Étude et modélisation de la dynamique des glaces d'eau et de CO2 sur la planète Mars
Auteur / Autrice : | Lucas Lange |
Direction : | François Forget |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Astronomie et Astrophysique |
Date : | Soutenance le 21/11/2024 |
Etablissement(s) : | Sorbonne université |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Astronomie et astrophysique d'Île-de-France (Meudon, Hauts-de-Seine ; 1992-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Laboratoire de météorologie dynamique (Palaiseau ; 1968-....) |
Jury : | Président / Présidente : Franck Montmessin |
Examinateurs / Examinatrices : Cédric Pilorget, Alice Le Gall, Cathy Quantin-Nataf, Nicolas Mangold | |
Rapporteur / Rapporteuse : Paul Hayne, Sylvestre Maurice |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
La planète Mars est entourée d'une fine atmosphère composée majoritairement de CO2, avec un peu d'eau. Chaque nuit et chaque hiver, une partie du CO2 et de l'eau se condense localement sous forme de givre. Dans un passé récent, lorsque l'obliquité de Mars était plus importante, l'atmosphère martienne était plus humide et un manteau de glace d'eau a pu recouvrir Mars des pôles aux moyennes latitudes. Lorsque l'obliquité est redescendue, ces glaces ont sublimé et se sont enterrées, tandis qu'une partie du CO2 s'est condensé aux pôles pour former des glaciers massifs. Aujourd'hui, nous pouvons observer les restes de ces époques via la glace d'eau enfouie aux moyennes latitudes et la calotte pérenne de CO2 au Pôle Sud. L'objectif de cette thèse est d'améliorer notre compréhension de la dynamique de ces glaces, du cycle diurne à l'échelle du million d'années. J'ai utilisé des observations spatiales et surtout des modèles numériques comme le « Mars Planetary Climate Model » (PCM) et le nouveau « Planetary Evolution Model » (PEM) dans lesquels je me suis activement investi afin d'y développer de nouvelles capacités.Dans une première étude, en comparant les données de pression de surface acquises par des sondes spatiales au cours des 50 dernières années, j'ai prouvé que la masse de l'atmosphère martienne n'avait pas varié à ces échelles de temps et donc que la calotte pérenne de CO2 avait un bilan de masse neutre. J'ai ensuite montré que le cycle diurne de formation de givre de CO2 dans les zones poussiéreuses pouvait empêcher la poussière de s'agréger, maintenant la présence de poussière mobilisable en surface.Parallèlement J'ai développé un nouvel outil pour modéliser les micro-climats sur les pentes martiennes au sein du PCM et du PEM. Il prédit la présence des glaces de Mars sur les pentes froides en accord avec les observations. Dans une étude dédiée, à l'aide des images de la caméra THEMIS et de ce modèle, j'ai montré que le givre d'eau qui s'accumule sur ces pentes ne peut pas fondre dans le climat actuel, mais éventuellement former des saumures si ce givre est au contact de sels. Forts de ces outils, j'ai ensuite étudié la stabilité de la glace d'eau en sous-surface. J'ai notamment prouvé que la glace d'eau enterrée aux latitudes tropicales sous les pentes orientées vers les pôles n'était pas stable. La présence de cette glace et sa forte inertie thermique avait précédemment été présenté comme indispensable pour expliquer l'absence de givre de CO2 sur ces pentes. Cependant mon modèle a montré que cette absence pouvait aussi bien s'expliquer par un transport atmosphérique de chaleur, jusqu'alors négligé. En adaptant un nouveau modèle complet d'échange entre le permafrost et l'atmosphère, j'ai caractérisé l'influence du cycle de l'eau et des conditions atmosphériques sur la stabilité de la glace enterrée. J'ai parallèlement reconstruit l'histoire de la glace d'eau enterrée sous les moyennes latitudes, et suggéré qu'elle peut être un vestige des derniers âges glaciaires d'il y a 630 000 ans. Enfin, comme pour le givre en surface, j'ai montré que cette glace d'eau enterrée ne pouvait fondre même dans les conditions les plus favorables que nous avons pu imaginer : le cas où un glissement de terrain exposerait la glace du sous-sol au chauffage solaire. Dans une dernière étude, à l'aide du nouveau « Planetary Evolution Model », j'ai simulé la formation de glaciers de CO2 lorsque l'atmosphère condense vers les pôles dans les périodes de basse obliquité. En passant l'obliquité de 25,2° (actuelle) à 15°, j'ai montré que la pression moyenne chutait jusqu'à 250 Pa. L'humidité de l'atmosphère est réduite. Des glaciers massifs de CO2 se forment sur les pentes orientées vers le pôle à haute latitude. Malgré cela, le CO2 reste le composant majoritaire.Ces travaux constituent une nouvelle étape dans notre compréhension des paléoclimats martiens et notamment de l'activité géologique induite par les variations climatiques récentes.