Thèse soutenue

Qualifier, témoigner, dénoncer le viol ordinaire : la justice réparatrice comme espace de justice épistémique

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Auteur / Autrice : Alexane Guérin
Direction : Astrid von BusekistMagali Bessone
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Doctorat en Science politique, spécialité Théorie politique
Date : Soutenance le 08/02/2024
Etablissement(s) : Paris, Institut d'études politiques
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de Sciences Po (Paris ; 1995-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de recherches internationales (1952-.... ; Paris)
Jury : Président / Présidente : Sandrine Lefranc
Examinateurs / Examinatrices : Astrid von Busekist, Magali Bessone, Christian Nadeau, Catherine Rossi, Amandine Catala
Rapporteurs / Rapporteuses : Christian Nadeau, Catherine Rossi

Résumé

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Alors que la mythologie du viol construit ce crime comme un événement extraordinairecausé par un inconnu déviant, cette thèse propose une conceptualisation du « violordinaire » à partir de trois critères : la relation de proximité entre la victime etl’auteur, la situation de quotidienneté et l’intimité entre les deux individus. Le conceptde viol ordinaire, loin de banaliser les violences de genre, permet de dévoiler lesmécanismes hétéronormés à l’oeuvre dans la (re)production des violences sexuelles,dans le sillage des théorisation féministes américaines du « date rape » des années1980. À partir des savoirs expérientiels de cinq femmes recueillis lors d’entretienssemi-directifs, ce travail de recherche analyse les injustices épistémiques que cesvictimes subissent lorsqu’elles cherchent à qualifier, témoigner et dénoncer leur viol(injustices herméneutiques, testimoniales, agentielles, silenciation, etc.).L’épistémologie féministe du positionnement a permis de se décentrer dessignifications pénales de ce qui rend justice et des comportements déterminés par lafigure de la « victime idéale ». En effet les attentes de justice épistémique identifiéesne correspondent pas aux logiques et finalités pénales, qu’il s’agisse, pour lesvictimes, de nommer l’événement à l’aune du continuum de la violence sexuelle, defaire le récit du viol et de ses conséquences sans que leur crédibilité ne soit évaluée,d’être reconnue en tant que victime sans devoir performer des normes stéréotypéesou de confronter l’homme qui a commis le viol pour obtenir des réponses à leursquestions. Cette thèse montre que le paradigme de la justice réparatrice est à mêmede répondre à ces attentes normatives par les espaces de dialogue et d’écouteinconditionnelle qu’il propose. À partir d’un travail de terrain réalisé au Québec au seind’un réseau de justice réparatrice extra-judiciaire, cette recherche démontre que lamédiation relationnelle observée permet aux victimes de se réapproprier leuragentivité épistémique, radicalement niée pendant le viol.