Ciblage thérapeutique de ALK et de CD47 dans le lymphome anaplasique à grandes cellules ALK-positif
Auteur / Autrice : | Layla Veleanu |
Direction : | Elizabeth Macintyre |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Hématologie |
Date : | Soutenance le 30/06/2023 |
Etablissement(s) : | Université Paris Cité |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Hématologie, oncogenèse et biothérapies (Paris ; 2014-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Institut Necker Enfants-Malades (Paris ; 2014-....) |
Jury : | Président / Présidente : Fabienne Meggetto-Pradelle |
Examinateurs / Examinatrices : Thiago Trovati-Maciel | |
Rapporteur / Rapporteuse : François Lemonnier, Mary Poupot |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
Le lymphome anaplasique à grandes cellules ALK-positif (ALK-positive anaplastic large cell lymphoma, ALCL ALK+) est un lymphome T périphérique rare (environ 50 nouveaux cas par an en France) survenant chez les enfants et les adultes jeunes. La lymphomagenèse est liée à une translocation impliquant le gène ALK et un gène partenaire (le plus souvent NPM1), conduisant à l'activation constitutive de ALK et de ses voies de signalisation d'aval. La réponse immune anti-tumorale (RIAT) est particulièrement intéressante dans l'ALCL ALK+. En effet, l'expression anormale de ALK (qui n'est normalement plus exprimée après la naissance) peut induire une RIAT spécifique anti-ALK, à la fois cellulaire et humorale, qui confère un pronostic favorable. Il parait donc intéressant, sur le plan thérapeutique, d'une part d'inhiber ALK par l'utilisation d'inhibiteurs de ALK, et d'autre part d'activer la RIAT, notamment en ciblant l'axe CD47/SIRPα que les cellules cancéreuses détournent afin d'inhiber les macrophages anti-tumoraux. Plusieurs inhibiteurs de ALK sont actuellement disponibles dans les cancers du poumon ALK+, mais la rareté des patients ALCL ALK+ ne permet pas de tous les évaluer en clinique. Leur évaluation préclinique est donc indispensable. De la même façon, le ciblage thérapeutique de CD47, récemment développé en oncologie, doit être évalué dans des modèles précliniques d'ALC ALK+ avant un éventuel passage à l'Homme. Les objectifs de mon travail étaient 1) de comparer 8 inhibiteurs de ALK dans des modèles précliniques afin de sélectionner le meilleur candidat pour une application clinique, et 2) d'évaluer l'efficacité et le mode d'action d'un anticorps (Ac) anti-CD47 dans des modèles précliniques. Tout d'abord, j'ai pu mettre au point un modèle rare d'intérêt majeur de xénogreffe tumorale dérivée de patient (patient-derived xenograft, PDX) d'ALCL ALK+. J'ai pu démontrer la similarité phénotypique et génotypique entre la PDX et la tumeur primaire, ainsi que sa stabilité lors des greffes successives aux souris. Par la suite, j'ai comparé 8 ALK inhibiteurs en utilisant notre modèle PDX. J'ai pu montrer que le meilleur candidat était le Brigatinib. Suite à ces résultats, nous avons traité avec du Brigatinib hors AMM 15 adultes en rechute ou réfractaires à la chimiothérapie et au Brentuximab Vedotin, dont le pronostic est habituellement sombre. La posologie était celle recommandée dans les cancers du poumon. Le taux de réponse globale était de 93% dont 73% de réponse complète. La survie sans progression et la survie globale à 1 an s'élevaient à 72% et 85% respectivement, montrant ainsi l'efficacité du Brigatinib, par ailleurs bien toléré. Concernant le ciblage thérapeutique du CD47, j'ai tout d'abord validé la surexpression de CD47 dans l'ALCL ALK+ et son mécanisme de surexpression lié à ALK et STAT3. J'ai ensuite démontré l'efficacité de l'Ac anti-CD47, en améliorant la survie globale des souris PDX traitées. Sur le plan fonctionnel, j'ai mis en évidence que l'Ac anti-CD47 induisait la phagocytose cellulaire dépendante des anticorps (antibody-dependent cellular phagoctytosis, ADCP), et que la présence de macrophages était indispensable. Enfin, j'ai montré que l'Ac anti-CD47 induisait le recrutement des macrophages au sein de la tumeur, dans une configuration spatiale caractéristique. En conclusion, nos résultats valident l'inhibition optimale de ALK par le Brigatinib et l'inhibition de CD47 comme une preuve de concept du ciblage thérapeutique de la RIAT dans l'ALCL ALK+. Ces données permettent d'envisager des essais cliniques précoces chez l'Homme.