de Kras dans les cellules canalaires n'est pas suffisante pour entraîner la formation de TIPMP chez la souris. Ainsi, nous avons émis l'hypothèse que la perte d'Hnf1b associée à Kras activé pouvait mener aux TIPMP. Nous avons généré un modèle de souris combinant l'inactivation de Hnf1b et une mutation KrasG12D dans les canaux pancréatiques (« KHC »: Sox9-CreER;KrasG12D/+;Hnf1b fl/fl). Ce modèle a été comparé aux témoins (« KC » Sox9-CreER;KrasG12D/+ ; « HC » Sox9-CreER;Hnf1b fl/fl et « H » Hnf1b fl/fl). Des analyses d'IRM, histologiques et immunohistochimiques ont montré que les souris KHC développent des TIPMP avec une dilatation canalaire et une dysplasie à 12 semaines, validant ainsi un nouveau modèle murin de TIPMP. L'analyse transcriptomique par RNAseq des organoïdes canalaires a révélé les mécanismes moléculaires impliqués, soulignant la perte des cils primaires et de l'activité de bookmarker d'Hnf1b dans l'initiation des TIPMP, ainsi que les voies de signalisation impliquées. Nous avons également corrélé le modèle KHC avec la TIPMP humaine, phénotypiquement par la perte d'expression d'Hnf1b et moléculairement par RNAseq de TIPMP humaine. La prise en charge des TIPMP chez l'homme repose sur des critères cliniques, biologiques et radiologiques, avec notamment la présence d'un nodule mural (NM) comme facteur de risque de malignité nécessitant une chirurgie. Récemment, des techniques de destruction locale guidées par l'échoendoscopie, telle que l'ablation par radiofréquence, permettent la destruction locale de TIPMP, avec le NM comme cible privilégiée. Cependant, il est nécessaire d'évaluer précisément l'emplacement du plus haut degré de dysplasie ou de la composante invasive au sein de la TIPMP pour la pertinence thérapeutique de cette approche. Notre étude a inclus 82 patients opérés pour TIPMP des canaux secondaires avec NM (2012-2022). Un traitement local de NM était jugé pertinent si aucun cancer et aucune dysplasie de haut grade à distance du NM n'était présent sur la pièce opératoire. Les résultats montrent que 45% des patients n'auraient pas bénéficié d'un traitement local. Ainsi, nos études ont identifié Hnf1b comme un nouveau gène suppresseur de tumeur de la TIPMP et ont amélioré la compréhension des mécanismes moléculaires de l'initiation et la progression des TIPMP. Elles montrent également que la progression tumorale des TIPMP est diffuse et nécessite des traitements plus étendus que le traitement local, mettant en lumière l'importance de mieux comprendre les mécanismes moléculaires pour identifier de nouvelles cibles thérapeutiques.