Thèse soutenue

Une politique de mobilité est-elle une alternative pertinente à la rénovation urbaine ?

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Auteur / Autrice : Nicolas Juste
Direction : Moez Kilani
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences économiques
Date : Soutenance le 25/01/2024
Etablissement(s) : Université de Lille (2022-....)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences économiques, sociales, de l'aménagement et du management (Lille ; 1992-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : LEM - Lille Économie Management
Jury : Président / Présidente : Julie Le Gallo
Examinateurs / Examinatrices : Ludovic Vaillant, Gilles Duranton, Laurence Delattre
Rapporteurs / Rapporteuses : Julie Le Gallo, Louafi Bouzouina

Résumé

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En Europe, comme aux États-Unis, l'existence au sein de nos villes de quartiers qui concentrent les difficultés sociales fait l'objet d'une attention particulière de la part de la puissance publique. Quartiers d'habitats sociaux d'après-guerre, ghettos noirs américains, centres-villes autrefois dynamiques, les formes que prennent ces quartiers sont multiples et font l'objet dans la plupart des pays de programmes spécifiques. En France, l'action sur ces quartiers porte le nom de Politique de la Ville. Les différents programmes mis en place considèrent que la concentration spatiale de la pauvreté est à la source des désordres observés. Guidée par cet a priori, la puissance publique n'a cessé de vouloir augmenter la mixité sociale de ces quartiers en diversifiant le parc de logements et le peuplement.En dépit des sommes engagées, le bilan de la politique de la ville est dit contrasté et difficile à évaluer. Se pourrait-il que l'amélioration de la situation de ces quartiers par l'accroissement de leur mixité soit une impasse ? Est-il possible d'améliorer plus efficacement le sort des habitants des quartiers qui concentrent la pauvreté par une politique d'accroissement de la mobilité des individus ? Cette interrogation constitue le cœur de cette thèse qui se compose de trois chapitres.Le premier chapitre est une discussion méthodologique traitant principalement de l'objectif que devrait poursuivre une telle politique. Nous montrons qu'une politique de mobilité, si elle se traduit par une amélioration de l'accessibilité aux emplois, peut constituer une politique alternative convaincante. Mais nous montrons également que le lien entre bonne accessibilité aux emplois et faible taux de chômage n'est pas une évidence.Le deuxième chapitre est consacré au développement d'un modèle urbain complexe permettant de comprendre les effets d'une modification de l'offre de transport sur l'organisation d'une ville dans un contexte de dispersion des emplois et d'absence de plein-emploi chez les travailleurs peu qualifiés. Nous proposons des mécanismes originaux sur la distance aux emplois et la localisation du chômage permettant d'obtenir une organisation de la ville proche de celle observée empiriquement sur quelques agglomérations françaises. Le principal enseignement en est qu'une bonne accessibilité aux emplois peut s'accompagner d'une augmentation du taux de chômage, car le quartier devient attractif pour les demandeurs d'emplois.Le troisième et dernier chapitre est une analyse empirique et statistique visant à confronter les mécanismes utilisés dans le deuxième chapitre aux données réelles des régions Hauts-de-France et Île-de-France. Nous définissons et calculons deux indicateurs d'accessibilité aux emplois dont l'un représente le niveau de tension du marché de l'emploi. Nous utilisons ces indicateurs, ainsi qu'un ensemble de variables de contrôles, pour modéliser le taux de chômage des quartiers à l'aide d'un modèle à dépendance spatiale du terme d'erreur et équations simultanées (SUR-SEM). Un accroissement de l'accessibilité aux emplois aura tendance à faire augmenter le taux de chômage, car le quartier devient plus attractif pour les chômeurs. Mais si cette accessibilité se traduit par une baisse du niveau de tension du marché de l'emploi, elle se traduira au contraire par une baisse du taux de chômage.Il s'avère que la composition du parc de logements a un impact beaucoup plus important sur le niveau de chômage d'un quartier que son niveau d'accessibilité aux emplois. Mais il n'y a aucune raison de penser que cette baisse du chômage soit valable à l'échelle de la ville dans son ensemble. La pauvreté est pour ainsi dire diluée. Une diminution du niveau de tension sur le marché de l'emploi par l'amélioration de la mobilité des personnes, à l'inverse, conduira à une baisse du taux de chômage à l'échelle du quartier et de la ville.