[Se] Protéger face aux incertitudes de l'avenir : une sociologie des retraité.es modestes
Auteur / Autrice : | Marion Arnaud |
Direction : | Serge Paugam |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sociologie |
Date : | Soutenance le 26/03/2024 |
Etablissement(s) : | Paris, EHESS |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale de l'École des hautes études en sciences sociales |
Jury : | Président / Présidente : Jeanne Lazarus |
Examinateurs / Examinatrices : Jeanne Lazarus, Cécile Van de Velde, Jean-Philippe Viriot Durandal, Claude Didry, Anne-Marie Guillemard, Sébastien Lechevalier | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Cécile Van de Velde, Jean-Philippe Viriot Durandal |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Mots clés libres
Résumé
La retraite est généralement conçue comme une institution qui incarne la réussite du modèle social français : les retraités forment une part marginale des bénéficiaires des services d’aide sociale, la France est le deuxième pays de l’OCDE à avoir le plus faible taux de pauvreté chez les personnes âgées, et en moyenne ce groupe jouit d’un niveau de vie supérieur à l’ensemble des actifs. Pourtant, depuis quelques années on sait qu’un tiers des retraité.es touchent des pensions mensuelles inférieures ou égales à 1000 euros dont 74% de femmes. Quel est l’état des inégalités dans la retraite ? Et quelle est réellement la situation sociale des retraité.es ? Alors que la littérature atteste de la réussite exemplaire de la politique des retraites à avoir éradiqué le phénomène d’indigence et de pauvreté structurelle des vieux travailleurs, comment comprendre l’existence de ce nouveau groupe social dont l’existence interroge les représentations sociologiques des formes contemporaines de la pauvreté ? A partir d’une méthodologie reposant sur quinze ans de recherche dont sept années dans le champ de l’expertise retraite ainsi que sur la réalisation d’une enquête menée par entretiens semi-directifs dans une campagne populaire en Occitanie, la thèse propose une sociologie de celles et de ceux que l’administration nomme les « retraité.es modestes ». Située à l’intersection de la sociologie de la socialisation économique, de la sociologie de la retraite et de la sociologie générale, elle propose une analyse compréhensive de la retraite conçue comme un dispositif de régulation des parcours de prévoyance individuels. Cette perspective repose sur un travail inédit de conceptualisation de la notion de prévoyance qui permet de livrer une étude empirique du rôle régulateur du dispositif dans les vies individuelles. En exploitant les entretiens menés auprès de 42 retraité.es et de 12 acteurs institutionnels engagés dans le champ de la vieillesse, la thèse montre ainsi comment le dispositif produit une régulation différenciée des parcours de prévoyance qui opère de façon invisible, corporatiste et familialiste aux échelles collective et individuelle de la vie sociale. Pour en évaluer l’influence dans les parcours individuels, trois phases ont été isolées (l’expérience de l’affiliation, l’expérience de la cotisation et l’expérience de la liquidation des droits) puis comparées dans le récit des expériences vécues des enquêté.es. Cette démarche permet d’identifier trois types de parcours de prévoyance qui permettent de comprendre comment le dispositif produit activement des inégalités sociales dans la vieillesse : le parcours de prévoyance socialisée des fonctionnaires et des salariés, le parcours de prévoyance patrimoniale des professions indépendantes et enfin le parcours de prévoyance familialiste des épouses et les mères. A partir de ces résultats, la thèse propose quatre pistes pour une évolution solidariste de la retraite.