Une approche omique intégrative révèle des déterminants de virulence de Yersinia pestis et des candidats biomarqueurs de la peste
Auteur / Autrice : | Pierre Lê-Bury |
Direction : | Olivier Dussurget |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Microbiologie |
Date : | Soutenance le 22/06/2023 |
Etablissement(s) : | Université Paris Cité |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Bio Sorbonne Paris Cité (Paris ; 2014-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Unité Yersinia (2004-....) |
Structure de recherche : Institut Pasteur. Département de Microbiologie (2006-….) | |
Jury : | Président / Présidente : Friederike Jönsson |
Examinateurs / Examinatrices : Francis Impens | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Petra Dersch, Christophe Junot |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
Yersinia pestis est le bacille hautement virulent responsable de la peste, une zoonose ré-émergente généralement transmise par les puces se nourrissant sur des mammifères bactériémiques. Les trois principales formes cliniques sont i) la peste bubonique, la forme la plus fréquente résultant de la piqûre par une puce infectée, ii) la peste pulmonaire transmise par voie aérienne entre individus et iii) la peste dite septicémique, la forme la plus foudroyante. Dans les trois formes, les bactéries atteignent la circulation sanguine et conduisent à la mort. Nous avons utilisé une approche intégrative de biologie des systèmes afin de découvrir les facteurs bactériens qui jouent un rôle critique dans la phase bactériémique de la peste, une étape nécessaire à sa transmission dans le réservoir animal et à la progression de la maladie chez l'homme. Nous avons tout d'abord mis au point les conditions de culture de Y. pestis dans le plasma humain afin de générer un atlas protéique. Nous avons implémenté et optimisé une nouvelle méthode d'extraction de protéine et validé son utilisation en environnement de sécurité de niveau 3. Une méthode originale d'extraction des protéines après croissance des bactéries dans le sang a ensuite été mise au point afin de compléter les données plasmatiques. Nous avons obtenu le protéome de Y. pestis le plus complet à ce jour, couvrant plus de 2500 protéines. Parmi celles-ci, 1500 ont été détectées dans des bactéries associées aux monocytes et polynucléaires neutrophiles. En parallèle, nous avons développé un site internet - Yersiniomics - afin d'analyser et visualiser ces données. Nous avons collecté les génomes complets ainsi que les expériences transcriptomiques et protéomiques publiées, représentant plus de 300 conditions biologiques in vitro et in vivo intégrées dans la base de données. Ce site unique permet d'accéder à la collection de données de l'espèce Yersinia la plus complète actuellement, grâce à un navigateur génomique interactif intégrant l'ensemble des expériences au niveau de chaque gène. Une visualisation des données de couverture de séquençage des ARNs ainsi que des heat maps représentant les données transcriptomiques et protéomiques ont été implémentés. Nous avons ensuite sélectionné 44 protéines dont l'expression était modulée lors de la croissance bactérienne dans le plasma humain et/ou présentant un profil intéressant en utilisant Yersiniomics, puis nous avons inactivé les gènes correspondants. L'étude des souches mutantes nous a permis d'identifier plusieurs protéines impliquées dans l'homéostasie du cuivre, une subtilase, une protéase et des lipoprotéines nécessaires à la croissance de Y. pestis dans le sang humain et/ou à la virulence chez la souris. Nous avons notamment démontré que la lipoprotéine SlyB joue un rôle critique pour la virulence dans les trois formes de peste et pour la croissance de Y. pestis dans le sérum et le sang. Un mutant de délétion slyB montre une sensibilité accrue aux composés de la réponse immunitaire innée, tels que le complément et les protéases et peptides anti-microbiens des polynucléaires neutrophiles, et montre une survie réduite dans des macrophages humains. Ces phénotypes pourraient dériver d'une augmentation de l'instabilité et de la perméabilité de la membrane externe, et d'un dérèglement du protéome de l'enveloppe bactérienne. Enfin, nous avons exploité nos modèles expérimentaux pour découvrir de nouveaux biomarqueurs de la peste. Nous souhaitons détecter les microARNs systémiques différentiellement exprimés, utilisables comme biomarqueurs pour le diagnostic précoce de la maladie. Nous avons criblé 179 microARNs à un stade précoce de la maladie dans un modèle de peste pulmonaire chez la souris et établi la preuve de concept de cette approche en identifiant cinq candidats prometteurs. Nous développons maintenant une approche de criblage non biaisé basée sur le séquençage des microARNs totaux appliquée aux différents stades de la maladie.