Thèse soutenue

La fin de l'Antiquité chez les Sénons, Meldes et Parisii : persistances, adaptations ou ruptures religieuses dans trois cités de Lyonnaise (IIIe-VIe s.)

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Auteur / Autrice : Vincent Apruzzese
Direction : Paul Van Ossel
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Archéologie - Ethnologie
Date : Soutenance le 12/01/2024
Etablissement(s) : Paris 10
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Espaces, Temps, Cultures (Nanterre, Hauts-de-Seine ; 2000-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Archéologies et sciences de l'Antiquité (Nanterre ; 1999-....)
Jury : Président / Présidente : Martine Joly
Examinateurs / Examinatrices : Martine Joly, Jean-Yves Marc, Olivier de Cazanove, Brigitte Boissavit-Camus
Rapporteurs / Rapporteuses : Martine Joly, Jean-Yves Marc

Résumé

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Cette thèse s'intéresse aux mutations religieuses propres à l'Antiquité tardive appliquées ici au cadre strict et cohérent de la civitas gallo-romaine. Elle se fonde sur une réinterprétation de données anciennes mais aussi sur une documentation récente, renouvelée par l'archéologie préventive. L'espace correspondant aux territoires Sénons, Meldes et Parisii, coïncide avec le secteur central et éminemment stratégique de la province de Lyonnaise Sénonaise, situé à la confluence de la Seine, de l'Yonne, de la Marne et d'un tronçon de la via Agrippa venus structurer le territoire. Un secteur connu pour avoir vu séjourner plusieurs années le César Julien, favorable au paganisme. Une cinquantaine de sites majeurs, extraits d'un corpus fort de 270 sites polythéistes ou chrétiens seront analysés mais aussi remis en contexte par analyse spatiale S.I.G. en tenant compte de la trame de l'occupation rurale (plus de 1500 points de peuplement pour les années 250-525). Le cadre de l'étude débute au milieu du IIIe s. et entend pallier à la disparition des sources épigraphiques religieuses. La question de l’entretien des sanctuaires et du devenir des pratiques rituelles devient dès lors centrale tout au long du IVe s., a fortiori dans la triple conjoncture voyant l’appauvrissement théorique des cités, la christianisation progressive des élites et une législation impériale de plus en plus hostile à l’égard des sacrifices sanglants. La disparition des cultes publics s’opère parfois dès la seconde moitié du IIIe s., traduite sur le terrain par une dégradation des temples ou par leur potentielle condamnation et mise en carrière. Elle entraîne une déstabilisation religieuse et politique des communautés païennes par absence de cadre. Il appartient alors d’observer les stratégies planifiées, ou subies, mis en œuvre par la cité ou par d’autres collectivités pour conserver une portion des sanctuaires en état de marche, et ce jusqu’à leur abandon définitif que l’on situe entre la fin du IVe s. et le premier quart du Ve s. Cet abandon, sanctionnant une occupation parfois précaire, semble en partie coercitif, qu’il résulte des décrets antipaïens ou de l’iconoclasme chrétien. Plus qu’une « disparition du paganisme », certains éléments militent pour une délocalisation des cultes aux Ve-VIe s., depuis les temples vers des lieux plus discrets, en l’occurrence domestiques ou naturels. En parallèle, l’examen de multiples indices chrétiens tend autant à relativiser l’impact du christianisme sur la trame urbaine avant le VIe s. (installations souvent médiocres et opportunistes), qu’à réévaluer son emprise dans les campagnes, et particulièrement parmi les domaines ruraux. Un nombre non négligeable de villae, lesquelles auraient appartenu préférentiellement à l’élite tardo-antique ou au fisc mérovingien, ont en effet intégré de probables oratoires et chapelles funéraires à leurs bâtiments. L’examen des modalités et la temporalité de cette christianisation de structures antérieures apportent un regard nouveau sur ce processus. La nouvelle religion, très peu visible au IVe s., semble s’être bornée aux cultes de sépultures fameuses (propriétaire de domaine, évêques ou martyrs), sur lesquelles on édifiera plus tard des église engendrant par agglomérat de nouveaux vici. Il est possible, mais loin d’être encore prouvé, que cette polarisation autour des tombes de thaumaturges rejoigne celle, à peine entraperçue, de la christianisation des sanctuaires païens naturels, hypothétiques successeurs des sanctuaires traditionnels désertés. Le dénominateur commun pouvant être l’attrait du salut, qui voit par exemple les sources fréquentées plus longtemps. Ainsi la transition entre le paganisme et le christianisme apparaît dès lors comme une césure floue et plurielle, qu’on peut limiter d’une part, à la disparition (imparfaite) des rites païens dans un cas, d’autre part, à l’essor des substitutions de bâtiments et de lieux par le christianisme.