Immunité T anti-tumorale et anti-virale chez les patients immunodéprimés : 1. Paysage mutationnel, immunogénicité et microenvironnement tumoral des lymphomes non Hodgkiniens B survenant dans un contexte d'immunodépression, 2. Impact des inhibiteurs de PD-1 sur l'immunité T anti-virale et le réservoir VIH chez les patients vivant avec le VIH et atteints de cancers
Auteur / Autrice : | Marine Baron |
Direction : | Vincent Vieillard, Amélie Guihot-Thévenin |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Biologie intégrée |
Date : | Soutenance le 22/01/2024 |
Etablissement(s) : | Sorbonne université |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Physiologie, Physiopathologie et Thérapeutique (Paris ; 2000-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Centre d'immunologie et des maladies infectieuses (Paris ; 2014-....) |
Jury : | Président / Présidente : Claire Fieschi |
Examinateurs / Examinatrices : Valérie Pourcher, Hervé Ghesquières | |
Rapporteur / Rapporteuse : Luc-Matthieu Fornecker, Eric Tartour |
Résumé
Les cancers, notamment les lymphomes non hodgkiniens (LNH), sont particulièrement fréquents chez les patients immunodéprimés (ID : transplantés ou VIH+). Les LNH des ID sont caractérisés par une association fréquente à l’EBV et/ou à une localisation cérébrale qui peuvent tous 2 impacter la réponse immune anti-tumorale. Les cancers des patients VIH+ peuvent quant à eux bénéficier de traitement par inhibiteurs d’immune checkpoint (ICPi). Dans ces différentes situations, le développement, la profondeur et la caractérisation de la réponse immune dirigée contre les antigènes tumoraux ou contre les antigènes viraux sont d’une importance capitale pour définir des marqueurs de réponse et/ou de résistance au traitement et des cibles thérapeutiques. Dans la première partie, nous avons étudié l'immunogénomique de 68 patients avec des lymphoproliférations B : 51 ID (34 transplantés, 17 VIH+) et 17 immunocompétents, en caractérisant la charge (CMT) et le profil mutationnel tumoral, le nombre de néoépitopes, le microenvironnement tumoral (MET) et les réponses T spécifiques, à partir du séquençage de l’exome entier et de l’ARN tumoral et des cellules mononuclées sanguines périphériques respectivement. La prédiction des néopépitopes a été réalisée grâce à un pipeline bio-informatique développée au sein de notre structure. 72% des patients avaient un lymphome B à grandes cellules, 25 % une localisation cérébrale et 40 % des tumeurs étaient EBV+. La CMT (2,2 vs 3,4/Mb, p=0,004) et le nombre de néoépitopes (40 vs 200, p=0,0002) étaient plus faibles dans les LNH EBV+ comparé aux EBV- , quel que soit le statut immunitaire. Le profil mutationnel tumoral différait à la fois en fonction du statut EBV et du statut immunitaire avec des mutations d’HNRNPF et de STAT3 exclusivement observées dans les LNH EBV+ et ID respectivement. Des réponses lymphocytaires T spécifiques des néoépitopes étaient détectées chez tous les LNH EBV-, mais seulement 50% des LNH EBV+ (p= 0.08), et étaient notamment dirigées contre les néoépitopes dérivés d’ IgH restreints par la classe II du CMH. L'analyse du MET montrait une augmentation de l’infiltrat T CD8+ dans les LNH EBV+ ainsi qu'un profil plus tolérogène composé de Tregs, de macrophages de type M2 et d'une expression accrue de gènes impliqués dans l’immunorégulation négative. Dans la deuxième partie, nous avons étudié l'impact des anti-PD-1 sur les réservoirs VIH et les réponses immunitaires antivirales chez les patients VIH+ traités pour un cancer, afin d’étudier la possibilité d’une stratégie du « shock and kill ». Nous avons évalué à différents points biologiques, dans le sang périphérique, le nombre de CD4+, l'ARN-VIH plasmatique, l’ADN-VIH, les charges virales EBV, CMV, VHB, VHC et HHV-8, les marqueurs d'activation et l'expression de différents ICP sur les lymphocytes, et les cellules T spécifiques anti-virales. 32 patients ont été inclus, avec un suivi médian de 5 mois. L'ADN-VIH avait tendance à diminuer avant le cycle 2 (p = 0,049). Notamment, 6 patients ont présenté une diminution ≥0,5 log10 de l'ADN-VIH au moins une fois et l'ADN-VIH d’un de ces patients est devenu indétectable pendant 10 mois. Aucune augmentation significative de l'immunité spécifique anti-VIH n’était observée. En revanche, une augmentation précoce de l’expression de CTLA-4 à la surface des CD4+ (p = 0,004), et de TIM-3 et de CTLA-4 à la surface des CD8+ était plus marquée chez les patients sans réduction de l'ADN-VIH par rapport aux autres (p ≤ 0,03) […]