Etude d'une nouvelle fonction enzymatique dans la biosynthèse des polysaccharides de réserve chez Chromera velia
Auteur / Autrice : | Léa Fermont |
Direction : | Ugo Pierre Cenci, Steven Ball |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Physiologie, Biologie des organismes, populations, interactions |
Date : | Soutenance le 03/12/2024 |
Etablissement(s) : | Université de Lille (2022-....) |
Ecole(s) doctorale(s) : | École graduée Biologie-Santé (Lille ; 2000-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Unité de Glycobiologie Structurale et Fonctionnelle (Villeneuve d'Ascq ; 1998-....) |
Financeur : Hauts-de-France. Conseil régional - Université de Lille (2018-2021) | |
Jury : | Président / Présidente : Christophe D' Hulst |
Examinateurs / Examinatrices : Miroslav Oborník, Matthew Gentry | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Claire Remacle, Mirjam Czjzek |
Mots clés
Résumé
L'amidon et le glycogène sont les principaux polysaccharides de réserve chez les organismes vivants. Bien qu'ils soient tous deux composés de chaînes de glucose liées en α-1,4 et ramifiées en α-1,6, leurs propriétés physico-chimiques diffèrent en raison d'une distribution différente des points de ramification. L'amidon, cristallin, permet de stocker de grandes quantités de glucose. Il est uniquement présent chez les eucaryotes dérivés de l'endosymbiose plastidiale, notamment les Archaeplastida, et sa synthèse est toujours associée à des activités enzymatiques spécifiques. Cependant, l'accumulation d'amidon se retrouve aussi chez certains Alveolata comme les Dinoflagellés, les Chroméridés et les Apicomplexes (que l'on regroupe sous le nom de Myzozoa), issus d'une endosymbiose impliquant une algue rouge unicellulaire. Jusqu'à présent, les analyses fonctionnelles se sont surtout concentrées sur les Chloroplastida, identifiant des enzymes clés comme l'isoamylase, nécessaire à la cristallisation de l'amidon, ou certaines amidon-synthases spécifiques impliqués dans l'initiation de la synthèse de l'amidon. Or, des analyses métaboliques comparatives in silico montrent que les Myzozoa accumulateur d'amidon n'ont pas les gènes codant ces enzymes. On ignore quels sont les acteurs de la cristallisation des polysaccharides de réserve chez ces organismes, et si la synthèse de l'amidon nécessite une synthase spécifique, comme chez les plantes.Pour élucider comment l'amidon s'accumule chez ces organismes, nous avons étudié Chromera velia, un organisme unicellulaire photosynthétique ayant une place évolutive unique dans l'arbre du vivant, proche des dinoflagellés et des apicomplexes. Ce chemin évolutif fait de C. velia un modèle idéal pour étudier les mécanismes et l'évolution du métabolisme de l'amidon chez les Alveolata. Nous avons donc généré 95 mutants de C. velia déficients dans la synthèse d'amidon par mutagenèse aléatoire aux UV. Un séquençage ciblé a révélé des allèles distincts affectant le gène Cvel_2560, qui code une protéine atypique encore non caractérisée à ce jour. Cette enzyme, appelée protéine « fusion », possède un domaine enzyme de branchant GH13_8 interrompu par un domaine synthase GT4 de fonction inconnue — une disposition inhabituelle conservée chez les Myzozoa accumulant de l'amidon.L'activité de Cvel_2560 a été évaluée grâce à une approche intégrative incluant la modélisation in silico de cette protéine, le phénotypage des mutants, l'analyse phylogénétique et l'enzymologie de protéines recombinantes. La modélisation suggère que le domaine GH13, bien que divisé en deux partie, semble se reformer lors de la mise en conformation de la protéine, suggérant que ce domaine soit bien actif. Les mutants de C. velia impacté dans Cvel_2560 montrent des déficiences importantes dans la production d'amylopectine et de polysaccharides solubles. La caractérisation structurale des polysaccharides solubles accumulés chez ces mutants, comparée à l'amylopectine des souches sauvages et de certains mutants, révèle qu'ils adoptent une structure atypique ressemblant au glycogène. Les analyses biochimiques préliminaires sur des protéines recombinantes montrent que Cvel_2560 présente une activité en présence d'UDP-glucose. Enfin, l'analyse phylogénétique indique que cette protéine est commune à tous les Myzozoa, le domaine GT4 ayant été hérité lors de l'endosymbiose secondaire, tandis que le domaine GH13 aurait une origine eucaryote, et aurait évolué pour fonctionner de paire avec le domaine GT4.Ces résultats suggèrent que la perturbation de ce gène altère la voie de synthèse des polysaccharides, entraînant l'accumulation de polymères solubles semblables au glycogène à la place de l'amylopectine. Bien que la fonction enzymatique précise de cette protéine reste encore à déterminer, les résultats suggèrent son implication dans les premières étapes de l'assemblage ou de la ramification des polysaccharides de réserve chez C. velia.